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Ancenis. La verrue construite dans la cour du château déclarée illégale par le Conseil d’État

Victoire pour les opposants à la hideuse construction départementale dans la cour historique du château d’Ancenis ! La ténacité d’une poignée de citoyens, l’opiniâtreté de l’association constituée pour lutter contre cette infamie, l’A2PCA et le courage de sa présidente Sylvie Christophe, auront donc fini par payer ! Comme quoi parfois c’est le pot de terre qui gagne contre le pot de fer !

Rappel des faits. En 2008, le Département voulant de plus grands et fonctionnels locaux pour ses services sociaux gérant de plus en plus de dossiers, souhaite construire à Ancenis un bâtiment nouveau. L’emplacement lui est assez égal, ses désirs sont une surface minimale et accessible. Curieusement, la Ville d’Ancenis ne lui propose qu’un emplacement dans la cour du château, peu accessible et sans parking, à l’emplacement où à la satisfaction générale vient d’être démoli un bâtiment genre Paillon construit par les sœurs de Chavagnes alors propriétaires dans les années 50 à une époque où on n’était pas trop regardant sur le patrimoine….Epoque que l’on croyait révolue…

Une construction disproportionnée et totalement sans rapport avec le contexte du château

Emoi des Anceniens et des amoureux du château, pétitions réunissant un millier de signatures, puis 3.800, ce qui est considérable à l’échelle locale, rien n’y fait la Mairie s’obstine et le Conseil Général se réfugie prudemment derrière elle. La présentation du projet, biaisée, montre une construction disproportionnée et totalement sans rapport avec le contexte du château ! A ce jour cette méchante union  contre nature d’une mairie de « droite » et d’un conseil général de « gauche » reste un mystère, tout comme cet acharnement malsain à dénaturer un site historique déjà mal en point, ainsi que cette vitesse pour mettre devant le fait accompli, comme si on avait mauvaise conscience et en dépit des procédures en cours. Tout comme le rôle obscur des Monuments Historiques et des Bâtiments de France qui n’auraient jamais dû permettre ni même envisager un tel saccage !

Malgré les avertissements, le projet est lancé par des fouilles « préventives » archéologiques à la pelleteuse !, qui, on pouvait s’y attendre, prétendent qu’il n’y a rien d’intéressant là-dessous, ce que démontent les rares indiscrétions qui ont fuité  – dallage et sarcophage gallo-romain, rien que ça ! – et dans la foulée la construction commence. L’Association pour la Protection du Château d’Ancenis (A2PCA) dépose un recours, un référé, peine perdue ! Alors elle assigne la commune et le conseil général en justice. Elle perd en première instance devant le tribunal administratif de Nantes.

Le succès remporté par l’avocat de l’association, Maître Bascoulergue,  dans l’affaire du Musée Dobrée contre la Ville de Nantes et le même conseil général lui donne un ultime courage, toujours avec l’aide désintéressée d’amoureux du château qui ne veulent pas que leur ville, leur comité, soit par jurisprudence à jamais associée à une imposture historique ! Alors que le bâtiment couvert de bardage en bois à la mode, qui aurait pu passer ailleurs est inauguré, elle se pourvoit donc en appel.

Et en janvier 2014 le tribunal administratif d’appel lui donne entièrement raison, disant que le référé était recevable, et surtout invalidant le permis de construire délivré par la Ville d’Ancenis ! Voilà un bâtiment construit mais illégal ! La Ville et le Département se pourvoient en cassation, ce qui en l’occurrence administrative relève du Conseil d’État. Nous sommes en mars 2014.

Les délais du Conseil d’État étant d’environ deux ans, la Ville et le Département si disent que c’est toujours ça de gagné ! Le 10 mars 2016 le rapporteur public Xavier de Lesquen conforte le jugement du tribunal administratif d’appel, et avec des mots très sévères, « le raisonnement de l’A2PCA » sur l’illégalité du permis de construire « est imparable » ! Il va même au-delà et souligne que les démolitions effectuées et l’importance du bâtiment au regard des autres éléments médiévaux ou Renaissance du château auraient imposé de « saisir la commission nationale des Monuments Historiques et d’obtenir l’autorisation du ministre en charge de ces derniers ». Rappelons que Frédéric Mitterrand, de passage  Ancenis en 2012, avait été interloqué, mais c’était juste avant les élections et comme des procédures étaient en cours, avait laissé faire. Et le rapporteur de proposer aux magistrats du Conseil d’Etat de rejeter les pourvois présentés par la Ville et le Département…

Ce que celui-ci vient de faire ce 6 avril, en confirmant irrévocablement et définitivement l’illégalité du permis de construire, non seulement parce que « le règlement du plan d’occupation des sols précédemment en vigueur rendait impossible la construction litigieuse ». Allant beaucoup plus loin – ce qui montre s’il en était besoin que les juges ont soigneusement instruit le dossier – qu’on ne badine pas avec les contraintes liées au respect du patrimoine et spécialement des monuments historiques. Et qu’il n’a pas apprécié qu’un nouvel édifice soit créé dans l’espace libre de la cour du château, classé en zone naturelle protégée (NDp), où les contraintes urbanistiques sont particulièrement sévères et soumises à l’approbation  de l’architecte des Bâtiments de France. Ce manque d’un avis de la commission nationale des Monuments historiques avait été dénoncé dès la première instance, souligne Sylvie Christophe, la présidente de l’A2PCA. Ce qui prouve, ajoute-t-elle, que les membres du Conseil d’État ont vraiment bien lu le dossier.

La victoire morale d’une petite association

Et maintenant ? Au moins deux points positifs : la victoire morale d’une petite association n’ayant que les moyens fort modestes de ses membres et sa volonté contre une commune et un département. Et que pour faire passer la pilule, ayant sans doute conscience de participer à une mauvaise action, le Département a financé la restauration – pour laquelle il avait pourtant dit qu’il ne mettrait pas un sou – du Logis Renaissance qui s’effondrait. Tant mieux, mais cette superbe restauration, à quelques incongruités près, ne fait que souligner par contraste la laideur du truc départemental, qui déjà vieilli très mal !

Dans la France de 2016, cela ne fait qu’un illégal de plus en liberté ! Démolir est le souhait de l’Association, mais faire disparaître cette verrue ne sera pas facile. Reste que la Ville d’Ancenis rumine discrètement sa honte, tandis que le conseil général, mauvais perdant, a une curieuse défense disant que tout le temps des travaux il avait le droit pour lui, passant allègrement sur la décision de la plus haute juridiction administrative qu’il a lui-même saisie ! Il ferait même douter la Presse du bien-fondé du droit par cet argument spécieux ! Cette incroyable légèreté, à l’image de toute cette affaire, va certainement inciter les défenseurs du beau château d’Ancenis à ne pas en rester là !

Gabriel Bonnet

Crédit photo : DR
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