Saint-Nazaire : David Samzun (PS) décide d’armer la police municipale

Une question agite beaucoup les conseils municipaux en ce moment : l’armement des policiers municipaux. Doivent-ils être équipés d’armes létales – c’est-à-dire « qui provoquent la mort » ? En général, les communes de droite y sont favorables, tandis que celles de gauche s’y opposent. Pourtant, de plus en plus de cités de gauche arment leurs policiers municipaux. C’est le cas de municipalités socialistes : Marseille, Montpellier, Nancy, Dijon, Villeurbanne, Bourges, mais aussi des municipalités écologistes : Bordeaux, Lyon, Strasbourg, Tours (Le Point, 5 décembre 2024). Au fond, tout dépend des missions que le maire attribue à ses policiers municipaux. S’il limite leur action aux « incivilités » et au stationnement, nul  besoin de les équiper d’armes létales. Au contraire, si les policiers municipaux sont amenés à se frotter, dans les quartiers « populaires », aux narcotrafiquants, les armes létales deviennent nécessaires puisque leur vie se trouve en danger. En Bretagne, les policiers municipaux de Nantes et de Rennes n’en sont pas dotés. A Brest, le problème est simple puisqu’il n’y a pas de police municipale – François Cuillandre (PS) n’en veut pas.

A Rennes, Nathalie Appéré (PS) explique ainsi sa position : « Sur le plan municipal, nous comptons désormais 115 policiers sur le terrain. L’effectif a donc doublé depuis que je suis maire. Le policier municipal est un maillon de la lutte contre le trafic, dans le lien qu’il crée avec les habitants. Il ne peut cependant pas interpeller le dealer, il n’en a pas la prérogative. Et à Rennes, il n’est pas autorisé à porter d’armement létal car nous avons toujours dit  que l’équipement de la police municipale était fonction de ses missions. Or ils ne sont pas en première ligne dans la lutte contre les narcotrafiquants, c’est le rôle de la Police nationale. Nos policiers municipaux sont équipés de pistolets à impulsion électrique, en lien avec leurs missions sur le terrain » (Ouest-France, Rennes, 7-8 septembre 2024). L’argument demeure bon jusqu’au jour où un policier municipal sera blessé par le tir d’un narcotrafiquant… ça peut arriver demain à Villejean, à Maurepas ou au Blosne, des quartiers où les fusillades arrivent fréquemment.

Mais voilà qu’à Saint-Nazaire, le maire David Samzun (PS) vient de changer de religion ; il décide d’équiper sa police municipale  d’armes létales. Actuellement, les vingt-trois policiers municipaux – l’effectif a plus que doublé depuis 2020 – bénéficient de caméras piétonnes et d’un pistolet  à impulsion électrique. « En décembre, les policiers municipaux m’ont sollicité par écrit pour me réclamer l’armement létal. Ils m’ont présenté leurs arguments. Ils disent : un, nous sommes souvent primo-intervenants sur des faits. Deux, nous faisons beaucoup de contrôles routiers sans savoir sur qui nous tombons », raconte David Samzun (Ouest-France, Saint-Nazaire, vendredi 4 avril 2025). « En fait que fait-on ? Nous recréons la police de proximité supprimée par Nicolas Sarkozy, sous la forme de la police municipale avec des financements communaux. J’aimerais aussi davantage de policiers nationaux à  Saint-Nazaire, et surtout plus d’enquêteurs », poursuit-il (Ouest-France, Saint-Nazaire, vendredi 4 avril 2025). David Samzun fait remarquer que 80 % des policiers municipaux de Saint-Nazaire ont déjà porté l’arme létale dans des métiers précédents (gendarmerie, police, armée).

 Bien entendu, cette décision de David Samzun crée des vagues à gauche : Les Ecologistes, le Nouveau Front populaire, la Ligue des droits de l’homme, la CGT, FSU, Solidaires… tout le monde s’y met ! Pour le NFP, cette décision « revient à acter le recul de l’Etat et la transformation de la police municipale en supplétif de la police nationale au lieu de cultiver la spécificité de ce service public municipal de tranquillité publique et de prévention. » (Presse Océan, jeudi 10 avril 2025). La section de la LDH voit aussi un danger car « multiplier la présence d’armes sur l’espace public, fussent-ils portés par des agents municipaux assermentés, constitue une escalade inquiétante. Elle illustre une forme de renoncement à l’aspiration à la paix civile… Elle fait, en outre, peser une responsabilité écrasante sur les épaules des agents publics concernés. » (Ouest-France, Saint-Nazaire,  jeudi 10 avril 2025). On remarquera que les organisations de gauche ne font jamais allusion au trafic de drogue sous toutes ses formes ; assurer la sécurité des policiers municipaux, souvent confrontés aux narcotrafiquants, n’a pas l’air de les intéresser. Quant à la situation dans les « quartiers », ils ne sont pas au courant…

Samzun envoie son opposition se faire f…

La nouvelle a laissé pantois le groupe d’opposition (Ensemble, Solidaires, Ecologistes) du conseil municipal, qui s’étonne de cette nouvelle, alors que « notre groupe a réclamé et obtenu une mission d’information et d’évaluation dont le sujet est la tranquillité publique ». L’opposition de gauche considère que cette annonce du maire « perturbe le débat ». Mais toutes ces critiques n’impressionnent pas le maire qui répond sèchement : « Il y a un maire et une majorité, et il y a un groupe d’opposition, et je n’ai pas du tout la volonté de faire de la cogestion. Vous m’avez demandé une évaluation sur ce que nous mettons en place sur la tranquillité publique. Vous l’avez… Mais je ne vais pas vous attendre pour savoir ce que j’ai à faire. Désolé, je ne viendrai pas vous demander votre point de vue sur l’armement de la police municipale. » (Ouest-France, Saint-Nazaire, lundi 7 avril 2025). Les choses sont claires : pour les élections municipales de mars 2026, on comprend que David Samzun aura face à lui une liste écolo-insoumise… Si cette dernière gagnait ces élections reviendrait-elle sur la décision de Samzun de doter la police municipale d’armes létales ?

Bernard Morvan

Crédit photo : Chabe 01/Wikimedia (cc)
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