On aurait pu rêver d’une épopée flamande, d’un vent malin, de pavés tourmentés et de bardés en furie. Mais ce lundi 7 juillet, entre Valenciennes et Dunkerque, la route du Nord s’est transformée en couloir d’hôpital. Trois jours de course, trois jours d’ennui. Le Tour de France 2025 ressemble, pour l’instant, à une sieste nationale entrecoupée de carambolages.
Pas d’échappée. Pas de panache. Pas même un baroudeur pour jouer les Don Quichotte. Juste un peloton qui roule à l’économie, comme une messe sans prêche, en attendant le sprint, seul moment autorisé d’expression… et de fracture.
Quand le Tour devient une loterie d’assurance
Le fait du jour ? Ce n’est ni la victoire au sprint de Tim Merlier, aussi solide soit-elle, ni la photo-finish sur Jonathan Milan, aussi serrée soit-elle, mais bien le fracas des corps sur l’asphalte : Jasper Philipsen, maillot vert et chasseur d’étapes, expédié à terre à Isbergues. Verdict : clavicule cassée, adieu la Grande Boucle. Meeus, Evenepoel, Jeannière, Coquard, Penhoët… mêmes noms, mêmes maux. Ce Tour n’a pas d’échappée, mais collectionne les abandons comme des trophées.
Il faudra bien, un jour, que les organisateurs et les équipes se regardent dans un miroir. Trop d’enjeux, trop d’équipes, trop de sponsors, trop de train-trains. Les fins d’étapes deviennent des entonnoirs mortels. À force de vouloir concentrer le spectacle dans les 300 derniers mètres, on concentre surtout les drames. Et la question n’est plus si un coureur mourra un jour en plein sprint, mais quand.
Une victoire sans relief, dans une étape sans sel
Tim Merlier, lui, ne boude pas son plaisir. Le Belge de la Soudal-QuickStep, sevré de victoire sur le Tour depuis 2021, a jailli comme un diable dans la dernière ligne droite, déjouant le coup trop précoce de Milan. Victoire méritée, certes. Mais dans un décor d’hôpital de campagne et sur fond de lassitude générale, difficile de s’enflammer.
Le peloton, lui, continue de ronronner. Et nous, spectateurs, de bailler. Trois jours de procession, trois jours d’attente vaine. Même le Giro, ces dernières années, n’a pas offert pareille monotonie en début de course. À ce rythme-là, le prix de la combativité pourrait bientôt être attribué à un spectateur qui cligne des yeux.
Etape 4 : le vent, enfin ?
Ce mardi 8 juillet, on quitte la monotonie nordiste pour les collines normandes : ce mardi 8 juillet, la quatrième étape du Tour de France s’élance d’Amiens pour rejoindre Rouen après 174 kilomètres accidentés, techniques, nerveux — et peut-être enfin passionnants.
Disons-le d’entrée : cette étape a tout d’une ardennaise déguisée en étape de plaine. Un parcours piégeux, un final truffé de bosses courtes mais meurtrières, des virages, des rétrécissements, des ralentisseurs. Un terrain de jeu pour ceux qui aiment attaquer — ou pour ceux qui n’ont plus le choix. Après trois jours d’ennui, dont une troisième étape digne d’une procession funèbre malgré les ambulances à répétition, le Tour a besoin de panache. Et cette journée peut enfin en offrir.
Le cœur de l’explication se trouvera dans les 30 derniers kilomètres : la côte de Belbeuf pour réchauffer les jambes (1,3 km à 9,1 %), la côte de Bonsecours en embuscade (1,3 km à 9,1 %), la côte de la Grand’Mare (1,8 km à 5 %), et enfin le juge de paix : la rampe de Saint-Hilaire (800 mètres à 10,6 %, pointes à 15 %). Un mur plus court que le Huy wallon, mais plus abrupt, plus piégeux, plus propice à faire exploser les groupes, les certitudes et les oreillettes.
Celui qui basculera au sommet avec quelques mètres d’avance pourra espérer lever les bras à Rouen. Derrière, les faux plats, les courbes et les descentes ne pardonneront pas l’hésitation.
Mathieu van der Poel, maillot jaune sur le dos et mental de feu, est le favori logique. Il a déjà montré sa supériorité à Boulogne. Mais la rampe de Saint-Hilaire n’est pas une autoroute flamande : Pogačar pourrait bien y lâcher une banderille, Vingegaard le suivre sans collaborer, Jorgenson tenter de griller tout le monde par l’anticipation. Kévin Vauquelin, Remco Evenepoel, Romain Grégoire ? Tous ont le profil pour secouer le cocotier. Mais encore faut-il oser. Encore faut-il désobéir aux radios, ignorer les tableurs et mordre dans la pente comme on mord dans l’Histoire.
Après trois jours soporifiques où le seul frisson venait des fractures de clavicules, le Tour 2025 est attendu au tournant. Cette quatrième étape pourrait bien être le réveil qu’on attendait. Le réveil d’une course vivante, haletante, dangereuse dans le bon sens du terme.
On croise les doigts pour que les audacieux osent. Car sur les rampes de Saint-Hilaire, c’est la vérité du cœur qui parlera, pas celle des watts. Il est temps que le Tour redevienne un roman, pas un fichier Excel.
YV
Crédit photo : ASO/ Charly Lopez
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2 réponses à “Tour de France 2025. Étape 3 : procession funèbre (et dangereuse) vers Dunkerque, ou la mort programmée du panache…”
Je ne regarde plus le Tour à la télé, c’est devenu d’un ennui pas possible et on perd son temps. Tout n’est que calcul et stratagème pour mener un coureur à la victoire. On a une épreuve où, dès le départ, on sait qui va gagner.
Je fais partie de la »vielle école » puisque j’ai 90 ans et je suis outrée par le comportement actuel de certains Français qui n’ont plus de respect…même pour les morts! En effet, lors de la 2ième étape du Tour de France 2025:j’ai vu des Français qui étaient assis sur les tombes du cimetière de Saint-Etienne-au-Mont (dans le Pas-de Calais),le 6 juillet, ou debout les pieds sur des stèles funéraires, pour mieux voir la course, sans respect pour les lieux!…la presse mainstream n’en a pas parlé!.. Où vivons-nous?…chez des BARBARES?..