Dérivé du pétrole, l’hexane est un solvant industriel utilisé depuis les années 1930 pour extraire l’huile de graines broyées de soja, de tournesol ou de colza. Légèrement inflammable, classé comme neurotoxique et reprotoxique, il est autorisé à dose résiduelle dans certains aliments comme les margarines ou les huiles végétales. Mais les dernières enquêtes révèlent une présence bien plus diffuse que ce que prévoyaient les autorités sanitaires.
Selon Radio France, sur 54 produits alimentaires testés en 2024, 25 contenaient des résidus d’hexane : huiles, beurres, œufs et morceaux de poulet. En cause : l’alimentation des animaux d’élevage, provenant souvent des tourteaux issus de l’extraction industrielle. À la ferme expérimentale de l’INRAE de Theix (Morbihan), une étude menée depuis 2021 montre clairement que l’hexane présent dans l’alimentation animale se transfère dans le lait.
Des seuils réglementaires fixés en 1996 (et jamais revus depuis) prévoient une limite de 1 mg/kg dans les huiles, mais aucune norme ne concerne l’alimentation animale. « L’exposition alimentaire s’avère plus fréquente que supposé auparavant », rappellait Brigitte Le Magueresse, directrice de recherche à l’université Lyon 1, auprès du magazine 60 Millions de consommateurs le 11 juillet dernier.
Un solvant toxique et invisible
Pourtant, l’hexane n’apparaît pas sur les étiquettes. Considéré comme un « auxiliaire technologique », il échappe à l’obligation d’affichage. « Ce n’est pas un ingrédient, on parle de résidus techniquement inévitables », reconnaissait Hubert Boquelet, délégué général de la Fédération nationale des corps gras, auprès de Radio France le 24 mai dernier. Une opacité dénoncée par Richard Ramos, député MoDem du Loiret cité par le magazine Le Point le 7 avril : « Quel manque de transparence, c’est incompréhensible pour les consommateurs qu’il n’y ait aucune information ».
Une proposition de loi déposée en mars 2025 vise à interdire l’hexane dans l’alimentation et à imposer un affichage sanitaire sur les produits concernés. « Qui imagine, en faisant une vinaigrette, qu’elle contient un hydrocarbure ? », interrogeait alors Richard Ramos. L’Agence européenne de sécurité alimentaire (EFSA) a annoncé une réévaluation complète, la première depuis 1996. Une réunion technique s’est tenue le 12 juin dernier.
Des alternatives existent
Des solutions de remplacement existent depuis des années, notamment à base de solvants biosourcés. Le projet EcoXtract, mené par l’INRAE et l’Ademe, en explore les performances. En France, certaines marques de lait infantile garantissent une production sans hexane.
Malgré tout, le secteur agroalimentaire freine. À Dieppe, un accident mortel survenu en 2018 dans une usine utilisant l’hexane a conduit à une condamnation pour homicides involontaires. « On peut supprimer l’hexane sans difficulté », rappelait Gérald Le Corre, de la CGT, auprès de Radio France. « Le b.a.-ba de la prévention des risques, c’est la suppression d’un produit extrêmement dangereux pour les salariés ».
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