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Syrie. Bachar el Assad en passe de vaincre les rebelles islamistes du sud

La révolution syrienne avait commencé en 2011 à Deraa. Alors que cette ville est toujours coupée en deux – le nord tenu par les loyalistes, le sud par les rebelles islamistes, c’est peut-être dans la même province que tout s’achèvera, au rythme de l’offensive triomphante des loyalistes. Lancée le 20 juin, « l’opération Basalte » a réduit de moitié la superficie tenue par les rebelles moins de deux semaines plus tard.

La première cible de l’opération était le plateau basaltique du Lajat, d’où son nom. Au 25 juin, l’armée syrienne prit d’assaut Busra al Hariri (13.000 habitants en 2004), qui a fini par tomber. Le plateau était isolé des autres zones rebelles au sud, les habitants druzes fortement opposés à la poursuite des opérations militaires dans leur zone, si bien que les rebelles n’ont eu d’autre choix que de quitter la vingtaine de villages du Lajat, en passant à l’ouest de Busra al Hariri, tandis que l’armée syrienne faisait comme si de rien n’était.

Le plateau nettoyé des cellules terroristes dormantes, l’armée syrienne a continué vers le sud. La ville de Al Hirak a fini par tomber le 28 juin. La veille, dans plusieurs villes – dont Ibta et Dael situées sur la grande route entre Damas et Deraa, plusieurs centaines de civils se sont rassemblés spontanément lors de manifestations qui réclamaient l’entrée de l’armée loyaliste, le retour de Bachar el Assad et du gouvernement de Damas. La prise de Al-Hirak est une importante avancée logistique : la route de Deraa à Suweida ne prend qu’une heure, contre deux heures auparavant.

Parallèlement, des négociations avaient lieu dans le cadre des accords de réconciliation nationale – les rebelles qui n’avaient pas trempé dans des massacres se voyaient garanties l’amnistie et la possibilité de servir dans l’armée ou la police. Le même jour l’armée syrienne a ouvert un nouveau front pour se rapprocher de la zone tenue par la franchise locale de l’État Islamique – Jaish Khalid Bin Walid (JKBW) et a pris Tell Akhmad ainsi que la cote 227.6 au nord-ouest d’Ibta.

Une trêve de douze heures a été annoncée, pendant laquelle les rebelles – ou les conseils des anciens – de nombreuses villes ont annoncé leur volonté de rendre les armes et de mettre fin à une très (trop?) longue guerre. Parmi celles-ci, Bosra al Sham au sud-est de la province, Nassib – qui ne se trouve qu’à cinq kilomètres du poste frontière avec la Jordanie etc.

La position des rebelles s’expliquait surtout par l’abandon du soutien par la Jordanie voisine, qui refusait en outre d’ouvrir sa frontière aux rebelles et à leurs familles, mais aussi par la supériorité numérique – et technique – de l’armée syrienne. Le 30 juin, l’armée syrienne entrait dans Ibta et Dael, ainsi que dans d’autres localités, comme Jizah au sud de la province.

L’offensive a coûté pour l’heure à l’armée syrienne environ 90 morts – selon les sources loyalistes elles-mêmes, mais lui a permis de récupérer une quarantaine de blindés et surtout une bonne moitié des localités tenues jusque là par les rebelles. En moins de deux semaines. Plusieurs centaines de rebelles se sont rendus à l’armée syrienne. Des civils déplacés par la guerre ont déjà commencé à rentrer chez eux, les loyalistes à peine arrivés, notamment à Jizah au sud de la province.

L’armée syrienne est actuellement à 7 km du poste-frontière de Nassib, dont la réouverture, stratégique, est attendue par la Jordanie. Celle-ci a en effet supporté pendant la guerre un important flot de réfugiés – tout en subventionnant en outre des bandes rebelles qui agissaient au sud des provinces syriennes de Quneitra, Deraa et Suweida – mais a vu disparaître presque toute son activité économique avec la Syrie. La réouverture du poste-frontière, refusée par les rebelles malgré d’importantes et tenaces négociations ces derniers mois, pourrait donner un important bol d’air à l’économie jordanienne, tout en permettant la reconstruction de l’économie du sud de la Syrie.

Un durcissement des rebelles à partir du 30 juin

A partir du 30 juin cependant les espoirs que les rebelles se rendent sans qu’aucun coup de canon ne soit tiré se sont amenuisés. De leur côté, les islamistes de JKBW, la franchise locale de l’EI, ont distribué des prospectus pour inviter la population qui avait des raisons de craindre le retour des loyalistes à s’installer dans sa zone – la vallée de Yarmouk, dans la province de Quneitra et le sud-ouest de celle de Deraa. Les rebelles de Tafas, à l’ouest de Deraa, un temps tentés de se rendre, ont déclaré s’affilier à l’EI et refuser la reddition. Revenus à la raison par d’intenses frappes aériennes – plus de 30 le 2 juillet – ils hésitent encore.

En même temps, à partir du 29 juin, l’armée syrienne a commencé l’investissement des positions rebelles à l’est et surtout à l’ouest de Deraa. Avancer dans la campagne jusqu’à la frontière jordanienne toute proche permettrait aux loyalistes de couper toute communications entre les positions rebelles à l’ouest et au sud de la ville, toujours à l’extrémité d’un saillant loyaliste. L’armée syrienne peut déjà les surveiller après avoir pris Tall Zumaytiyah à l’ouest de Deraa le 29 juin dernier.

Au 2 juillet, les rebelles qui avaient promis de se rendre à Bosra al Sham, au sud-est de la zone rebelle l’ont effectivement fait. Ceux de Nassib et des localités voisines en revanche – qui bénéficient le plus de la contrebande qui passe à la frontière avec la Jordanie – ont refusé finalement de poursuivre les négociations quant à leur reddition. Cependant l’appui espéré des rebelles du nord – à Idlib – s’est résumé à une « offensive de grande échelle » à Tell Bazam, repoussée par l’armée syrienne et les conscrits de Mahardeh.

La zone affiliée à l’État Islamique (JKBW) das la vallée de Yarmouk et les rebelles de l’ouest, entre Hadar et Deraa, devraient être plus difficiles à maîtriser. Israël de son côté aurait donné son accord à l’intervention loyaliste syrienne près de ses frontières, à condition que les unités ne soient pas accompagnées par leurs alliés du Hezbollah ou de l’Iran. Après deux semaines d’offensive, l’armée syrienne tient le bon bout : après ces sept ans de guerre civile, même les rebelles en sont lassés. Et peu d’entre eux peuvent barguigner face à l’appui aérien russe.

Louis-Benoît Greffe

Crédit photo : DR
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