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Loïk Le Floch Prigent : “Nous devons construire la Bretagne dans laquelle nos enfants vivront”. (Interview)

17/10/2015 – 08H00 Paris (Breizh-info.com) – Loïk Le Floch Prigent ne refuse pas d’évoquer ses anciens postes de capitaine d’industrie. En revanche, l’insistance des journalistes le fait sourire. « Je suis comme mon héroïne, je vais de l’avant. » Breizh-info l’a rencontré à propos de son nouveau roman, C’est parti pour durer, dont le sujet brûlant autour de transactions financières douteuses, explique pourquoi les côtes bretonnes sont parfois sacrifiées au bénéfice des promoteurs. 

Breizh-info : N’en avez-vous pas assez que l’on vous présente comme un ex d’ELF-Aquitaine ?

Loïk Le Floch Prigent : Pour la majeure partie des gens, mon nom évoque effectivement Loïk Le Floch Prigent D’autres pensent à Rhône-Poulenc, Gaz de France ou à la SNCF…

Breizh-info : A la différence qu’aujourd’hui vous inventez l’histoire plutôt que de la faire…

LLFP : Absolument. Mes romans sont des fictions et cela génère un effet de surprise auprès des lecteurs.

Breizh-info : Comment d’ancien dirigeant d’entreprises publiques devient-on romancier de polars ?

LLFP : je lis beaucoup de romans policiers, essentiellement des auteurs américains, avec une préférence pour Michael Connelly dont le héros, Harry Bosch, me fait revivre une Californie que je connais bien, celle des années 70/80. Dans cet esprit, j’ai voulu écrire sur la Bretagne de mon adolescence, celle des années 60.

Breizh-info : Pourquoi des polars ?

LLFP : Parce que le rapport du peuple avec la police et la justice est un excellent indicateur sociétal.

Breizh-info : Ernestine, votre héroïne, s’interroge sur la vie. Que feriez-vous différemment si vous pouviez revenir en arrière ?

LLFP : Ernestine va de l’avant. Moi aussi. (Large sourire) Je vois néanmoins quelle type de réponse vous espérez… Je savais que le petit monde parisien était très artificiel, je n’ai donc pas été déçu de son attitude à mon égard. Mieux, je m’y attendais ! Mais la Bretagne a toujours été un refuge salvateur. Je souhaite maintenant l’aider à s’industrialiser.

Breizh-info : De quelle manière ?

LLFP : Dans mon prochain livre : La bataille de l’industrie (Jacques-Marie Laffont Editeur), j’explique combien je crois aux efforts régionaux, en particulier pour la Bretagne. Le renouveau industriel de la France passera par ses “pays”, c’est à dire les territoires à forte culture ayant des industriels motivés qui n’attendent pas de l’Etat Central des directives ou des incitations pour agir. Notre chance s’attache en partie à la transformation numérique et à une jeunesse motivée, compétente et désireuse de réussir sans « s’expatrier ». Certaine entreprises, comme Yves Rocher ou Daniel Jouvance, appliquent ces méthodes avec le succès qu’on leur connaît.

Breizh-info : Comment se fait-il qu’un homme aguerri à la finance comme vous l’êtes, n’ait pas créé une maison d’édition pour ses propres romans ?

LLFP : Surtout pas ! Je n’envisage pas mes livres comme un business. J’espère avoir des lecteurs, pas des clients ! 

Breizh-info : L’intrigue du roman se développe autour de magouilles immobilières relatives à des plus-values financières réalisées sur des terres agricoles…

LLFP : On a effectivement beaucoup entendu parler des problèmes fonciers et immobiliers du sud de la France, et passé sous silence ce qui est arrivé en Bretagne. Trop peu ce sont interrogés de savoir comment autant de terres fertiles ont ainsi pu être transformées en lotissements. La Bretagne aussi a connu ce mélange des genres entre les décideurs et les constructeurs. C’est cela que j’ai tenu à raconter dans ce livre.

Breizh-info : Les côtes bretonnes sont-elles plus en danger de spéculation aujourd’hui qu’hier ?

LLFP : Le danger existe toujours, et pas seulement dans l’immobilier. J’en veux pour preuve l’extraction de sable à l’embouchure du Léguer (Lannion), ou la construction des éoliennes en baie de Saint-Brieuc.

Breizh-info :  Les dialogues du livre relèvent seulement de l’oral, rien dans la description, la gestuel ou l’intonation des protagonistes. Pourquoi cette épure ?

LLFP : Dans ce second ouvrage, j’ai voulu montrer la richesse de la langue bretonne. Ces fameux « bretonnismes », comme il existe des anglicismes, sont des expressions quasi intraduisibles tellement elle sont imagées et relatives à une culture précise. Etoffer les dialogues par des description redondantes auraient tué ma volonté de faire paraître la langue bretonne pour ce qu’elle est :  belle, imagée, chantante et riche. 

Breizh-info : Au delà de leur positionnement régional, en quoi vos romans se démarquent-ils des autres ?

LLFP : Ce sont des polars d’atmosphère. Le propos est de s’immiscer dans un pays, la Bretagne, à une époque précise et en fonction des réalités d’alors. Depuis les  années 60, le cadre a changé mais les problèmes restent les mêmes. Je travaille beaucoup sur cette gymnastique temporelle car elle permet de comprendre que la veulerie, la convoitise et la cupidité traversent les âges malgré le changement de décor. L’intrigue est aussi le support d’une philosophie propre à Ernestine. Soucieuse du travail bien fait, elle découvre l’auteur du crime mais s’interroge sur les vrais coupables …

Breizh-info : C’est parti pour durer est le deuxième tome des aventures d’Ernestine, cela veut-il dire qu’il y en aura un troisième ?

LLFP : Oui, un tous les deux ans, je viens de commencer le prochain.

Breizh-info : Souhaiteriez-vous faire concurrence à Marie Lester ?

LLFP : (Sourire) Bien sûr que non. Pour être en concurrence avec Jean Failler, il faudrait déjà que nos héroïnes le soient entre elles. Ce n’est pas le cas puisque Ernestine n’est en rien une professionnelle de l’enquête, elle est crêpière, tandis que Marie Lester est effectivement policière ! 

Breizh-info : L’œuvre de votre oncle, le poète Maodez Glanndour, exerce-t-elle une influence sur votre écriture et, plus largement, lui-même a-t-il exercé une influence sur votre vie ?

LLFP : Je ne parle pas bien breton, contrairement à mon oncle qui considérait ma lacune comme un tare impardonnable. Je n’ai, en outre, jamais trop goûté la poésie et j’apparaissais à ses yeux comme quelqu’un de rationnel, un industriel quoi ! Donc, pour répondre à votre question, l’influence fut et reste très relative. 

Breizh-info :  Si vous aviez le dernier mot, Loïk Le Floch Prigent ?

LLFP : Nous devons construire la Bretagne dans laquelle nos enfants vivront. Elle est encore authentique, conservons-là et faisons fructifier ce trésor.

Propos recueillis par Jérôme Enez-Vriad – Paris 08 octobre 2015 –

C’est parti pour durer, Loïk Le Floch Prigent, Editions Breizh Coop 192 pages – 11,90€

© 2015 Breizh Info & J-E.V.

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2 réponses à “Loïk Le Floch Prigent : “Nous devons construire la Bretagne dans laquelle nos enfants vivront”. (Interview)”

  1. dextre dit :

    C’est quoi, la Bretagne authentique ?

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