Dans le paysage sportif français, dominé par le football, le rugby ou le cyclisme, il existe une pépite trop méconnue : Nordic Magazine – et son petit frère Biathlon Magazine (ainsi que la déclinaison web, Nordic Mag). Ces deux revues, portées par une équipe passionnée, incarnent ce que le journalisme sportif a de plus noble : la rigueur, la curiosité, la beauté du détail et surtout, l’amour du sport vrai. À une époque où la performance instantanée écrase souvent la profondeur, ces magazines rappellent que le sport nordique est avant tout une aventure humaine, exigeante et poétique, où l’effort et la nature se rencontrent.
Leur travail, d’une qualité remarquable, mêle portraits sensibles, enquêtes fouillées et récits de terrain – de la Norvège à la Haute-Savoie, en passant par les grandes plaines enneigées de Suède. Accessible aux néophytes comme aux passionnés, Nordic Magazine et Biathlon Magazine sont aujourd’hui des références dans leur domaine, des revues qu’on feuillette autant pour s’instruire que pour s’évader. À Breizh-info.com, on estime qu’ils méritent une place bien plus grande dans le cœur du public français. On a donc interviewé Franck Lacroix, directeur de la rédaction et passionné, qui, loin des projecteurs, fait rayonner la flamme du biathlon, entre autres.
Breizh-info.com : Comment est né Nordic Magazine, puis Biathlon Magazine dans un univers sportif souvent dominé par le football ou le rugby ?
Franck Lacroix : En 2011, Nordic Magazine est né d’un constat : il n’existait pas en langue française de média dédié exclusivement aux disciplines nordiques : ski de fond, biathlon, saut spécial et combiné nordique. Or, les belles histoires ne manquaient pas. Biathlon Magazine a été créé en 2019 pour accompagner le développement de ce sport désormais accessible gratuitement sur une chaîne de la TNT.
Breizh-info.com : Vous publiez à la fois des portraits, des récits, des enquêtes et des dossiers techniques : à qui s’adresse votre magazine ? Aux passionnés, aux curieux, ou aux néophytes
Franck Lacroix : A tout le monde. Même si nos journalistes sont spécialisés, ils veillent à ce que leurs articles restent accessibles pour tous. C’est la raison pour laquelle notre ligne éditoriale a pour cœur les femmes et les hommes qui vont vivre le nordique.
Breizh-info.com : Pour un public breton peu familier du biathlon ou du ski nordique, faute de station de ski sur le Menez Hom, comment expliquer ce qui rend le biathlon si captivant ?
Franck Lacroix : C’est clairement le tir ! Par rapport à un sport comme le ski de fond, le biathlon combine la performance physique, le ski, et ce passage devant les cibles où tout peut se passer. Les rebondissements rendent forcément le biathlon captivant et participe à sa popularité.
Breizh-info.com : Le biathlon est un sport exigeant, à la fois physique et mental. Quels sont les fondamentaux à comprendre pour l’apprécier pleinement ?
Franck Lacroix : Il ne suffit pas d’être un skieur rapide pour performer en biathlon. Les exemples de fondeurs supersoniques n’ayant jamais réussi à percer au plus haut niveau international ne manquent pas. Inversement, bien tirer ne suffit pas puisque la performance physique, avec des courses allant de 7,5 à 20 km, a toute sa place. Bref, il faut avoir trouver l’équilibre entre les deux parties pour performer et devenir le meilleur du monde !
Breizh-info.com : On a parfois l’impression que ce sport résume à lui seul la tension du sport moderne : vitesse, précision, risque. Est-ce ce mélange qui séduit autant les téléspectateurs ?
Franck Lacroix : C’est clairement ça ! Le spectacle proposé sur les courses de biathlon en confrontation – soit les poursuites, relais et mass-start – est juste gigantesque ! C’est peut-être même le sport d’hiver idéal pour cela puisque les disciplines concurrentes ne proposent pas cela, ou très peu.
Breizh-info.com : Quels sont les athlètes ou les courses que vous conseilleriez à un Breton qui voudrait “tomber amoureux” du biathlon cet hiver ?
Franck Lacroix : La première qui nous vient, avec une pointe de chauvinisme, c’est la coupe du monde du Grand-Bornand ! L’ambiance y est exceptionnelle et le cadre, avec des courses disputées dans le village haut-savoyard, incroyable. Sinon, les étapes d’Oberhof, Ruhpolding, Oslo-Holmenkollen et Antholz sont des incontournables !
Breizh-info.com : Votre “Dico du biathlon” est une véritable encyclopédie. Comment l’avez-vous conçu ?
Franck Lacroix : Comme un dictionnaire amoureux ! Nous avons souhaité un ouvrage pratique qui réunissent les athlètes et entraîneurs d’hier et d’aujourd’hui, français comme étrangers, les stades emblématiques, les courses, les mots propres à la disciplibes…
Breizh-info.com : L’“Histoire du biathlon aux Jeux” retrace un siècle d’épopée olympique. Quels moments vous semblent les plus forts ou les plus méconnus ?
Franck Lacroix : C’est difficile à dire. Les premières années où le biathlon s’appelaient encore patrouille militaire sont méconnues. Pourtant, elles se confrontent à la grande histoire. Je pense à 1936 avec l’édition des Jeux à Garmisch-Partenkirchen orchestrée par le parti nazi. On parle aussi de l’URSS, des deux Allemagne… Plus globalement, ce livre nous permet de comprendre comment le biathlon est devenu le sport que l’on connaît aujourd’hui. Chaque étape est expliquée. Et puis il propose 300 photos dont beaucoup sont inédites. Elles proviennent notamment du Musée olympique, des archives du quotidien L’Equipe, de la Bibliothèque nationale de France ou des archives nationales polonaises. Les retrouver réunies dans un ouvrage constitue une prouesse et un trésor pour les fans de biathlon.
Breizh-info.com : Vos revues récentes évoquent la diversité des nations du biathlon, de la Norvège à la France. Qu’est-ce qui distingue aujourd’hui l’école française ?
Franck Lacroix : Ce serait peut-être la formation. En France, les biathlètes sont très bien cadrés de leurs débuts au collège (en général, ils commencent le biathlon à 50 mètres aux alentours de 13, 14 ans pour disputer le Challenge national U15) avec une montée en puissance : club, comité, groupe post-bac ou équipe de France). Cela permet de former de nombreux jeunes biathlètes, ce qui laisse un choix intéressant pour l’accès au très haut niveau. On voit en ce moment que cet ascenseur fonctionne à plein côté féminin !
Breizh-info.com : Comment préparez-vous vos grands dossiers ? Y a-t-il une part d’enquête, de terrain, ou de contact direct avec les athlètes ?
Franck Lacroix : Bien sûr. Quotidiennement nous nous entretenons avec des athlètes, des coachs, des responsables de ski-club, de comité régionaux… Nous multiplions les reportages dès que cela est nécessaire. Nous organisons des shootings, parfois à l’autre bout de la planète. Je me rappelle avoir recherché un photographe pour un reportage dans les montagnes de Nouvelle-Zélande. Nous sommes très exigeants sur la qualité de nos revues et ouvrages. La rédaction de Nordic Magazine et Biathlon Magazine est composée de journalistes professionnels.
Breizh-info.com : L’univers du biathlon est souvent très humain, presque familial. Est-ce cela qui explique la fidélité des lecteurs et spectateurs ?
Franck Lacroix : Oui. Au bord de la piste, vous applaudirez aux exploits des biathlètes à côté de leurs parents, sans même le savoir.
Breizh-info.com : Que faut-il attendre de la saison à venir, notamment sans les frères Boe côt » masculin ? Qui sont, selon vous, les favoris chez les hommes et les femmes ?
Franck Lacroix : C’est clairement un saut dans l’inconnu qui nous attend chez les garçons. Sans les frères Boe, mais surtout sans Johannes, il y a une place de leader à prendre et ils sont nombreux sur la ligne de départ pour devenir le roi du biathlon. Côté Français, Eric Perrot semble être sur les rangs, mais Quentin Fillon Maillet et Emilien Jacquelin seront bien entendu à surveiller. Chez les étrangers, les Norvégiens seront aussi de la partie avec Sturla Holm Lægreid, le tenant du titre, mais aussi Vetle Sjaastd Christiansen et Vebjoerrn Soerum ou encore les jeunes pousses Isak Frey ou Martin Uldal. Sinon, il y aura Tommaso Giacomel, Sebastian Samuelsson ou l’inusable Jakov Fak seront de la partie.
La saison féminine, elle, s’annonce pleine de questions ! Lisa Vittozzi, en forme sur les courses estivales après de longs mois d’absence, sera forcément à surveiller, tout comme Marketa Davidova. Sinon, les Françaises Julia Simon, Justine Braisaz-Bouchet et Lou Jeanmonnot vont tenter de gagner le Gros globe de cristal, tout comme Franziska Preuss, Hanna Oeberg, Ingrid Landmark Tandrevold, Suvi Minkkinen, Maren Kirkeeide, Dorothea Wierer ou Elvira Oeberg. Derrière, les talentueuses Jeanne Richard, Ella Halvarsson et Océane Michelon pourraient également se mêler à la lutte. Lutte qui sera très indécise !

Breizh-info.com : Les épreuves d’Östersund ouvriront la saison dans quelques semaines. Quelles sont les conditions les plus redoutées des biathlètes à cette époque de l’année ?
Franck Lacroix : En Suède, sur ce site très utilisé sur la coupe du monde, il y a souvent du vent ! C’est probablement cela qui sera le plus difficile à gérer pour les biathlètes, s’il est de la partie. Après la gestion des conditions sera également importante avec cette nuit très présente tout au long de la journée ainsi que les premières vagues de froid.
Breizh-info.com : Les JO de Milan-Cortina approchent : l’Italie va-t-elle redevenir une grande nation du biathlon ?
Franck Lacroix : Je dirais même devenir ! Il faut savoir, et c’est étonnant, que les Italiens n’ont jamais décroché le moindre titre olympique en biathlon. Cette saison, avec les Jeux à la maison, semble être idéale pour y remédier avec quatre cartouches principales : Lisa Vittozzi, Dorothea Wierer, Tommaso Giacomel ainsi que les relais (surtout le mixte et le féminin).
Breizh-info.com : Le biathlon est un sport de maîtrise intérieure. Comment les athlètes gèrent-ils la pression et la fatigue mentale ?
Franck Lacroix : C’est sûrement le plus grand défi de ce sport ! Une saison est très longue, la pression forte entre le public, les réseaux sociaux et les médias. Souvent, les athlètes parlent de fatigue mentale en fin de période et c’est là que le travail de fond effectué là-dessus avec un préparateur mental est important. La plupart des biathlètes sont suivis.
Breizh-info.com : Les médias généralistes s’y intéressent peu, malgré un public fidèle. Pensez-vous que le biathlon mérite plus de visibilité en France ?
Franck Lacroix : Vous verez, avec les Jeux olympiques, les médias généralistes vont s’intéresser au biathlon. Si des médailles tombent dans l’escarcelle de l’équipe de France, ce sport fera les gros titres des 20-heures.
Breizh-info.com : Et pour finir, si vous deviez résumer l’esprit du biathlon en une phrase ?
Franck Lacroix : « Le courage, c’est la grâce sous pression », écrivait Hemingway : le biathlon, c’est courir à fond puis retrouver le calme pour tirer juste.
Propos recueillis par YV
Crédit photo : DR (photo d’illustration)
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