Scientifique autodidacte, héros de guerre, pionnier de l’aviation et visionnaire des médecines naturelles, René Quinton est une figure oubliée du génie français. Son “plasma marin”, toujours vendu en pharmacie, reste aujourd’hui au cœur de nombreuses pratiques de santé alternatives. Retour sur le parcours hors normes d’un homme pour qui l’eau de mer était source de vie.
Né en 1866 à Chaumes-en-Brie, René Quinton n’a jamais terminé d’études médicales, mais cela ne l’empêchera pas de marquer son époque par son audace scientifique. Influencé par les grands naturalistes de son temps, il développe une théorie selon laquelle les cellules vivantes conservent une mémoire de leurs origines marines. Il en déduit une “loi de constance originelle” : les cellules, pour fonctionner de manière optimale, doivent baigner dans un milieu aussi proche que possible de l’eau de mer originelle.
Cette conviction le pousse à créer un “plasma marin”, de l’eau de mer prélevée dans des zones riches en plancton, stérilisée à froid et utilisée en injection sous-cutanée ou par voie orale. Dès 1905, il en expose les vertus devant l’Académie de médecine, citant des cas de tuberculose et de rachitisme infantile traités avec succès.
Malgré le scepticisme académique, Quinton ouvre à ses frais un premier “dispensaire marin” à Paris, où il soigne gratuitement des enfants mourants. Le succès est immédiat : on comptera jusqu’à 300 injections par jour. Le biologiste devient une célébrité. La presse le célèbre, les malades affluent, les résultats semblent spectaculaires.
Mais Quinton n’était pas qu’un savant. En 1908, il fonde la Ligue nationale aérienne, première école de pilotage au monde, pour laquelle il rallie industriels et politiques au rêve du vol motorisé. Durant la Grande Guerre, il sert avec bravoure comme officier d’artillerie, décoré à plusieurs reprises et salué par le maréchal Foch lui-même pour son courage exceptionnel.
Malgré son aura, René Quinton meurt prématurément en 1925 d’une crise cardiaque. Son œuvre, elle, tombera peu à peu dans l’oubli, rejetée par une médecine officielle devenue plus technocratique que naturaliste. Pourtant, son plasma marin, commercialisé en version isotonique (diluée) ou hypertonique (concentrée), est encore utilisé, notamment dans les médecines naturelles ou fonctionnelles.
Certains y voient un fortifiant général, un remède naturel contre la fatigue, les carences en minéraux, les affections ORL ou les troubles digestifs. Les sportifs y recourent pour la récupération, les patients atteints d’eczéma ou d’acné pour apaiser leur peau. D’autres se montrent plus critiques, rappelant que scientifiquement, ses effets ne dépasseraient pas ceux d’un simple sérum physiologique.
Le plasma de Quinton : entre science oubliée et médecine naturelle
Connu de certains initiés, ignoré de la plupart, le plasma de Quinton continue d’intriguer un siècle après sa découverte. Ce sérum d’eau de mer filtrée fut au début du XXe siècle à l’origine d’un véritable engouement médical, avant de tomber dans l’oubli. Il revient aujourd’hui dans le champ des médecines dites naturelles ou non conventionnelles. Que faut-il en penser ?
René Quinton, passionné de biologie et de paléontologie, élabore dès 1895 une idée audacieuse : les cellules animales conservent les caractéristiques du milieu marin originel dans lequel la vie est apparue. Pour lui, maintenir ce « milieu vital » autour des cellules humaines permettrait de soutenir leur fonctionnement optimal.
Partant de cette hypothèse, il démontre que la composition minérale du plasma sanguin humain est étonnamment proche de celle de l’eau de mer diluée. Il met alors au point une solution appelée « plasma de Quinton », obtenue par filtration à froid d’eau marine prélevée en pleine mer, dans des zones riches en phytoplancton, et diluée pour atteindre une concentration isotonique, similaire à celle du sang.
Quinton publie ses travaux dans L’Eau de mer, milieu organique en 1905, ouvrage dans lequel il détaille sa théorie et les résultats de ses premières expérimentations. Il présente aussi devant l’Académie de médecine les cas de patients traités avec cette solution : des enfants atteints de choléra, de dénutrition sévère ou de rachitisme. Il ouvre la même année, à ses frais, un premier « dispensaire marin » à Paris, où il administre son plasma par voie injectable sous-cutanée. Le succès est immédiat : jusqu’à 300 patients y sont soignés chaque jour.
D’autres dispensaires voient le jour à Paris et en province. Quinton acquiert une célébrité internationale. Certains médecins intègrent même sa méthode dans la lutte contre les grandes épidémies de l’époque.
Malgré les succès apparents, le plasma de Quinton suscite rapidement la méfiance d’une partie du corps médical. À l’heure où la médecine scientifique se structure autour des vaccins, des antibiotiques et de la microbiologie pasteurienne, la méthode de Quinton – fondée sur un principe d’homéostasie et non sur une action ciblée contre les microbes – semble en décalage avec les courants dominants.
Après la mort de René Quinton en 1925, l’élan se perd peu à peu. Sa méthode ne disparaît pas totalement : elle reste pratiquée marginalement, notamment en pédiatrie, jusqu’au milieu du XXe siècle, puis connaît un regain d’intérêt dans les années 2000 avec le retour en force des médecines naturelles.
Aujourd’hui, le plasma de Quinton est vendu en pharmacie sous forme buvable (ampoules) ou en spray nasal. Il se décline en deux variantes :
- Isotonique : eau de mer diluée à 9 grammes de sels par litre, comme le plasma sanguin. Préconisée pour les cures de fond, l’hydratation cellulaire, les carences minérales ou les troubles digestifs.
- Hypertonique : eau de mer concentrée (33 g/L), réservée à des usages ponctuels (coup de fatigue, effort intense, récupération).
Le plasma est riche en oligo-éléments naturels : magnésium, potassium, calcium, iode, zinc, cuivre, etc. Ses promoteurs avancent de nombreuses indications : renforcement immunitaire, équilibre acido-basique, soutien en cas de stress, amélioration des performances sportives, troubles ORL ou articulaires. Mais ces bienfaits supposés ne font pas l’objet d’un consensus scientifique.
Jusqu’à aujourd’hui, aucune étude clinique rigoureuse n’a démontré l’efficacité thérapeutique spécifique du plasma de Quinton au-delà de celle d’une solution saline classique. Son effet principal serait celui d’un hydratant et reminéralisant naturel. Certaines études récentes menées en Espagne, en Irlande ou à Taïwan explorent néanmoins des pistes intéressantes dans le traitement de pathologies inflammatoires ou auto-immunes, sans qu’elles aient encore été validées par la communauté médicale internationale.
Les autorités sanitaires françaises ne reconnaissent pas le plasma comme médicament. Il est classé parmi les compléments alimentaires ou dispositifs d’hygiène. Les contre-indications existent (hypertension, insuffisance rénale, régime sans sel, grossesse), ce qui impose de consulter un professionnel de santé avant toute cure.
René Quinton fut, en son temps, une figure intellectuelle hors norme, à la fois biologiste, aviateur pionnier, militaire décoré et conférencier international. Son intuition – la proximité biochimique entre l’eau de mer et le plasma humain – a traversé les décennies. Si la science contemporaine ne valide pas encore l’ensemble de ses théories, son œuvre continue de susciter des recherches et des débats.
Symbole d’un temps où médecine et vision du monde étaient encore intimement liées, le plasma de Quinton reste pour certains une voie naturelle de santé, pour d’autres un vestige d’une médecine empirique. Il n’en demeure pas moins un fascinant chapitre de l’histoire des sciences et de la pensée biologique française.
Crédit photo : DR (photo d’illustration)
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2 réponses à “René Quinton, l’homme qui voulait soigner le monde avec la mer”
En Janvier 2025 j’ai eu un tassement de vertèbres lombaires avec arthroses très douloureuses. Impossible de me tourner dans le lit.
Après plusieurs séances d’injection sous cutanées je n’ai plus aucune douleur et j’ai rencontré plusieurs personnes qui l’ont utilisé pour arthrose du genou.
Je le trouve en magasin bio ou internet et j’en boit régulièrement aussi à 85 ans. Mais comme ce n’est pas brevetable qui va financer des études sur ses bienfaits le sujet.
La médecine d’aujourd’hui usurpe son nom: elle est devenue depuis Carnegie et Rockefeller le vendeur de l’industrie pétrochimique.
Mais il fut un temps où soigner signifiait quelque chose de vrai, de grand , de beau, de bon.
Cet homme en témoigne.