À l’est de Nantes, dans le quartier du Vieux-Doulon, la tension monte. Début août, les habitants ont vu débarquer engins de chantier et ouvriers sur une parcelle située entre la rue des Petites-Rues et l’avenue des Gazons, sans qu’aucune information préalable ne leur ait été donnée. Rapidement, le bruit court qu’un terrain d’accueil temporaire pour des familles roms expulsées d’un bidonville voisin y serait en préparation.
Un chantier découvert par surprise
Le 5 août, aucun arrêté municipal affiché, aucun courrier, aucune réunion publique : juste le vrombissement des machines et l’installation d’un accès au terrain. Les riverains, interloqués, tentent de joindre Nantes Métropole puis Nantes Aménagement, sans obtenir de réponse claire. Ce n’est que par la presse locale et le bouche-à-oreille qu’ils apprennent la nature du projet.
« On ne veut pas d’un bidonville près de chez nous », tranche un membre de l’association syndicale libre Résidence des Gazons. « La parcelle est à 30 mètres de nos maisons, dans une zone inondable et sans équipements. »
Face au silence des autorités, une réunion de quartier s’est tenue le 9 août, à l’initiative de riverains et avec le soutien du mouvement Infiniment Nantes. Les participants dénoncent l’absence totale de concertation et pointent les risques : insalubrité, saturation routière, problèmes sanitaires, atteintes potentielles à l’environnement.
Pour eux, le choix de lancer les travaux en plein cœur de l’été ne relève pas du hasard : « Tout porte à croire qu’il s’agit de passer en force, en tenant les habitants à l’écart », estime Foulques Chombart de Lauwe, principal opposant à Johanna Rolland, dans un communiqué
« Sans information ni concertation, Nantes Métropole a lancé des travaux en plein été pour aménager un camp de population Roms sur une parcelle non équipée, aux risques sanitaires et environnementaux majeurs. Les habitants exigent transparence et suspension immédiate du projet. Le mardi 5 août, sans aucune information préalable ni affichage d’arrêté, les habitants du quartier de Doulon-Gohards ont vu arriver des engins de chantier au cœur de leur îlot d’habitation. Surpris par ces travaux et ne disposant d’aucune explication officielle, les riverains ont su agir efficacement et fait interrompre le chantier avant d’obtenir davantage d’informations. Ce n’est que par voie de presse, puis par le bouche-à-oreille, qu’ils ont appris que Nantes Métropole projetait d’installer un camp de Roms au bout de leurs jardins. Une réunion citoyenne face à l’absence de la mairie. Le samedi 9 août, à la demande des habitants, une réunion de quartier s’est tenue au domicile du représentant de quartier du mouvement Infiniment Nantes, en présence de nombreux riverains, afin de tenter de comprendre les tenants et les aboutissants de ce chantier. Pendant près de trois heures, les échanges ont permis de constater la dangerosité du projet ainsi que l’absence totale d’information, de concertation et de prévention de la part des autorités. Un terrain totalement inadapté.
La parcelle visée est inondable, dépourvue de tout aménagement, et présente des risques sanitaires, écologiques et routiers évidents. Son accès est limité et sa configuration rendrait rapidement les conditions de vie intenables, autant pour les habitants du quartier que pour les personnes qui y seraient installées. Une décision prise en catimini au cœur de l’été. Tout porte à croire que cette décision a été prise à la hâte, en plein mois d’août, dans une volonté manifeste de tenir les habitants à l’écart d’un projet qui les concerne pourtant directement. Les contours restent flous, voire inquiétants. Des demandes claires : Foulques Chombart de Lauwe et son mouvement Infiniment Nantes apportent leur soutien aux habitants mobilisés et exigent de la Ville et de Nantes Métropole une transparence totale sur ce projet à fort impact local, et la suspension immédiate des travaux tant qu’une réelle concertation avec les habitants n’aura pas eu lieu. De nouveau, les Nantais sont menacés par l’incapacité de la Mairie de Nantes à porter des projets structurants. Nous avons été en Mairie aujourd’hui et sommes totalement mobilisés face à la suffisance et l’absence de prise de responsabilités. Johanna Rolland et ses adjoints devront assumer les conséquences de leurs errances..»
Une opposition organisée
Un collectif d’une vingtaine de personnes, appuyé par une association locale, s’est formé pour s’opposer au projet. Les habitants ont écrit à Johanna Rolland, maire de Nantes, et annoncé une manifestation le 11 août sur le site concerné.
Le communiqué diffusé par Infiniment Nantes exige la suspension immédiate des travaux et la transparence totale sur le projet, estimant que la Ville est une nouvelle fois incapable de « porter des projets structurants » et laissant les Nantais « subir les conséquences de ses errances ».
De son côté, la municipalité assume le projet, inscrit dans sa « stratégie de résorption des bidonvilles » par des dispositifs d’habitat adaptés, temporaires ou pérennes. Pour le bidonville voué à l’expulsion, situé chemin du Moulin-des-Marais, la Ville assure rechercher « des solutions pérennes pour l’ensemble des ménages » et promet un échange avec les riverains avant l’installation.
Elle affirme vouloir « proposer de meilleures conditions de vie pour les habitants du bidonville, maintenir la scolarisation des enfants et tenir compte des contraintes urbaines ».
Entre habitants qui dénoncent un projet imposé, et autorités qui se retranchent derrière une stratégie globale, le dossier du Vieux-Doulon illustre les tensions récurrentes autour des terrains d’accueil pour populations roms.
Pour l’heure, la mobilisation des riverains a déjà permis de suspendre temporairement le chantier. Mais le bras de fer avec la mairie est loin d’être terminé.
Crédit photo : DR (photo d’illustration)
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