La domination du dollar n’est plus ce qu’elle était. Longtemps pilier de la finance internationale — étalon des échanges, gage de stabilité et outil de puissance géopolitique — la monnaie américaine recule désormais dans les coffres des banques centrales. Les dernières données publiées par le Fonds monétaire international (FMI) indiquent qu’à la mi-2025, le billet vert ne représente plus que 56,3 % des réserves de change allouées à travers le monde. Un niveau plancher inédit depuis plus de trente ans, loin des sommets dépassant 70 % au début des années 2000.
Derrière ce mouvement discret en apparence, c’est une recomposition lente mais profonde du système monétaire international qui se joue. Depuis plusieurs années, les banques centrales diversifient leurs avoirs, réduisant volontairement leur exposition au dollar au profit de l’euro, de devises dites « secondaires », mais aussi — et c’est nouveau — de l’or, redevenu un actif stratégique dans un contexte de tensions géopolitiques persistantes.
Une érosion continue depuis deux décennies
Les chiffres du FMI confirment une tendance enclenchée bien avant 2025. Après l’euphorie de la fin du XXe siècle, le niveau de réserves en dollars a déjà connu plusieurs chutes brutales :
– 2008, lors de la crise financière mondiale et de la faillite de Lehman Brothers ;
– 2012, dans la foulée de la crise des dettes européennes ;
– 2019-2020, au moment de la pandémie de Covid-19 ;
– 2022, surtout, après l’invasion russe de l’Ukraine, lorsque la vague de sanctions occidentales a montré la pleine capacité des États-Unis à « armer » le dollar. À elle seule, cette phase a entraîné un recul de près de 10 % des réserves en dollars.
Cette dernière séquence a servi d’électrochoc : plusieurs États, notamment en Asie et au Moyen-Orient, ont accéléré leur stratégie de diversification afin d’échapper à une dépendance jugée dangereuse.
Diversification mondiale : l’euro et les devises secondaires progressent
À l’inverse du dollar, l’euro regagne légèrement du terrain, atteignant plus de 21 % des réserves mondiales au deuxième trimestre 2025. De leur côté, les « autres devises » — canadien, australien, won coréen, dollar de Singapour ou yuan chinois — représentent désormais plus de 22 % du total, soit la part la plus élevée jamais enregistrée.
Le yuan, malgré son aura médiatique, reste minoritaire : environ 2 % des réserves mondiales. Les contrôles de capitaux imposés par Pékin et l’opacité du système financier chinois limitent encore son potentiel comme monnaie de réserve globale.
Signe qui ne trompe pas : les banques centrales des pays émergents, telles que la Chine, l’Inde ou la Russie, multiplient leurs achats d’or. Un choix stratégique visant à réduire la dépendance aux actifs libellés en dollars.
Un dollar encore puissant, mais contesté comme jamais
Sur le papier, le dollar reste la pierre angulaire du système financier mondial :
– première monnaie de facturation du commerce international ;
– première monnaie de règlement bancaire ;
– première monnaie de réserve… malgré son recul.
Mais sa trajectoire laisse penser qu’un monde multipolaire, également monétaire, est en train de se dessiner. La montée des tensions sino-américaines, la volatilité des taux obligataires américains et l’incertitude croissante des orientations politiques de Washington incitent les gestionnaires de réserves à la prudence.
Selon un sondage de l’Official Monetary and Financial Institutions Forum (OMFIF), seuls 18 % des gestionnaires de réserves prévoient d’augmenter leur part de dollar dans les années à venir. Du jamais-vu depuis plusieurs décennies.
Un basculement discret, mais lourd de conséquences
En valeur absolue, les réserves en dollars restent considérables : plus de 6 700 milliards de dollars à la fin juin 2025. Mais leur poids relatif s’érode inexorablement. En un quart de siècle, la monnaie américaine a perdu près de 15 points de part de marché dans les réserves mondiales.
Face à elle, un bloc composite — euro, devises secondaires et or — capte progressivement la confiance des banques centrales.
Cette recomposition du système monétaire mondial ne signifie pas la fin immédiate de l’hégémonie du dollar. Mais elle annonce une ère où plus aucun pays ne souhaite dépendre d’un seul instrument financier, encore moins lorsque cet instrument peut être utilisé comme arme diplomatique.
Loin des discours triomphalistes sur la « toute-puissance américaine », la tendance est claire : le monde diversifie, lentement mais sûrement. Et si la prochaine décennie suit la même trajectoire, le dollar pourrait bientôt n’être plus qu’un acteur parmi d’autres dans un système multipolaire encore en gestation
Illustration : DR
[cc] Article relu et corrigé (orthographe, syntaxe) par ChatGPT.
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