Un internaute, ancien agriculteur, Ă©tabli en Loire-Atlantique, nous Ă©crit dans une lettre poignante son histoire. Mais aussi les raisons qui font que, comme des milliers d’autres paysans en France, un jour, il jette l’Ă©ponge, avant que son entreprise ne soit avalĂ©e par une autre, plus grosse. N’en pouvant plus.
Une lettre qui fait par ailleurs Ă©cho Ă celle, tout aussi poignante, de la famille d’un Ă©leveur qui a mis fin Ă ses jours cette annĂ©e, dans les CĂŽtes d’Armor. Quand le malaise paysan s’installe, se dĂ©veloppe et contamine des territoires entiers, la terre pourrait bien finir par trembler …
Vie et disparition d’un agriculteur breton :
Lorsque jâĂ©tais enfant, je suivais mes parents dans la ferme. AprĂšs les journĂ©es dâĂ©cole, jâĂ©tais lĂ pour soigner les poules, les canards, les dindons, les lapins, les vaches⊠Faire boire les petits veaux.
Quand il Ă©tait lâheure de la traite ma mĂšre allait chercher les vaches au champ avec BergĂšre notre chienne. Je me tenais prĂȘt pour les faire tourner dans lâĂ©table. Elles Ă©taient trĂšs dociles, elles avaient leur place attitrĂ©e et ne se trompaient que trĂšs rarement. Il fallait les « nacher » (attacher avec une chaĂźne) par sĂ©curitĂ© pour les traire avec le transfert (MatĂ©riel de traite qui existait avant la salle de traite).
TrĂšs jeune, avant mes 10 ans, jâai appris Ă travailler la terre : charruer, herser, passer le cultipacker, et plus tard : semer⊠Ramasser les cailloux qui ressortaient aprĂšs les labours, Ă©tait pour moi une punition mais un devoir aussi pour prĂ©server les matĂ©riels qui passeront dans ces parcelles dans le futur. Tel que la faucheuse, la faneuse, lâandaineur, ou encore la moissonneuse batteuse  et le round ballerâŠ
Je nâavais pas de loisirs ou câĂ©tait trĂšs furtif. Ma vie se rĂ©sumait entre lâĂ©cole et lâexploitation familiale. Ce nâĂ©tait pas simple dâallier les deux ! Tous les soirs, câĂ©tait la mĂȘme chose, mes parents rentraient de leur journĂ©e de labeur vers 23 heures. Trop tard pour enfant, impossible de revoir mes leçons avec euxâŠ
Au fil du temps, mes parents ont du grossir lâexploitation familiale pour pouvoir vivre mais ne gagnaient pas plus dâargent pour autant. Pourtant Ă cette Ă©poque, il nây avait pas toutes les normes environnementales et administratives que lâon connait aujourdâhui, qui nous coĂ»tent trĂšs trĂšs chĂšre !
Quand jâai fini mes Ă©tudes agricoles et que jâai eu mes diplĂŽmes, je me suis directement installĂ© dans la ferme de mes parents car lâheure de la retraite avait sonnĂ© pour eux. NĂ©anmoins, ils me donnaient des coups de mains car comme les prix des produits vendus aux industriels nâaugmentaient pas et que le coĂ»t de production, lui, augmentait sans cesse je devais produire plus juste pour compenser ce que je perdais.
Mais tout a une fin ; mes parents ne pouvaient plus mâaider, je nâavais pas les moyens financier dâembaucher un salariĂ©, jâĂ©tais donc dĂ©passĂ©Â !
Je me suis posĂ©, jâai constatĂ© que jâavais toujours travaillĂ©, que jâĂ©tais seul, aucune vie sociale car je ne sortais jamais de ma ferme vu que je nâen avais pas le temps et pas les capacitĂ©s financiĂšres. Ce qui fait que je ne voyais quasiment personne.
La solitude, lâendettement, la surcharge de travail dans la ferme ainsi quâadministrative ont eu raison de moi.
VoilĂ comment une ferme familiale succombe, voilĂ comment un agriculteur disparait.
Un ancien agriculteur breton
Crédit photo : Pixabay (cc)
[cc] Breizh-info.com, 2017, dĂ©pĂȘches libres de copie et de diffusion sous rĂ©serve de mention et de lien vers la source dâorigine
3 rĂ©ponses Ă “TĂ©moignage. Vie et disparition d’un agriculteur breton.”
Ce tĂ©moignage est reprĂ©sentatif de beaucoup de situations vĂ©cues dans un pays oĂč la technocratie n’a de cesse de dĂ©truire ce qui a fait notre richesse. Honte Ă l’Ă©narchie, honte Ă la parasitocratie de pouvoirs publics qui vivent de l’abus de taxes et de rĂ©glementations. Honte Ă la corruption de ces pouvoirs indignes qui ont livrĂ© “les territoires” (comme ils disent) aux capitalistes financiers de l’agro-business pour dĂ©truire la terre et les exploitations Ă dimension humaine qui pouvaient Ă©voluer tout en sachant la respecter.
Le comble est que ces technocrates (et les mĂ©dias qui vĂ©hiculent leur propagande), par Hulot et ses prĂ©dĂ©cesseurs interposĂ©s, prĂ©tendent donner Ă la population des leçons d'”Ă©cologie”, de “dĂ©veloppement durable” et de “transition Ă©nergĂ©tique”, alors que ce sont leurs politiques agricoles dĂ©sastreuses qui ont causĂ© l’assĂšchement de nos terres et la spoliation dont nous sommes l’objet au profit d’intĂ©rĂȘts privĂ©s Ă©trangers!
Je salue la beautĂ© d’Ăąme que rĂ©vĂšle le tĂ©moignage de cet agriculteur et j’exprime Ă son auteur ma gratitude et mon admiration pour les valeurs profondes dont son message est porteur. De ceux qui dĂ©truisent ces valeurs, avec le mĂ©pris de leur arrogante inconscience, au lieu de les respecter, nous en aurons raison.
L’Ă©narchie, l’oligarchie, la technocratie… Tout cela n’est que des mots, des formules pour masquer la rĂ©alitĂ©.
La vĂ©ritĂ©, c’est que nous vivons dans une sociĂ©tĂ© soviĂ©tisĂ©e. Quand les prĂ©lĂšvements obligatoires, les taxes annexes diverses, les impĂŽts dĂ©passent le seuil des 40% et frĂŽlent les 50, quand les lois rĂ©gissent de la naissance Ă la mort toute vie, toute profession, toute activitĂ©, quand il n’y a plus de libertĂ© de penser autrement que celle qui est imposĂ©e, on vit dans un SYSTĂME COMMUNISTE !!
D’ailleurs, en ce qui concerne l’agriculture Ă grande Ă©chelle, comment ne pas y voir l’installation de kolkhozes ?
La France est le seul pays occidental qui peut “s’enorgueillir” d’avoir encore un parti communiste. Quelle honte !
Comme Joanne, je compatis et vous remercie Monsieur de toutes ces années de travail de votre famille et de votre dévouement à vos parents et à ce beau métier, si méprisé mais qui pourtant, nous nourrit.
Tous ceux qui travaillent la terre, élÚvent correctement leur bétail et tiennent encore debout, par leurs valeurs, leur courage et leur abnégation sont les chevaliers des temps modernes et méritent le plus profond respect.
Que Dieu vous garde. Lui sait ce que vous valez.
Suivez l’actualitĂ© judiciaire de droit social dans les prochains mois .