La Vuelta n’a pas attendu les sierras espagnoles pour se donner des allures de tragédie antique. Deux jours seulement après avoir pris le départ de Turin, elle a déjà son héros cabossé : Jonas Vingegaard, qui a goûté au bitume avant de goûter au maillot rouge.
Le Viking au tapis, puis debout
Il y a des chutes qui vous brisent, et d’autres qui vous sacralisent. Le Danois, entraîné dans une mêlée de coureurs détrempés par une pluie perfide, s’est relevé avec quelques égratignures et une détermination intacte. Quelques kilomètres plus tard, il plantait son drapeau au sommet de Limone Piemonte, un col sans gloire mais aux airs de purgatoire. Giulio Ciccone, qui rêvait d’un triomphe italien à domicile, a dû se contenter de la photo-finish et des regrets. Le Français David Gaudu, troisième, a ramené un peu de baume au cœur à la Groupama-FDJ orpheline de Guillaume Martin-Guyonnet, contraint à l’abandon après une chute plus lourde de conséquences.
Le maillot rouge, Vingegaard l’endosse donc dès la deuxième étape, comme un souverain pressé. On sait déjà qu’il faudra une coalition de puncheurs, grimpeurs et même de météorologues inspirés pour le lui arracher.
La Vuelta, ce théâtre des illusions
La deuxième étape avait pourtant commencé dans une somnolence polie : échappée convenue, peloton vigilant, quelques secondes concédées pour la galerie. Mais la pluie est venue gifler le scénario, transformant la procession en corrida. La Vuelta, dans sa brutalité latine, rappelle que la gloire se conquiert toujours en glissant sur le fil du rasoir.
Castelo Branco : la revanche des sprinteurs
Demain, changement de décor. Après les rugissements de la montagne, place aux trompettes des sprinteurs. Lousa – Castelo Branco, un profil vallonné qui n’effraie personne, si ce n’est les organisateurs eux-mêmes qui peinent à justifier la classification en étape de moyenne montagne. Deux bosses répertoriées, dont l’Alto de Teixeira (17 km à 3,1 %), histoire de distribuer quelques points aux chasseurs de pois, puis un final en faux plat montant, parfaitement calibré pour un sprint à la hussarde.
Les favoris ? Kaden Groves (Alpecin-Deceuninck), logique prétendant à une nouvelle gerbe de lauriers, profitera d’un terrain taillé pour sa puissance. Derrière, Wout van Aert rôdera en outsider encombrant, avec l’opiniâtreté d’un homme qui refuse de jouer les figurants. Citons encore Corbin Strong, Pavel Bittner, voire un Bryan Coquardtoujours prompt à s’inviter dans les débats lorsque la pente reste clémente.
Ainsi va cette Vuelta : une étape vous propulse dans les catacombes de la douleur, la suivante vous ramène dans le vacarme d’un sprint massif. Vingegaard, déjà couronné, devra surveiller ses bleus autant que ses rivaux. Quant aux sprinteurs, ils n’ont que peu d’occasions pour s’exprimer : celle de Castelo Branco ressemble déjà à un rendez-vous obligé, un de ces carrefours où l’on perd ou l’on gagne une saison.
YV
Crédit photo : DR (Unipublic / Sprint Cycling Agency)
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