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Bientôt du pétrole à 0 dollar ?

Tandis que le cours du baril de brent est à 25.10 dollars, le prix du baril WTI (West Texas Intermediate) est à 21.95 dollars, certains pays bradent leur pétrole et, aux Etats-Unis, les producteurs de pétroles lourds vont jusqu’à payer leurs clients pour qu’ils vident leurs stocks.

Le 28 mars, le blogueur industriel russe Zavodfoto.ru – principal blogueur industriel russe – publie sur YandexZen une information intéressante. « Le prix du pétrole Wyoming Asphalt Sour », un pétrole lourd bitumineux et sulfuré utilisé principalement pour produire des goudrons et revêtements routiers, difficile à retraiter et de plus extrait très loin des ports, « est tombé à 19 centimes de dollars le baril. C’est le prix proposé par Mercuria Energy Group Ltd à ses clients pour chaque baril sorti des stocks ».

En 2016, lors de la précédente crise du pétrole, le pétrole de mauvaise qualité du Dakota du Nord ne trouvait aussi preneur que si les clients étaient payés pour le prendre. « Alors, l’entreprise Flint Hills Ressources n’était prête à acheter le pétrole North Dakota Sour que si elle était payée 0.5 dollars le baril ».

Certains analystes craignent que tous les types de pétrole de basse qualité, bitumineux ou avec du souffre, vont voir leurs cours s’effondrer et les producteurs devront vendre à prix négatifs ou fermer leurs gisements. Le pétrole Canadian Western Select se vend actuellement à moins de 5 dollars le baril, et Oklahoma Sour en-dessous de 7 dollars le baril.

L’essence prévue en-dessous de 2$ le gallon aux USA

Alors que les prix du pétrole s’effondrent, aux États-Unis ceux de l’essence suivent – ce n’est en revanche toujours pas le cas en Russie où le coût des carburants augmente plus vite que l’inflation (+10.44% en 2019). Au 21 mars, sur les stations services BP au Kentucky, le gallon (3.785 L) du carburant Regular Octane – équivalent du sans plomb 92 – coûtait l’équivalent de 26.2 centimes d’euros le litre. Depuis le début de l’année, les prix moyens au gallon ont baissé de 44.6 centimes (17%), et certains experts prévoient la baisse du prix moyen au gallon en-dessous de 2$ le gallon.

Pétrole bas : Trump donne l’ordre de remplir les réservoirs

Le 14 mars, Donald Trump a donné l’ordre de remplir les réserves stratégiques américaines, en profitant des prix bas du pétrole. Le baril de Brent était alors à 33.88 dollars le baril, mais la plupart des pétroles américains coûtent moins cher.

La dernière fois que l’État américain remplissait ses réserves stratégiques, c’était en janvier 2009, le pétrole avait baissé de 140 à 32 dollars le baril – à l’époque 10.6 millions de barils avaient été acquis sur le marché, et 16 millions reçus en nature des pétroliers en lieu et place des taxes sur l’extraction. Lorsqu’en été 2011 le baril avait atteint 100 dollars, Obama avait donné l’ordre de vendre 30 millions de barils des réserves pour faire baisser le prix des carburants. Cette fois, Trump veut acheter 92 millions de barils, ce qui permettrait d’aider aussi un peu les producteurs de pétrole de schiste américains.

Tous les réservoirs de la planète pleins à ras-bord d’ici deux mois ?

Au 19 mars dernier, alors que le pétrole WTI était à 20.81$ le baril et le Brent à 24.84$, des traders de pétrole prévoyaient que la demande mondiale allait baisser de 5 millions de barils par jour en avril – notamment du fait du confinement de 2.5 milliards d’humains et de l’arrêt partiel ou total de la plupart des grandes puissances économiques (USA, UE, Inde, Russie, Turquie). Dans la mesure où la plupart des producteurs veulent augmenter les quantités mises sur le marché, les prix ne peuvent que fléchir.

Jusqu’où le pétrole ne baissera-t-il pas ?

La plupart des analystes s’entendent sur un prix plancher à 10$ le baril – il correspond au prix de production du pétrole sur les grands gisements de Russie et d’Arabie Saoudite. Le russe Tatneft avait même déclaré courant mars qu’avec un prix de 8$ le baril, son entreprise gagnerait encore de l’argent.

L’analyste Paul Sankey qui travaille pour la banque japonaise Mizuho va plus loin – selon lui, le pétrole pourrait coûter un prix négatif, lorsque les traders commenceront à payer les acheteurs du fait du trop-plein d’offre sur le marché et du remplissage des réservoirs. En 2018, lors d’une crise dans le gaz de schiste au Texas, les réserves étaient pleines et les gazoducs ne suffisaient pas à emmener tout le volume produit – les producteurs ont du payer leurs clients pour qu’ils récupèrent le gaz au lieu d’être contraints de le brûler.

A ce jour, les réservoirs de pétrole sont remplis à 60% et devraient l’être tout à fait d’ici six mois, voire moins – d’autant que des pays ou des pétroliers ont donné l’ordre d’acheter de forts  volumes de pétrole pour remplir les réserves en profitant des prix bas.

Une fois que les réserves seront pleines, on pourra encore stocker sur des tankers en pleine mer – cependant la plupart des transporteurs ont augmenté dernièrement leurs prix de location. Par exemple Reliance Industries paye 400.000 $ par jour pour la location du super-tanker Princess Mary pour convoyer du pétrole d’Arabie Saoudite en Inde. Entre le Proche-Orient et la Chine, des tankers se louent maintenant 700% plus cher qu’il y a deux mois.

Une première hausse très nette du coût de location des navires pétroliers avait eu lieu en octobre 2019 du fait des sanctions américaines contre l’Iran et le Venzuela : mi-octobre, la journée d’utilisation d’un tanker de 270.000 T de brut entre le Golfe persique et Singapour dépassait 294.000 $ contre moins de 39.000 $ le 23 septembre, soit un coût multiplié par huit. Près de 250 navires qui ont transporté du pétrole vénézuélien sont devenus « intouchables » pour les traders, ainsi que l’ensemble de la flotte du plus gros armateur Cosco – soit 3 à 6% de la flotte mondiale des vaisseaux d’une capacité comprise entre 150.000 et 320.000 T ; cette hausse s’était aussi répercutée sur les raffineurs.

Louis-Benoît Greffe

Crédit photo :DR
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