Rechercher
Fermer ce champ de recherche.

Le nationalisme économique américain, une synthèse à la croisée des chemins

10/07/2017 – 08h20 Rennes (Breizh-Info.com) – Dans un monde occidental qui semblait irrémédiablement voué à la mondialisation totale, l’élection de Donald Trump a été un coup de tonnerre. Au-delà des reproches qui lui ont été fait quant à ses idées et à ses postures sur des sujets distincts des questions économiques, force est de constater que Donald Trump a été élu, au moins en partie, sur un projet protectionniste.
Christian Harbulot, directeur de l’Ecole de guerre économique, et ses élèves ne s’y sont pas trompés en consacrant un ouvrage entier au phénomène, Le nationalisme économique américain.

Un retour aux fondamentaux pour protéger l’emploi ?

« La résurgence du nationalisme économique dans le débat politique entre en contradiction avec le discours jusqu’alors dominant sur la mondialisation des échanges » analyse en introduction le directeur de l’Ecole de guerre économique. Et Christian Harbulot de pointer du doigt les succès du dirigisme chinois qui a permis un développement industriel et commercial sans pareil.

Analysant la volonté de Donald Trump de promouvoir un protectionnisme raisonné mais puissant, il donne crédit au nouveau président des Etats-Unis d’avoir pris conscience « des effets dévastateurs de l’agressivité commerciale d’économies étrangères sur l’emploi aux Etats-Unis ». Et Christian Harbulot ne manque pas de rappeler ce qui semble avoir été oublié par de nombreux observateurs du géant américain : pendant de nombreuses décennies, les Etats-Unis se sont construits grâce au protectionnisme, grâce au nationalisme économique.

C’est après la guerre d’indépendance que les Américains ont compris que le territoire sur lequel ils régnaient devait être protégé. Christian Harbulot cite notamment un extrait révélateur d’un discours d’Ulysses Grant faisant l’apologie du protectionnisme en étudiant le cas du développement de l’Angleterre.

C’est dans un objectif de « rupture des liens de dépendance vitale avec l’Europe » que les Américains du Nord optent pour le nationalisme économique.

Enfin, tout au long de leur histoire, les Américains ont su faire preuve d’adaptabilité en passent en mode isolationniste quand leur économie le nécessitait (crise de 29, crise de 70, etc.).

Tchatchérisme ou Reaganisme ?

Les deux exemples les plus récents et emblématiques de nationalisme économique dans l’esprit des occidentaux sont évidemment les politiques menées par Margaret Thatcher et Ronald Reagan.

Dans un chapitre limpide, Christian Harbulot démontre que les différences avec la « Dame de Fer » sont nombreuses malgré les points communs existant entre les deux dirigeants politiques. Les efforts de la dirigeante anglaise se sont presque exclusivement portés sur la réforme du système social. Elle n’a pas cherché à « développer une politique d’investissement national à des fins industrielles » mais a plutôt voulu développer l’économie de son pays, au prix même de la perte de fleurons industriels ou technologiques.

L’héritage reaganien est lui parfaitement assumé par Donald Trump. Christian Harbulot rappelle d’ailleurs que tous les candidats républicains s’en sont réclamé lors de la campagne. En France, pareil patronage fait immanquablement penser à celui du Général de Gaulle. Adepte de la realpolitk, Reagan était un libéral convaincu mais finalement capable de prendre des mesures pragmatique de protection de l’économie nationale. Par exemple, il avait pris en 1981 la décision de réduire l’importation de véhicules automobiles japonais pour lutter contre le dumping économique de ce secteur industriel étranger.

Depuis Regan, deux concepts ont alimenté la politique économique américaine : pragmatisme et protection des intérêts américains. Christian Harbulot ne peut que constater que Donald Trump, au moins en apparence, est bien l’héritier de Donald Reagan.

Un ouvrage synthétique qui balaye plusieurs champs d’étude

Au travers de plusieurs chapitres bien construits et facile à lire, Le nationalisme américain de Christian Harbulot et ses élèves de l’Ecole de guerre économique met en perspective avec justesse les promesses et les menaces du début de règne de Donald Trump.

Deux chapitres complémentaires permettent d’appréhender des limites idéologiques avec lesquelles Donald Trump devra composer. D’un côté celles de son électorat pour qui la radicalité de l’Alt-Right peut-être un aiguillon à prendre en compte, de l’autre, l’idéologie cosmopolite véhiculée par les nouveaux maîtres du monde que sont les multinationales de la Silicon Valley.

Allant plus loin que le continent américain, Christian Harbulot rappelle que le nationalisme économique n’est pas une lubie de Donald Trump mais bien une constante de l’histoire humaine. Balayant rapidement mais efficacement quelques exemples historiques (République de Venise, Compagnie des Indes, Japon…) et convoquant Keynes ou Braudel, Harbulot et ses élèves expliquent brillamment que le protectionnisme est au cœur des préoccupations de grands penseurs depuis des générations.

Le nationalisme économique semble gagner du terrain aux Etats-Unis. En Europe, les peuples paraissent se tourner de plus en plus vers l’idée de protectionnisme, principalement motivés par la désindustrialisation mais aussi par l’immigration extra-européenne massive. Pour juger de la pertinence d’un tel choix, tous les regards seront tournés vers les Etats-Unis durant les années à venir.

Ouvrage collectif sous la direction de Christian Harbulot, Le nationalisme économique américain, Collection Guerre de l’information, VA Editions, 2017, 117 pages, 18€.

NF

Crédit photos :  DR
[cc] Breizh-info.com, 2017, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine

 

Cet article vous a plu, intrigué, ou révolté ?

PARTAGEZ L'ARTICLE POUR SOUTENIR BREIZH INFO

Les commentaires sont fermés.

ARTICLES EN LIEN OU SIMILAIRES

Société, Vidéo

Les vertus du protectionnisme, avec Yves Perez

Découvrir l'article

Politique, Social

Le protectionnisme, un danger ou une opportunité ? Retour sur les échecs de François Hollande

Découvrir l'article

PARTICIPEZ AU COMBAT POUR LA RÉINFORMATION !

Faites un don et soutenez la diversité journalistique.

Nous utilisons des cookies pour vous garantir la meilleure expérience sur Breizh Info. Si vous continuez à utiliser le site, nous supposerons que vous êtes d'accord.

Ne ratez pas notre prochaine enquête sans filtre sur un sujet tabou !

Inscrivez-vous dès maintenant à notre newsletter confidentielle.

🔍 Recevez nos analyses pointues et nos scoops exclusifs directement dans votre boîte mail. 🔍

Clicky