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Européisme, langue de bois et pensée unique

Frank-Walter Steinmeier, actuel ministre allemand des Affaires étrangères, a publié dans Le Monde du 8 Juillet dernier un article consacré aux conséquences de la dernière élection des députés du Parlement européen. Cette élection a été marquée par une très forte poussée de ceux que les européistes appellent les « europhobes », lesquels sont, comme chacun sait, de proches parents des « homophobes », des « xénophobes » et de tous les phobiques maladifs dont on ne peut que déplorer la fâcheuse prolifération. Ceux qui croient que la langue de bois et les discours politiquement corrects sont une spécialité française pourront constater, à la lecture de cet article, qu’il n’en est rien et que de l’autre côté du Rhin, il en va comme de ce côté-ci.

Steinmeier écrit par exemple que la dernière campagne électorale a montré que le projet européen intéresse et mobilise les Européens ! Or cette campagne électorale, qui a été réduite à sa plus simple expression n’a suscité que quelques commentaires au cours des deux semaines précédant le vote. Le vote lui-même a été boudé par 56% des Européens, ce qui est un peu moins qu’en 2009 (59,36%) sans doute parce qu’un contingent d’abstentionnistes a décidé cette fois-ci de voter en faveur des partis eurosceptiques. Si l’on ajoute à ces 56%, les votes qu’ont obtenus ces derniers partis, il apparaît clairement que l’Union Européenne n’enthousiasme qu’un gros tiers des populations de l’Europe à vingt sept ! Ce qui n’est tout de même pas beaucoup, contrairement à ce qu’affirme Steinmeier qui prend ses lecteurs pour des idiots et qui pratique tout au long de cet article un amalgame entre euroscepticisme, xénophobie et racisme dans le but évident de discréditer toute critique de l’Union européenne.

Toute contestation de l’organisation de Bruxelles est devenue, pour l’oligarchie, un délit et relève nécessairement de l’extrémisme et du racisme. Aussi, pour lutter contre la montée de cette contestation, qui est de loin le fait le plus marquant de cette dernière élection, Steinmeier envisage la création d’une nouvelle commission au sein du Parlement Européen, laquelle serait destinée à lutter contre le racisme et l’antisémitisme ! De plus, pour interdire aux petits partis contestataires l’accès au Parlement européen, il propose de fixer un seuil de voix suffisamment élevé qui permettrait de les éliminer et de maintenir la domination des partis favorables à l’UE.

Les illusions d’un ministre allemand

Bien entendu, Steinmeier nous dit que désormais, puisque le gros de la crise est passé et que « la croissance et la reprise émergent partout à nouveau », tout va très bien se passer. Alors que les Etats-Unis sont probablement entrés en récession (croissance de -2,9% au premier trimestre 2014, qui sera sans doute suivi d’un second trimestre du même tonneau) et que l’économie allemande pique du nez (la zone euro est le premier marché de l’Allemagne, or ce marché, du fait de l’austérité générale imposée par l’Allemagne, rétrécit comme une peau de chagrin), il est permis de penser que l’économie européenne n’est pas à la veille d’un avenir radieux ni même d’une amélioration sensible (depuis 2008, les oligarques nous racontent que nous sommes sortis du marasme ; Christine Lagarde a été la première à le faire pendant l’été 2008).

Son analyse des origines de la poussée d’euroscepticisme manque, pour le moins, d’originalité; comme tous les commentateurs du « courant dominant », Steinmeier affirme que ce prurit momentané, qui disparaîtra avec le prochain retour de la croissance, est lié à la « grave crise financière » (crise que Steinmeier, comme ses collègues de l’oligarchie européiste, n’a pas vu venir, ce qui en dit long sur leur perspicacité) et seulement à elle.

Il semble clair, pour lui, que les effets délétères de la monnaie unique et de la politique austéritaire imposée par l’Allemagne n’ont aucun impact sur la déliquescence de l’économie en zone euro et par conséquent sur l’évolution des opinions. Il ne semble pas non plus avoir pris conscience que la gouvernance despotique de l’Union européenne, dont le projet de Traité transatlantique est l’illustration la plus parfaite, et l’affaiblissement progressif de la souveraineté des états, voulue par l’oligarchie européiste, ont fini par inquiéter les peuples qui commencent à se cabrer.

Steinmeier se berce d’illusions ; l’euroscepticisme ne fera que croître parce que les effets du Traité de Schengen (immigration incontrôlée), du futur traité transatlantique (TTIP), de la monnaie unique et de la confiscation croissante du pouvoir politique des peuples par l’oligarchie bruxelloise vont pousser des couches de plus en plus larges des populations européennes à rejeter une Union européenne qui adopte un ton autoritaire et ce, même si la croissance reprend un jour un peu de couleurs.

Vers un despotisme européiste ?

De toute évidence l’oligarchie européiste commence à prendre la mesure du danger que représente pour son projet mondialiste la montée de l’euroscepticisme ; sa réponse consiste à accélérer la fuite en avant vers la création d’un marché mondial dirigé par les Etats-Unis. Il s’agit désormais, pour elle, de faire basculer le plus rapidement possible l’Union européenne dans un très grand marché euro-atlantique sous commandement états-unien, en attendant la création ultérieure d’un marché aux dimensions de l’OMC.

Pressée et sans doute un peu affolée par l’évolution des opinions populaires, l’oligarchie veut mettre les bouchées doubles avant que la situation ne devienne ingérable. Ainsi, « Mario Draghi pense qu’un organe supranational pour contourner un débat national sur les réformes pourrait être mis sur pied à l’instar de ce que le Fonds Monétaire International parvient à imposer dans des pays sous sa surveillance » (Les Echos, 10/07/14).

Le président de la Banque centrale européenne propose donc de contourner les parlements nationaux qu’il considère comme autant de freins opposés à l’action de la camarilla bruxelloise. La gouvernance européiste dévoile son vrai visage qui est celui du despotisme. Ainsi, le projet de traité transatlantique (TTIP) qui aura des répercussions incalculables en matière économique, politique, sociale et culturelle et qui va placer, de fait, l’Union européenne sous domination américaine ne fera l’objet d’aucun référendum (l’abandon de toute politique de défense, l’intégration et la soumission à l’OTAN, dirigée par les Etats-Unis, ont été les prémisses de ce qui va se passer en matière économique et surtout juridique).

Nous assistons au triomphe posthume de Jean Monnet dont on sait aujourd’hui, grâce aux archives qui ont été déclassifiées, qu’il était un agent stipendié des Etats-Unis. Mais l’histoire n’est pas terminée et la prise de conscience qui est en cours dans de nombreux pays d’Europe finira très probablement par mettre en grande difficulté une organisation qui n’est soutenue que par une petite minorité. L’évolution de la situation en Grande-Bretagne où devrait avoir lieu un référendum sur une éventuelle sortie de l’UE en 2015 (du fait de la pression considérable exercée par l’UKIP sur le parti conservateur) montre que nous sommes entrés dans une période de grandes turbulences.

 B. Guillard

Photo : Stephan Roehl/Flickr (cc)

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