Au cœur du Massif central, les sapins bâillaient d’ennui et les vaches levaient à peine les yeux. Le peloton, lui, avait décidé de faire relâche, comme un convoi de vacancières en sursis qui économisent leurs jambes comme on économiserait les glaçons lors d’un été caniculaire. Alors Maëva Squiban, 23 ans, Bretonne et bouillonnante, a décidé d’en finir avec l’attentisme à roulettes.
Elle a planté ses jalons à trois bornes du sommet du Chansert, là où la route hésite entre la grimpette sérieuse et la promenade digestive. Elle a regardé devant, pas derrière, et elle a mis tout ce qu’elle avait de mollets dans l’histoire. En trente-deux kilomètres d’un raid solitaire, elle a signé une victoire nette, sans débat, ni bavure.
Quand elle a levé les bras à Ambert, les filles du groupe maillot jaune comptaient les secondes comme on compte les moutons. Trop tard. L’affaire était pliée depuis la dernière goutte d’acide lactique qu’elle avait consentie à offrir à la montagne.
Une victoire qui sent bon la Bretagne
Squiban, c’est l’accent de Brest qui souffle sur les cols. Un an après Cédrine Kerbaol à Morteau, elle offre à la Bretagne, un doublé d’étapes sur ce Tour qui se refuse encore trop souvent aux tricolores. Un doublé tricolore même, puisque Juliette Labous, sortie à dix bornes de la ligne comme on sort d’une torpeur, est venue chercher la deuxième place.
Un maillot jaune qui s’économise
Derrière, le peloton des cador(e)s s’est contenté de regarder passer l’Histoire. Kim Le Court, maillot jaune au torse, a pris sa bonif’ au sprint intermédiaire, puis une troisième place à l’arrivée comme on glane des points au scrabble, sans se fatiguer. Pauline Ferrand-Prévôt a fait le job, ni plus ni moins, et les favorites ont joué à la belote coinchée en peloton : une feinte d’attaque ici, une petite descente musclée là, et beaucoup de regards dans le vide. Il fallait bien laisser vivre la fugue, surtout quand elle vient d’une compatriote et qu’elle ne menace pas trop le trône.
Ce n’était pas l’étape du siècle, non. Pas de bagarre dantesque, pas de passes d’armes en lacets, pas d’embrasement général. Juste une coureuse qui a osé quand les autres dormaient. Une victoire du panache solitaire sur la prudence collective. Un clin d’œil à l’audace dans un Tour où les leaders calculent comme des comptables de banque.
Demain, les Alpes tendent leurs cols comme des pièges à ambition. On saura alors si le Tour de France Femmes 2025 veut vraiment s’écrire en lettres capitales. entre Bourg-en-Bresse et Chambéry (160 km). Avec notamment le col du Granier (8,9 km à 5,4 %), situé à 18 kilomètres de l’arrivée, puis les coureuses fileront à toute vitesse vers Chambéry pour se disputer la victoire.
En attendant, Maëva Squiban a inscrit son nom à l’encre bretonne sur les pentes du Chansert. Et ça, c’est tout sauf anodin.
Crédit photo : ASO
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