Vendredi 9 mai, l’Italie regarde de l’autre côté de l’Adriatique pour lancer sa grande fête du cyclisme. Le Giro d’Italia s’ouvre pour la première fois de son histoire en Albanie, entre Durrës, cité portuaire chargée d’histoire, et Tirana, la trépidante capitale. Une première étape qui mêle mer et montagnes, bitume urbain et aspérités balkaniques, pour un départ à la fois symbolique, exigeant et ouvert à tous les scénarios.
Une entame au relief modéré, mais piégeuse
Avec 160 kilomètres au programme et un dénivelé positif de près de 1 900 mètres, cette journée n’a rien d’une simple mise en jambes. Les premiers 70 kilomètres, à travers la plaine côtière albanaise, devraient offrir une belle opportunité à une échappée, mais ce sont bien les ascensions qui vont structurer la course.
La montée de Gracen, longue de 13 kilomètres à 5,1 %, se présente comme un premier test pour les jambes, avec un passage plus raide avant Pretsch qui pourrait servir de rampe d’attaque pour des baroudeurs ambitieux. Derrière, une descente rapide puis une portion en vallée mèneront le peloton jusqu’à la capitale, où l’étape changera de décor.
Tirana : un circuit urbain aux allures de piège
Le final de cette première journée prendra la forme d’un double passage sur un circuit de 22 kilomètres, hérissé d’une bosse redoutée : la côte de Surrel (4,9 km à 5,4 %, avec un premier kilomètre dépassant les 8 %). Un terrain parfaitement adapté aux puncheurs-grimpeurs, capable de faire vaciller les sprinteurs les plus lourds.
Cette montée, à franchir deux fois, devrait jouer un rôle crucial : si le peloton arrive compact, l’allure imprimée dans Surrel décidera des prétendants au sprint final. Car une fois au sommet, il restera 11 kilomètres, dont plus de la moitié en descente, suivis d’un faux plat rapide jusqu’à la ligne d’arrivée sur le boulevard Dëshmorët e Kombit, large et parfaitement plat.
La météo s’en mêle, l’incertitude s’installe
À la nervosité naturelle d’un départ de Grand Tour s’ajoutera un temps capricieux. Un crachin intermittent, sans être orageux, pourrait suffire à rendre les descentes piégeuses, notamment celle menant de Surrel vers le centre de Tirana. Un vent de sud-est soufflera légèrement, mais pourrait suffire à attiser les velléités offensives.
L’éventail des favoris est aussi large que le boulevard final. Mads Pedersen, en grande condition, fait figure de prétendant sérieux : sa puissance dans les bosses et son sens du sprint en font un candidat naturel pour ce genre d’arrivée usante. L’équipe Lidl-Trek devrait tout faire pour l’emmener dans les meilleures conditions à l’approche de Tirana.
Mais les surprises ne sont pas à exclure. Olav Kooij, malgré une reprise après blessure, peut miser sur son explosivité s’il passe les bosses. Il devra néanmoins composer avec un train réduit et un coéquipier – Wout Van Aert – encore incertain physiquement.
Parmi les outsiders, Kaden Groves ou Paul Magnier pourraient tirer leur épingle du jeu, tout comme Andrea Vendrame ou Quinten Hermans, en embuscade si les favoris s’observent. Certains comme Filippo Fiorelli ou Giovanni Lonardi, plus discrets mais en forme, pourraient même jouer les trouble-fête.
Le Giro s’ouvre à l’Est
Ce départ albanais n’est pas qu’une curiosité géographique. C’est aussi une déclaration : le Giro entend s’ouvrir davantage vers les Balkans et l’Europe orientale, où le cyclisme connaît une croissance discrète mais réelle. Tirana, avec son décor mêlant tradition ottomane et modernité chaotique, servira de toile de fond à ce coup d’envoi inédit.
Mais au-delà des cartes postales, c’est bien une première bataille tactique et nerveuse qui se profile. Pour les leaders du général, il faudra éviter les chutes et les cassures. Pour les puncheurs, c’est une occasion à ne pas rater. Pour les sprinteurs, une loterie à jouer en costaud.
À 17h15, on connaîtra le nom du premier porteur de la maglia rosa. Et il pourrait bien être inattendu. Car le Giro, c’est aussi cela : l’imprévisible érigé en art de vivre.
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