Les Roumains ont tranché : ce dimanche, à l’issue d’un second tour marqué par une participation massive (près de 65 %), le maire centriste de Bucarest, Nicusor Dan, a remporté l’élection présidentielle face à George Simion, candidat souverainiste et chef de file de l’Alliance pour l’Union des Roumains (AUR). Avec près de 54 % des suffrages exprimés selon les résultats quasi définitifs, le mathématicien de formation, diplômé en France, devance d’environ un million de voix son adversaire nationaliste, qui avait pourtant largement dominé le premier tour avec plus de 40 % des voix.
La victoire de Nicusor Dan, figure de l’anti-corruption et fervent défenseur de l’ancrage occidental de la Roumanie, est saluée par les chancelleries européennes. Il incarne le choix d’une Roumanie résolument tournée vers Bruxelles et l’OTAN, en ligne avec le soutien à l’Ukraine et l’intégration renforcée dans l’Union européenne. Il s’est d’ailleurs présenté comme le garant d’une Roumanie « stable, prospère et européenne », face à ce qu’il décrit comme une menace « isolationniste et anti-occidentale ».
Une campagne sous tension, des enjeux géopolitiques majeurs
Ce scrutin n’était pas seulement un duel entre deux personnalités : il opposait deux visions diamétralement opposées de l’avenir du pays. D’un côté, la continuité euro-atlantique. De l’autre, une volonté affirmée de rupture avec ce que George Simion qualifie de « diktats » de Bruxelles, notamment sur les questions économiques, migratoires ou liées à l’assistance militaire à Kiev.
L’élection était d’autant plus scrutée qu’elle intervenait après l’annulation très controversée du scrutin de novembre 2024, entaché de soupçons d’ingérence étrangère – en l’occurrence russe – au bénéfice de Călin Georgescu, interdit depuis de participation et inculpé. Ce contexte a tendu la campagne, provoqué des émeutes et renforcé la méfiance envers les institutions chez une partie de la population, notamment dans les campagnes.
Simion, entre défaite électorale et promesse de reconquête
Bien qu’il ait reconnu la victoire de son rival face à l’ampleur de l’écart, George Simion n’a pas désarmé. Dans un discours prononcé peu après la fermeture des bureaux de vote, il a promis de poursuivre le combat politique au nom de la souveraineté, de la famille et de la nation. « Ce n’est qu’une bataille. Nous ne perdrons pas la guerre », a-t-il lancé à ses partisans, tout en dénonçant une campagne marquée selon lui par des intimidations, sans toutefois apporter de preuves tangibles.
🇷🇴We will continue our fight for freedom and our great values along with other patriots, sovereignists and conservatives all over the world.
We may have lost a battle, but we will certainly not lose the war.
God bless you all ❤️! pic.twitter.com/rMYeRc2JXj
— 🇷🇴 George Simion 🇲🇩 (@georgesimion) May 18, 2025
Le succès relatif du candidat populiste au premier tour – dans un pays où la défiance envers les élites reste profonde – illustre un malaise politique durable. Son alliance avec Georgescu, figure déchue mais encore populaire dans certains milieux, a renforcé sa base. Mais elle n’a pas suffi à élargir son socle électoral.
Un pays coupé en deux ?
La Roumanie sort de cette élection plus divisée que jamais. D’un côté, les grandes villes, les classes moyennes et les partisans d’un engagement européen. De l’autre, des territoires ruraux, des jeunes en quête d’identité, des catégories populaires qui voient dans le discours souverainiste une alternative crédible au système en place depuis 1989.
Si Nicusor Dan a réussi à rassembler une large coalition pro-européenne au second tour, sa victoire est aussi le fruit d’un réflexe classique d’une sorte de cordon sanitaire épaulé par une lourde propagande, déjà vu ailleurs en Europe. Reste à savoir s’il pourra transformer ce succès électoral en adhésion durable, notamment auprès de ceux qui ne croient plus aux promesses institutionnelles.
Dernier élément marquant : les autorités roumaines ont dénoncé une nouvelle tentative de manipulation électorale via les réseaux sociaux, attribuée une fois de plus à des relais liés à la Russie. De son côté, le fondateur de Telegram a accusé la France d’ingérence, une accusation rapidement démentie par Paris.
Quand @francediplo dément les propos de @durov,celui-ci réplique avec des éléments précis !
Si le Gvt a osé demander à #Telegram de censurer les comptes s’opposant aux amis de Macron en Roumanie,c’est extrêmement grave…et surtout inquiétant pour 2027 en France. pic.twitter.com/6sMVgAaMJq
— Thierry MARIANI (@ThierryMARIANI) May 18, 2025
Si l’élection de Nicusor Dan rassure Bruxelles et Washington, elle ne règle en rien la fracture qui traverse la société roumaine. La percée du camp souverainiste, bien que freinée, révèle une aspiration à la reconquête d’une souveraineté que d’aucuns estiment confisquée. L’avenir dira si le nouveau président saura réconcilier une Roumanie tiraillée entre deux mondes.
Crédit photo : Facebook Nicusor Dan
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3 réponses à “Roumanie. Victoire de Nicușor Dan à l’élection présidentielle, devant George Simion”
Le tous contre un a fort bien marché contre le candidat populiste-nationaliste
La propagande estampillée Otan (qui ratisse de la gauche la plus extrême jusqu’à la droite molle) en faveur de l’immigration-invasion et de la désindustrialisation de l’Occident a triomphé
Pourquoi un Français s’en étonnerait-il ? Car, en France aussi, on connaît la chanson, pour l’avoir expérimentée X fois
C’est une nouvelle leçon d’unité : tous les électeurs opposés au capitalisme sauvage globalisant et au crétinisme marxiste doivent se regrouper autour d’un unique candidat populiste… en évitant le petit jeu des agents de division, sinon un macronien sera élu en 2027, puis on renouera en 2032 avec un Super-Macron encore plus arrogant, nul et dépensier !
65%, participation massive???
Il serait bon de rappeler que George Simion a complètement raté le seul débat télévisé de la campagne présidentielle. Par ailleurs, chacun a pu l’entendre déclarer sur CNews qu’il n’était « ni un ami ni un admirateur » de Vladimir Poutine et qu’il ne pensait pas que la Russie voulait la paix.