La Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) poursuit la publication de son panorama 2025 des établissements de santé. C’est au tour des cliniques privées à but lucratif de passer sous la loupe. Si leur chiffre d’affaires atteint un record en 2023, la rentabilité du secteur, elle, se dégrade nettement.
Résultat net en baisse : un signal d’alerte
Les cliniques privées dégagent toujours un bénéfice global, mais leur résultat net chute à 1,8 % des recettes, contre 3 % en 2022 et 5,2 % en 2021. Ce chiffre est le plus bas depuis 2019 (1,6 %), avant les soutiens exceptionnels liés à la crise sanitaire. En valeur absolue, cela représente 362 millions d’euros de résultat net cumulé pour 2023, soit une moyenne de 377 000 euros par établissement.
Cette baisse s’explique principalement par la diminution des subventions d’exploitation (de 5,5 % à 4 % des recettes), désormais inférieures aux impôts et taxes dus, inversant la dynamique observée pendant la crise du Covid-19.
Des écarts de rentabilité selon les spécialités
La rentabilité varie fortement selon la nature des soins. En 2023, le résultat net rapporté aux recettes était de :
- 1,4 % pour les cliniques de médecine, chirurgie, obstétrique et odontologie (MCO),
- 2,2 % pour celles de soins médicaux et de réadaptation (SMR),
- 7,9 % pour les cliniques psychiatriques, qui demeurent les plus rentables.
Un tiers des cliniques en déficit
La part des cliniques déficitaires s’est envolée à 32 % en 2023, contre 25 % l’année précédente. La hausse touche tous les secteurs : 37 % des SMR sont dans le rouge (+8 pts), 34 % des MCO (+8 pts) et 17 % des cliniques psychiatriques (+0,3 pt). Le déficit cumulé des établissements déficitaires atteint -356 millions d’euros, tandis que l’excédent cumulé des autres recule à 717 millions.
Les recettes des cliniques privées progressent pourtant (+5 % en 2023, après +5,7 % en 2022 et +11,1 % en 2021), atteignant 19,6 milliards d’euros. Cette hausse s’explique par une augmentation de l’activité de +6,3 % par rapport à 2022. Cependant, cette dynamique ne compense pas l’augmentation des dépenses.
Les dépenses totales progressent de +6,4 %. Les achats et charges de gestion courante, notamment dans un contexte inflationniste, bondissent de +8,9 % pour atteindre 47,1 % des recettes, leur plus haut niveau depuis 2006. Les charges de personnel (39,2 % des recettes) progressent aussi, en particulier sous l’effet de la prime de pouvoir d’achat.
L’effort d’investissement se replie à 4,9 % des recettes (après 5,6 % en 2022), interrompant la reprise post-crise. Cette part reste supérieure à la dotation aux amortissements (3,9 %) mais nettement supérieure à la capacité d’autofinancement (CAF), qui s’effondre à 2,9 % – son niveau le plus bas depuis 2006.
Endettement : un paradoxe apparent
L’endettement des cliniques continue de baisser en valeur absolue : 2,1 milliards d’euros en 2023 (-6,6 %). Rapportée aux recettes, la dette atteint 10,8 %, son plus bas niveau depuis 2006. Pourtant, la durée apparente de remboursement de cette dette (rapport entre dette et CAF) remonte à 3,7 années, niveau inédit depuis 2011, en raison de la faiblesse de la CAF. La proportion d’établissements en situation de surendettement reste stable à 19 %, mais la part de ceux sans aucun critère d’alerte diminue à 57 %.
Ces chiffres révèlent une double réalité : d’un côté, des établissements qui parviennent à maintenir une activité croissante et des recettes en hausse ; de l’autre, une rentabilité en baisse, des disparités fortes selon les disciplines, et un socle d’investissements fragilisé. La fin des mécanismes exceptionnels d’aide post-Covid fragilise clairement les cliniques privées à but lucratif, et le système tout entier semble désormais dépendre d’arbitrages budgétaires et réglementaires à venir.
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