En Allemagne, la surveillance accrue de l’Alternative pour l’Allemagne (AfD) par les services de renseignement intérieur alimente une vive controverse politique. Björn Höcke, figure emblématique du parti, dénonce une atteinte grave à la démocratie et une dérive de l’État de droit.
Le climat politique allemand se tend à l’approche des élections européennes, et plus encore autour de la gestion de l’opposition. La décision de classer l’AfD — deuxième parti du pays dans les sondages — comme organisation « extrémiste de droite » par l’Office fédéral de protection de la Constitution (BfV) suscite l’indignation de ses dirigeants, qui y voient une manœuvre d’intimidation politique.
À Berlin, ce lundi 12 mai, Björn Höcke, leader régional du parti en Thuringe, entouré de juristes et de cadres du parti en Saxe, a présenté une analyse juridique de 62 pages pointant ce qu’il considère comme une violation flagrante de la démocratie. Il dénonce un usage illégal des services de renseignement à des fins partisanes, orchestré par l’ex-ministre de l’Intérieur, la social-démocrate Nancy Faeser.
Une surveillance qui contourne les garanties constitutionnelles
Dans plusieurs Länder, comme la Thuringe et la Saxe, les constitutions locales prévoient des protections spécifiques pour les élus, notamment en matière d’expression politique. Höcke et ses soutiens estiment que l’espionnage dont fait l’objet l’AfD — écoutes, infiltration par des informateurs, collecte de données — viole ces garanties, au motif que les opinions politiques exprimées dans un cadre parlementaire ne peuvent légalement faire l’objet de poursuites.
Pour le chef de file de l’AfD en Thuringe, l’action de l’Office pour la protection de la Constitution équivaut à un « harcèlement d’État » envers l’opposition. Il appelle à l’arrêt immédiat de cette surveillance, qualifiant le procédé de « dérive orwellienne » masquée derrière une prétendue défense de la démocratie.
L’affaire du slogan « Tout pour l’Allemagne »
Björn Höcke s’est aussi exprimé sur ses condamnations judiciaires pour usage de la phrase Alles für Deutschland (« Tout pour l’Allemagne »), historiquement associée aux sections d’assaut nazies (SA). L’intéressé plaide l’ignorance de cette connotation historique et affirme que cette formule était couramment utilisée avant-guerre. Il entend désormais porter l’affaire devant la Cour constitutionnelle fédérale, au nom de la liberté d’expression.
Si le contentieux actuel vise principalement les branches régionales de Thuringe et de Saxe, Höcke estime que la bataille juridique pourrait faire jurisprudence à l’échelle fédérale. Il annonce également vouloir initier une procédure contre la direction locale de l’Office de protection de la Constitution en Thuringe, pour abus de pouvoir.
Dans le même temps, le gouvernement refuse toujours de publier l’intégralité du rapport qui a conduit au classement de l’AfD comme mouvement « extrémiste ». Des fuites évoquent un document fondé sur une prétendue « hostilité systémique aux étrangers » au sein du parti, sans qu’aucune preuve concrète n’ait, à ce jour, été rendue publique.
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