Dans son livre « L’histoire secrète de l’oligarchie anglo-américaine », publié en 1981 quatre ans après sa mort, Caroll Quigley retrace toute l’histoire du « monde oligarchique et opaque dont l’action a été déterminante pour le monde anglo-saxon ».
Le premier chapitre commence ainsi : « Un après-midi hivernal de février 1891, à Londres, trois hommes s’engagèrent dans une conversation sérieuse. Des conséquences de la plus grande importance pour l’Empire britannique et le monde dans son ensemble devaient en découler. Ils étaient en train d’organiser une société secrète qui allait être, pendant plus de cinquante ans, l’une des forces d’élaboration et d’exécution les plus importantes de la politique impériale et étrangère britannique »
Ces trois personnages étaient des gens très connus en Angleterre. Leur chef était Cecil Rhodes, l’homme le plus important d’Afrique du Sud et il était doté d’une immense fortune. Il donnera plus tard son nom à la Rhodésie. Le deuxième était William T. Stead, journaliste très célèbre . Le troisième était Reginald Baliol Brett, qui devint lord Esher et fut le conseiller d’Edward VII et de Georges V. Leur projet était très simple : « Cecil Rhodes croyait comme John Ruskin que seule l’élite britannique pouvait et devrait diriger le monde pour le bien et le bonheur de l’humanité ».
Qui était Cecil Rhodes ?
Toujours d’après Quigley, Rodes était franc-macon et avait été initié par la loge N° 357 de l’université d’Apollo et élevé au grade de Maître Maçon en 1877. Cependant il critiquait beaucoup la franc-maçonnerie « pour son impotence et son incompétence à faire progresser les intêrets de la race britannique ». Il écrivit pas moins de sept testaments afin d’utiliser son immense fortune dans différents projets « mondialistes » tout au long de sa vie. Le premier était de constituer une société secrète dont l’objectif serait de se consacrer « au retour de l’Angleterre à sa gloire d’antan » Ainsi fut constituée la « Round Table » (Table ronde) qui devint rapidement le plus puissant organe de la confrérie britannique.
Cette société secrète est par ailleurs mentionnée dans cinq des sept testaments qu’il a rédigé, et notamment celui créant une institution éducative dans laquelle les étudiants se verraient octroyer une bourse d’études. Le prix Cecil Rhodes est toujours attribué de nos jours. A sa mort en 1902, Cecil Rhodes avait 48 ans et sa fortune, déjà considérable, s’était augmentée de la prise de possession des mines d’or et de diamants appartenant à la « de Beers » en Afrique du Sud.
Son troisième testament avait fait de Lord Nathan Mayer Rothschild son légataire universel.
La round table s’étoffe avant de s’exporter
Dès son origine, la Round Table , quelquefois appelée « groupe de Milner » ou encore « le jardin d’enfants de Milner » était conçue pour pouvoir s’exporter. La création du RIIA (Royal Institute of International Affairs), souvent appelé « Chattam House » en 1920 a servi de modèle au CFR (Council on Foreign Relations) américain en 1921 ainsi qu’à l’IPR (Institute of Pacific Relations) en 1925, témoigne de cette volonté d’internationalisation, voire de « mondialisation ».
C’est à la fin de la première guerre mondiale que cette influence héritée de la Round Table se fit sentir aux États-Unis lorsque le CFR, sous l’impulsion de son président Edward Mendell House, véritable « nounou » de Woodrow Wilson, créa la SDN (Société Des Nations) qui était l’ancêtre de l’ONU. Peter Dale Scott, dans son livre « l’Etat-profond américain » (eds Demi-lune) fait de nombreuses références au CFR. Ce think-tank (littéralement « réservoir de pensée ») a progressivement pris en charge la politique étrangère américaine et, de ce fait, est devenu un des piliers de ce qui est aujourd’hui appelé « l’Etat-profond américain »
Mondialiste par essence, cette société secrète a compris au fil du temps que la puissance britannique devait être renforcée par la puissance américaine et que le concours de la City était nécessaire afin d’établir cette domination mondiale.
La finance internationale veut contrôler la monnaie américaine
Peter Dale Scott relate , dans son chapitre consacré à « l’État profond, le gouvernement de l’ombre et le supramonde de Wall Street (p 44 et 45) :
« Une thèse importante de ce chapitre et de cet ouvrage consiste à démontrer que, dans les milieux méconnus et pratiquement non régulés du supramonde et de l’État profond, nous pouvons observer non seulement leur influence prédominante, mais aussi leurs actes illégaux et antisociaux, voire meurtriers ». L’inclusion par Mike Lofgren de Wall Street dans sa définition de l’État profond renforce l’observation de Franklin Roosevelt, adressée en 1933 à son ami le « colonel » E.M.House » « la vérité (…) est, comme vous et moi le savons, qu’une composante financière s’est emparée du gouvernement depuis l’époque d’Andrew Jackson ».
Dans cette phrase, Roosevelt fait naturellement allusion à la création de la Réserve fédérale, qui n’a d’ailleurs rien de « fédéral » et à laquelle Edward Mendell House avait participé. Mais il remonte plus en amont de l’histoire en citant Andrew Jackson qui avait été un opposant résolu à toute banque centrale américaine. Jackson avait déclaré
« La Banque essaie de me tuer mais c’est moi qui la tuerait ! » a-t-il confié au vice-président Martin Van Buren. Cela dénote déjà l’antagonisme quasi structurel qui oppose les banquiers internationaux à la démocratie américaine.
La dernière tentative pour redonner le contrôle de sa monnaie au peuple américain, tel qu’il est défini dans l’Article premier de la Constitution de 1787 fut effectuée par Abraham Lincoln en 1863 avec l’émission par le Congrès des « green back dollars ».
Il fut assassiné en 1865…
Ayant pris le contrôle de la monnaie américaine le 23 décembre 1913, l’exécution du plan mondialiste devenait possible. La FED et la Banque d’Angleterre pouvaient dès lors financer la Première guerre mondiale. Le seul adversaire de cet État profond demeurait le peuple américain lui-même et son « isolationnisme » théorisé par la « Doctrine de Monroe » de 1823.
1949 consacre la domination de l’État profond
Les États-Unis sont les vainqueurs en 1945 en tant que puissance maritime. Ils allaient dominer les échanges internationaux grâce au dollar que l’État profond réussit à imposer comme monnaie internationale. Un complexe « militaro-industriel » né de la guerre et en particulier du projet « Manhattan » allait permettre à l’armée américaine d’être le « bras armé des mondialistes » et d’imposer à partir de 1949 une sorte de « gouvernement de l’ombre » au travers du projet dit « du jugement dernier », justifié par le fait que l’URSS était devenue une puissance nucléaire. Il fallait trouver une parade à la destruction simultanée des trois centres de pouvoir que sont la Maison Blanche, le Capitole et le Pentagone. Dans ce cas, une autorité non-élue prendrait le pouvoir pour continuer la guerre et riposter.
En 1961, Eisenhower, dans son discours d’adieu dénonce le complexe militaro -industriel comme un danger pour la démocratie. En novembre 1963, Kennedy dénonce un « pouvoir de l’ombre » qui s’est installé à la Maison Blanche.
En 1981, l’État profond s’installe au cœur du pouvoir sous Reagan et son vice-président Georges H Bush s’assiéra dans le bureau oval en 1989. Le Jugement dernier prendra le nom beaucoup plus explicite de « COG » (Continuity Of Government)
En 1991, la disparition de l’URSS laissera l’État profond seul en lice pour achever sa prise de domination mondiale tout en restant ignoré de la quasi-totalité de l’humanité. Francis Fukuyama pensait que « c’était la fin de l’histoire » mais pourtant tout n’était pas dit. La cupidité des banquiers internationaux qui gagnaient déjà des sommes fabuleuses avec les intérêts d’une dette payés par les contribuables alors que l’argent prêté venait de nulle part, est allée trop loin en transférant les processus industriels à des pays « en voie de développement ». Ceux-ci, et en particulier la Chine, ont vite compris le profit qu’ils allaient pouvoir en tirer.
Quel avenir pour l’État profond qui voulait être le « Supramonde » ?
Pour installer un gouvernement mondial qui était leur but ultime, il fallait continuer à rester dans une ombre protectrice. David Rockefeller, fondateur du « Bilderberg » et de la « Commission trilatérale », deux think tanks souchés sur le CFR, l’avait parfaitement compris. Le grain de sable qui a obligé l’État profond à s’exposer en pleine lumière s’appelle Donald Trump. Élu contre toute attente contre la candidate de l’État profond en 2016, il déclarait en 2017 que « les mondialistes n’avaient plus d’avenir » Cependant, il a perdu l’élection de 2020 et ses adversaires ont cru qu’ils avaient gagné en plaçant Joe Biden à la Maison Blanche. C’était trop visible, trop criant.
Le peuple américain voulait renouer avec les valeurs qui étaient les siennes à la création des États-Unis.
Aujourd’hui, ce sont les cinq-sixièmes de la population mondiale qui aspirent au maintien des souverainetés nationales. A moins d’une guerre mondiale qui, – faut-il l’espérer ? – n’aura pas lieu,le plan mondialiste n’arrivera pas à son terme.
Jean Goychman
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