Une urgence mobilise actuellement les autorités sanitaires françaises : celle des réserves de sang. Comme chaque année à cette période, l’Établissement français du sang (EFS) tire la sonnette d’alarme. Avec 15 000 poches manquantes pour atteindre un seuil de sécurité, l’EFS appelle à une mobilisation citoyenne, notamment chez les jeunes.
Dans un entretien exclusif accordé à Breizh-info.com, l’établissement revient sur les causes structurelles de cette baisse saisonnière, les leviers activés pour y remédier, et les défis à venir en matière de don du sang dans une société où l’engagement civique semble s’éroder.
Breizh-info.com : pouvez vous vous présenter à nos lecteurs ?
EFS : L’Établissement français du sang (EFS) est le service public du sang en France. Notre mission principale est d’organiser la collecte de produits sanguins et d’en garantir les réserves nationales pour que chaque patient en attente de produits sanguins puisse être soigné. Pour cela, nous agissons au plus près des donneurs à travers ses 104 maisons du don et l’organisation de plus de 30 000 collectes mobiles chaque année partout sur le territoire (France hexagonale et DROM). Pour soigner les patients, nous fournissons à plus de 1 500 établissements de santé les produits sanguins, cellules et tissus dont ils ont besoin.
Nous assurons également l’approvisionnement en plasma du Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies (LFB), pour permettre la fabrication de médicaments dérivés du plasma. Enfin, nous capitalisons sur notre expertise du sang pour innover et développer des procédés et traitements médicaux qui bénéficieront au plus vite aux patients. Nous participons également à former des professionnels de santé en France et dans le monde, en leur transmettant notre connaissance aiguisée du sang.
Breizh-info.com : Vous tirez une nouvelle fois la sonnette d’alarme. On manque de près de 15 000 poches de sang à l’approche de l’été. Cette crise de mobilisation estivale est-elle devenue structurelle en France ?
EFS : L’appel à la mobilisation lancé ce mardi 8 juillet a pour objectif d’appeler celles et ceux qui peuvent donner à prendre rendez-vous pour un don avant ou pendant leurs vacances. Il manque actuellement 15 000 poches de sang pour atteindre un niveau de réserve qui nous permettrait d’envisager l’été sereinement, qui se situe autour de 100 000 poches.
Chaque été, la fréquentation des lieux de collectes diminue pour plusieurs raisons comme les départs en vacances, qui font que les donneurs réguliers ne sont pas disponibles, ou encore la fermeture des établissements scolaires ou de certaines entreprises dans lesquels l’EFS organise de nombreuses collectes. C’est un phénomène prévisible et cyclique que l’EFS s’attache à anticiper au mieux en augmentant ses réserves en produits sanguin dès le mois de juin, notamment à l’occasion de la Journée Mondiale des Donneurs de Sang qui a lieu le 14 juin.
Breizh-info.com : Est-ce qu’on peut parler aujourd’hui d’une crise de la générosité ? Ou d’une société qui se détourne progressivement de l’engagement civique, y compris lorsqu’il s’agit de sauver des vies ?
EFS : En 2024, l’EFS a accueilli 1 506 534 donneurs dans ses lieux de collectes dont 17% de nouveaux donneurs. Les citoyens font preuve de générosité et répondent toujours présents lorsque l’EFS lance un appel à la mobilisation.
Breizh-info.com : L’EFS a-t-il envisagé de nouvelles stratégies pour anticiper ces baisses saisonnières plutôt que de toujours réagir dans l’urgence ?
EFS : L’EFS ne réagit jamais dans l’urgence et anticipe toujours les périodes où la fréquentation de nos collectes est moins importante, comme lors des ponts du mois de mai ou la période estivale.
Dès le mois de juin, nous déployons une campagne de communication nationale autour de la Journée Mondiale des Donneurs de Sang, pour rappeler l’importance de ce geste essentiel et permettre d’atteindre un niveau de réserves en produits sanguins suffisant. Sur l’ensemble du territoire, de nombreuses collectes évènementielles permettent d’accueillir et de remercier les donneurs fidèles, mais aussi de nouveaux donneurs grâce à ce temps fort de mobilisation et communication pour l’établissement.
Mais ces dernières semaines, particulièrement marquées par des températures extrêmes, les dons de sang ont été trop peu nombreux. C’est la raison pour laquelle nous n’avons pas pu atteindre un niveau de réserve suffisant pour aborder l’été sereinement.
Breizh-info.com : Les jeunes générations semblent plus éloignées de ces démarches de don. Avez-vous des chiffres récents sur la mobilisation des 18-30 ans ? Comment comptez-vous les sensibiliser, au-delà des campagnes classiques ?
EFS : Nous ne croyons pas au discours de certains qui dirait que les nouvelles générations « s’engagent moins » que leurs ainés. Les chiffres sont là : beaucoup de jeunes adultes viennent donner leur sang, en 2024, 29 % des donneurs ont moins de 30 ans. Et nous les remercions au nom de tous les patients qui bénéficient de ces dons !
Chaque année, certains de nos donneurs réguliers atteignent la limite d’âge. Il faut donc continuellement renouveler notre panel de donneurs, et la clé : c’est le jeune public !
Les jeunes sont plus nombreux à donner, mais ils donnent moins régulièrement que leurs ainés (1,47 dons par an en moyenne pour les donneurs de 20-24 ans, contre 2,15 pour les 60-64 ans). Notre défi est donc double : il faut sensibiliser les jeunes pour qu’ils viennent donner et les convaincre de revenir !
Les campagnes de sensibilisation des jeunes sont un axe stratégique pour assurer le renouvellement du vivier de donneurs. Fidéliser un jeune donneur permet de capitaliser potentiellement sur des décennies de don. Pour cela, l’EFS investit dans la communication auprès des établissements scolaires et déconstruit régulièrement les idées reçues puisqu’encore beaucoup de jeunes pensent ne pas pouvoir donner en raison de leur poids, de leur tatouage, ou des questions de santé…
Nous cultivons également la solidarité du don en inculquant dès le plus jeune âge la conscience citoyenne d’un geste qui soigne et/ou sauve chaque année de nombreuses vies à travers des interventions dans les écoles, les collèges, les lycées et à l’Université.
Enfin, l’EFS investit également les réseaux sociaux, puisque c’est le nerf de la guerre aujourd’hui pour s’adresser directement aux jeunes, en dehors des actions dans le cadre scolaire et universitaire. Nous démarchons aussi des influenceurs afin qu’ils puissent porter la parole de l’EFS et mobiliser leur audience au don de sang. Plusieurs influenceurs sont venus donner leur sang et en ont fait des vidéos, comme Léna Situations, Bichard ou encore Arkunir.
Breizh-info.com : Y a-t-il des régions, des territoires, où la mobilisation est meilleure qu’ailleurs ? Et à l’inverse, certains départements où le don du sang est en chute libre ?
EFS : Il existe quelques petites disparités en fonction des régions. Mais pour garantir une égalité d’accès au soin sur l’ensemble du territoire national, l’Établissement français du sang est présent dans l’Hexagone et dans les Outre-Mer, avec 13 établissements régionaux (dont 3 dans les Outre-mer : La Réunion-Océan Indien, Guadeloupe-Guyane et Martinique). Ce maillage territorial est notre force : il rend possible la mise en place d’une véritable solidarité entre les régions afin de garantir à chaque patient ayant besoin d’une transfusion d’être soigné. Très concrètement, un mécanisme d’entraide nationale est mis en place pour répondre aux besoins transfusionnels : dans certaines situations, des produits sanguins peuvent également être acheminés d’une région vers une autre ou de l’Hexagone vers les territoires d’Outre-mer.
Breizh-info.com : On parle souvent de la difficulté à trouver une collecte proche de chez soi. Pourtant, des maisons du don existent. Faut-il améliorer la cartographie et la logistique des collectes, notamment en zone rurale ?
EFS : L’EFS dispose de 104 Maisons du don réparties sur l’ensemble du territoire et organise chaque année plus de 30 000 collectes mobiles dans des lieux publics, des entreprises, des universités, des lycées…
Sur notre site internet www.dondesang.efs.sante.fr de se géolocaliser et de trouver la collecte ou la Maison du don la plus proche de chez soi.
Breizh-info.com : Peut-on imaginer à l’avenir des campagnes de don du sang organisées en parallèle d’événements populaires – festivals, matches, grands rassemblements – pour toucher un autre public ?
EFS : Grâce à nos nombreux partenariats, l’EFS parvient à organiser des collectes de sang dans des lieux culturels ou événementiels emblématiques. Parmi eux : l’Opéra de Paris, le Château de Versailles, le circuit des 24h du Mans, etc. Nous nous sommes également associés l’année passée aux Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris en créant des collectes « Marathon du Don », partout en France, en partenariat avec des clubs mythiques ou des associations sportives pour mobiliser et sensibiliser de nouveaux donneurs.
Breizh-info.com : Quels sont aujourd’hui les principaux freins psychologiques ou sociaux au don du sang que vous constatez sur le terrain ? Y a-t-il encore des idées fausses tenaces ?
EFS : Il existe en effet des freins au don de sang lié à la peur de la douleur, la peur de l’aiguille, l’anxiété face à l’inconnu ou encore plus simplement, le manque de temps.
Ces freins sont facilement levés lorsqu’un non-donneur est entouré de différentes générations de donneurs qui donnent régulièrement, lorsque le don est recommandé par une personne de l’entourage ou bien lorsqu’un non-donneur est sensibilisé à l’importance du don dans le traitement d’un patient proche.
Par ailleurs, lors des premiers dons, nos personnels de collecte sont particulièrement attentifs pour prendre soin des nouveaux donneurs et les accompagner tout au long du don pour les rassurer.
Breizh-info.com : Le lien entre don du sang et vaccination, ou d’autres actes médicaux, suscite parfois des craintes. Pouvez-vous rappeler les conditions médicales strictes pour donner son sang en toute sécurité ?
EFS : Pour donner son sang, il faut être âgé de 18 à 70 ans, peser au moins 50kg, être en bonne santé et pouvoir présenter une carte d’identité. Il existe des contre-indications au don mais 80 % des contre-indications sont temporaires. Le plus simple avant de donner et de tester son éligibilité au don grâce à un rapide quiz en ligne, disponible sur notre site internet : https://dondesang.efs.sante.fr/quiz
Breizh-info.com : Avez-vous une inquiétude particulière pour les semaines à venir ? Peut-on parler d’un seuil critique au-delà duquel les hôpitaux devront déprogrammer certaines opérations ?
EFS : La réponse à la demande des établissements de santé n’est pas remise en cause. Néanmoins, l’EFS reste vigilant à l’approche des deux jours fériés de l’été : le 14 juillet et le 15 août et appelle dès maintenant, ceux qui le peuvent, à prendre rendez-vous pour faire un don dans l’un des lieux de collecte.
Propos recueillis par YV
2 réponses à “Etablissement français du sang (EFS) : « Il manque actuellement 15 000 poches de sang pour atteindre un niveau de réserve qui nous permettrait d’envisager l’été sereinement » [Interview]”
Demat désolé mais je suis refusé ayant eu une « mauvaise maladie »mais merci d’appeler au don du sang car j’en ai beaucoup donné étant jeune mais refus vers 40 and ayant été à Guernesey du temps de la vache Folle alors que je n’avais mangé là bas que du fish and Ship… Kenavo an holl
Plus de don de sang, plus donneuse d’organes depuis le Covid.
Depuis que les non-vax interdits d’hôpital étaient sollicités pour donner leur sang !
Qu’ils aillent se faire voir.
Hors de question de subir une transfusion de sang contaminé par Pfizer ou Moderna.
Il faut autoriser le don de sang par donneur identifié, membre de la famille compatible cela résoudrait déjà quelques problèmes.
Et l’eau de Quinton dont on a parlé ici il y a peu est aussi une solution possible.