La Grande-Bretagne s’apprête à vivre un tournant judiciaire majeur. Le gouvernement travailliste de Keir Starmer présentera dans les prochaines semaines un projet de loi sur les peines de prison qui pourrait permettre à des milliers de délinquants d’éviter la case prison. Objectif affiché : désengorger un système carcéral à bout de souffle.
Des peines de moins d’un an remplacées par des sanctions alternatives
Selon The Guardian, la future loi proposerait que les condamnations allant jusqu’à douze mois de prison soient remplacées par des peines dites « communautaires ». En clair, de nombreux délinquants – qu’il s’agisse de petits trafiquants de drogue, de voleurs ou même d’auteurs d’agressions sexuelles mineures – ne seraient plus incarcérés.
Les juges, déjà critiqués pour leur indulgence, pourraient privilégier des restrictions comme l’interdiction de fréquenter les pubs ou les stades, ou encore le port d’un bracelet électronique.
Le gouvernement justifie sa réforme par l’état critique du parc carcéral britannique. Dans une déclaration officielle, Downing Street reconnaît avoir hérité d’un système « au bord de l’effondrement », avec une pénurie de cellules qui menace d’interrompre les procès et d’empêcher les arrestations.
Keir Starmer annonce la création de 14 000 nouvelles places de prison, dont 2 500 déjà livrées, mais reconnaît que « construire ne suffira pas ». Le projet prévoit aussi une clause dite de « bonne conduite », qui permettrait à certains détenus d’être libérés après avoir purgé seulement un tiers de leur peine. Les terroristes et les criminels considérés comme les plus dangereux seraient exclus de cette mesure.
Les critiques : impunité et laxisme
Cette orientation suscite déjà des critiques virulentes. Pour beaucoup, il s’agit d’un signal désastreux envoyé aux délinquants : l’assurance de retrouver la rue presque aussitôt arrêtés. Une perspective jugée d’autant plus inquiétante que la criminalité violente, en particulier les agressions au couteau, ne cesse d’augmenter dans les grandes villes britanniques. La répression visant les opposants politiques est, par ailleurs, impitoyable.
Face à cette stratégie jugée laxiste, Nigel Farage et son parti Reform UK prônent une ligne diamétralement opposée. L’ancien patron du Brexit a promis une politique de « tolérance zéro », inspirée par l’exemple new-yorkais de Rudy Giuliani dans les années 1990.
Farage propose notamment :
- la poursuite systématique de tous les délits, même mineurs ;
- le renforcement des contrôles de police par des opérations de type stop and search ;
- la construction de prisons sur des bases militaires pour isoler immédiatement les délinquants ;
- et, pour réduire les coûts, la possibilité de conclure des accords avec des pays comme El Salvador ou l’Estonie, où l’incarcération est moins chère.
Le contraste entre les deux visions est flagrant : d’un côté, un gouvernement travailliste misant sur la réduction des peines de prison et les sanctions alternatives pour répondre à la crise carcérale ; de l’autre, une droite populiste qui entend durcir le ton et faire de la répression un outil de reconquête sécuritaire.
Ce débat illustre une fracture profonde au Royaume-Uni : faut-il assouplir la justice au risque de l’impunité, ou au contraire l’alourdir au prix de moyens financiers considérables ?
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