Tour de France 2025 – Van Aert terrasse Montmartre, Pogacar honore le panache, Paris redevient ville-lumière

Il y a des fins qu’on oublie dès qu’on les a vues. Et puis il y a ce dimanche 27 juillet 2025, sur les hauteurs détrempées de Montmartre, où le Tour de France a enfin osé mourir debout, dans un final à la flamande, les mains sur les cocottes et les tripes au bord du guidon.

Fini les processions léthargiques pour sprinteurs sponsorisés, les trains de cafés gourmands jusqu’aux Champs-Élysées. Cette 21e étape fut un carnage élégant, un classique d’avril téléporté en plein été, avec du pavé, de la pluie, des jambes en feu et un Wout van Aert en conquérant solitaire, vainqueur là où on ne l’attendait plus. Trois ans qu’il tournait autour de la victoire comme un chien autour de l’abattoir. Il l’a eue, à la pédale, au panache.

Montmartre comme un mur

Trois passages sur la Butte. Trois fois la rue Lepic transformée en juge impitoyable. Le théâtre des grandes douleurs, des ambitions qui crèvent et des coups de bluff qui échouent.

Julian Alaphilippe, fidèle à sa légende tragique, a allumé la mèche. Pogacar, lui, a répondu en joueur – pas en gestionnaire. Il aurait pu se cacher, il aurait pu savourer sa quatrième victoire au général en levant le pied. Mais non, le Slovène aime le jeu. Il a voulu le feu d’artifice.

Et pendant ce temps, Jonas Vingegaard, son éternel dauphin sans poésie, se terrait au chaud, planqué dans le peloton comme un coureur de montagne dans une foire aux flandriens. Une ombre jaune pâle, témoin d’un cyclisme de la statistique, du capteur de puissance et de la peur du risque.

Van Aert, le retour du prince

Van Aert, lui, a flairé l’ouverture comme un vieux renard. Mal placé dans la deuxième montée ? Il recolle. Attaqué dans la troisième ? Il contre. Pogacar croit faire exploser tout le monde à la pédale ? C’est lui, le Belge, qui fait plier le Slovène, et de face s’il vous plaît. Une leçon. Une revanche sur les pépins de santé, les courses ratées, les doutes qu’on murmurait à son sujet.

Il a bondi seul, sous la pluie et sur le pavé, comme on part en guerre. À six kilomètres de l’arrivée, c’était encore trop tôt. Mais il a tenu, avec 10 secondes de rêve et un monde de souffrance. Et quand il a débouché seul sur les Champs, les images étaient si belles qu’on s’est surpris à aimer Paris. Cette ville devenue, l’espace de quelques minutes, un décor de cinéma, vidé de ses cloaques, réconciliée avec sa grandeur.

Pogacar, joueur magnifique

Il n’a pas gagné l’étape. Mais il a gagné le respect. Quatrième victoire sur le Tour, à 26 ans. Et surtout, il a couru cette dernière journée comme un coureur de classiques, pas comme un gestionnaire du maillot. Il a osé. Il a animé. Il a attaqué. Il a rendu hommage au vélo. Ce n’est pas un hasard si Montmartre lui a souri avant de le trahir : il s’est comporté en artiste, pas en comptable.

Et pendant ce temps-là, le Danois regardait la pluie tomber. Il savait qu’on avait « gelé les temps » à 40 bornes de l’arrivée – une absurdité réglementaire qui aurait pu figer les cœurs aussi. Mais heureusement, des hommes ont décidé que la course valait mieux que la règle, que le vélo, ce n’est pas Excel.

Chapeau bas aux organisateurs d’avoir eu le courage de briser le rituel. Terminer sur Montmartre, c’était osé, c’était sublime, c’était un doigt d’honneur à tous ceux qui pensent qu’un Tour doit finir en rond. Il fallait le faire, et ils l’ont fait. Ils ont rendu au dernier jour ce qu’il n’avait plus : du sens.

Van Aert qui lève les bras, Pogacar qui serre les dents, la pluie qui ruisselle sur les visages, Paris qui se tait un instant, redevenue capitale du cyclisme. Ce fut une dernière étape d’hommes, pas de figurants. Une leçon pour tous les suiveurs qui croient encore qu’un classement vaut plus qu’un geste.

Et maintenant ? Le rideau est tombé. Mais le cœur, lui, bat encore.

YV

Crédit photos : ASO / Billy Clusters
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