Le débat sur l’armement des policiers municipaux, récurrent depuis plusieurs années, connaît un nouveau pic de tension. Mercredi 14 mai, le syndicat Force Ouvrière (FO), majoritaire au sein des 200 agents nantais, a adressé un courrier à la maire Johanna Rolland pour exiger la dotation d’armes de catégorie B1 – des pistolets semi-automatiques – à la police municipale et à l’Unité métropolitaine des transports en commun (UMTC). À défaut de réponse jugée satisfaisante, un préavis de grève prendra effet le 26 mai.
Des interventions de « premiers arrivés » qui changent la donne
Deux faits récents ont relancé la colère des patrouilles. Le 24 avril, lors de l’attaque au couteau au lycée Notre-Dame-de-Toutes-Aides, ce sont d’abord quatre équipages municipaux, équipés de boucliers et de pistolets à impulsion électrique, qui ont sécurisé le périmètre en attendant la police nationale. Quatre jours plus tard, quartier Doulon-Bottière, l’UMTC est encore la première sur les lieux lorsqu’un homme blesse grièvement sa compagne avant de se retrancher et de se suicider. Les agents, sans arme létale, sont restés en appui de la BAC, tenue d’entrer la première.
Ces séquences s’ajoutent à une intervention pour tapage nocturne, le 9 avril, où les policiers ont fait face à un individu armé d’une lame de 30 centimètres, ou à la rixe impliquant une vingtaine de personnes, mardi soir, à la croisée des tramways.
Selon FO, les interpellations réalisées par la police municipale nantais ont bondi de 600 en 2023 à 800 en 2024. Un sondage interne mené il y a un an montre que 98 % des agents se disent favorables au port d’une arme à feu.
Une position politique inchangée à l’hôtel de ville
La municipalité écologiste-socialiste, quant à elle, campe sur sa ligne. Johanna Rolland n’a jamais caché ses réticences à armer sa police, arguant que la mission première des agents reste la médiation et la proximité. Dans la métropole, seule Saint-Nazaire, ville également dirigée par un maire socialiste, a franchi le pas en avril dernier. À Bordeaux ou dans plusieurs communes de la couronne nantaise, la décision a déjà été actée.
Du côté de l’État, le ministère de l’Intérieur encourage l’armement depuis la loi de 2017, mais laisse la décision finale aux maires. Nantes fait donc figure d’exception parmi les grandes villes de plus de 300 000 habitants à conserver une police municipale non dotée d’armes létales.
FO invoque la responsabilité de la maire « dans la sécurité de ses agents ». Les policiers municipaux soulignent qu’ils appliquent désormais « des articles du Code pénal » et non plus seulement des arrêtés municipaux. « Nous réalisons la même police de voie publique que nos collègues nationaux, sans les mêmes moyens de défense », résument-ils.
La mairie dispose d’une dizaine de jours pour recevoir le syndicat et tenter de désamorcer le conflit. À défaut, des patrouilles en effectifs réduits pourraient perturber l’ordre public dès la fin du mois. Pour l’heure, aucun calendrier de négociation n’a été annoncé.
Le débat, lui, dépasse les frontières nantaises : alors que l’armement progresse partout en France, la capitale de la Bretagne hisrorique s’interroge sur la ligne rouge entre prévention et protection armée. Les prochaines semaines diront si l’équilibre peut encore tenir.
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