Par un matin chaud d’Albanie, le Giro a pris son envol comme un oiseau migrateur qui aurait décidé, pour une fois, de ne pas attendre l’Italie. Et dans les rues de Tirana, c’est un Danois au sourire de Viking qui a raflé la première moisson : Mads Pedersen, bras levés, cœur battant, maillot rose sur les épaules.
L’étape 1 : Un Danois en rose et un Basque au tapis
La première étape de ce 108e Giro d’Italia fut un prélude parfait à une odyssée de trois semaines : offensive dès le départ, contrôle des prétendants, montée fatale pour les sprinteurs, et une descente aux enfers, littéralement, pour Mikel Landa.
Sur les 160 kilomètres entre Durrës et Tirana, cinq échappés ont joué aux illusionnistes avant de céder sous l’impulsion de Lidl-Trek, locomotive implacable lancée à l’assaut du Surrel, ce double talus qui fit tomber les illusions de Kooij, Bennett, Groves et consorts. Dans ce chaos savamment organisé, Pedersen, l’ancien maillot arc-en-ciel, surgit comme un éclat d’acier scandinave. Il sprinte, Wout Van Aert le chasse, mais le Belge reste à quelques centimètres du triomphe et termine deuxième « comme d’habitude ».
Derrière eux, le drame : Mikel Landa chute, se tord, abandonne. Le Giro perd un prétendant au podium avant même d’avoir quitté la capitale albanaise.
L’étape du jour : contre-la-montre à Tirana, les coureurs face à eux-mêmes
Place maintenant au deuxième acte : un contre-la-montre urbain de 13,7 kilomètres dans les artères de Tirana, aussi rectilignes que trompeuses, où le vent viendra jouer les arbitres invisibles. Un faux plat montant au milieu (la montée de Sauk, 1,4 km à 5,1 %, avec quelques passages frondeurs flirtant avec les 9 %), une descente fluide, des lignes droites à perte de vue, et un dernier virage connu de tous, puisque la ligne d’arrivée reprend celle d’hier.
L’effort solitaire, cette vérité sans fard, fera émerger une première hiérarchie. Pas encore décisive, mais suffisamment suggestive pour déceler qui a les jambes légères ou le cœur lourd.
Les favoris : Tarling, Ayuso et Van Aert en lice pour le trône rose
La logique voudrait que Joshua Tarling (Ineos Grenadiers), machine à watts de 21 ans, explose les compteurs sur ce terrain taillé pour sa puissance brute. Mais le jeune Gallois devra surveiller Juan Ayuso (UAE), le matador espagnol qui excelle sur ce type de profil court avec bosse intégrée, et qui sait se sublimer lorsque l’enjeu se niche dans les interstices du général.
Primož Roglič (Red Bull–Bora) observe, en vieux briscard. Il ne jouera peut-être pas la gagne, mais ce chrono pourrait dessiner le canevas de sa montée en puissance. Tout comme Mathias Vacek (Lidl-Trek), surmotivé par son état de forme affiché sur la montée de Surrel.
Mais l’intrigue la plus savoureuse reste celle du duel Pedersen – Van Aert. Le Danois veut sauver son maillot rose avec panache, mais les 13,7 kilomètres risquent d’être un peu longs pour ses qualités de puncheur-sprinteur. Van Aert, battu d’un souffle hier, retrouve ici son terrain de jeu. Si les dieux de l’asphalte l’autorisent à réécrire le destin, il pourrait enfiler le rose au terme de cette journée.
Notre prono :
- ⭐⭐⭐ Mathias Vacek
- ⭐⭐ Juan Ayuso – Joshua Tarling
- ⭐ Primož Roglič – Wout Van Aert – Mads Pedersen
L’Albanie offre encore ses décors contrastés, entre boulevards rectilignes et montagnes en sentinelle. Et ce Giro, déjà, dessine ses héros, ses blessures, ses ambitions. Tirana, ce samedi, sera le théâtre d’une épreuve contre soi-même. Et la route, toujours, aura le dernier mot.
À demain, pour un nouveau chapitre.
YV
Crédit photo : DR (photo d’illustration)
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