Quand l’intelligence artificielle signe son premier contrat discographique : l’industrie musicale en état de choc

Londres a été le théâtre d’un tournant inédit dans l’histoire de la musique : pour la première fois, une maison de disques a signé un contrat avec un créateur musical entièrement basé sur l’intelligence artificielle. Derrière cette expérience, Oliver McCann, alias imoliver, un Britannique de 37 ans qui n’a aucune formation musicale. Graphiste de métier, il s’est mis à utiliser des outils d’IA pour transformer ses textes en chansons. L’un de ses morceaux a dépassé les 3 millions d’écoutes en ligne, ce qui lui a valu d’être repéré et signé par le label indépendant Hallwood Media.

McCann n’est pas un cas isolé. Avec l’essor d’outils comme Suno ou Udio, la production musicale par IA explose. Deezer estime que près d’un cinquième des morceaux mis en ligne chaque jour sur sa plateforme sont générés par intelligence artificielle, même si peu d’entre eux rencontrent un véritable succès d’écoute.

Le phénomène interroge : d’un côté, il démocratise la création musicale, permettant à des amateurs sans bagage instrumental de produire des titres ; de l’autre, il inquiète par la prolifération d’un contenu jugé standardisé, surnommé « AI slop », et par les menaces qu’il fait peser sur la valeur artistique.

Entre enthousiasme et colère

Certains artistes accueillent l’IA comme un nouvel outil créatif — à l’image de will.i.am ou Timbaland — tandis que d’autres y voient un danger mortel pour leur métier. Plus de 1 000 musiciens, parmi lesquels Kate Bush, Annie Lennox ou Damon Albarn, ont récemment publié un « album silencieux » pour dénoncer les réformes juridiques envisagées au Royaume-Uni, qui pourraient faciliter l’utilisation d’œuvres existantes pour entraîner des modèles d’IA.

Les majors, elles, oscillent entre peur et opportunisme. Sony, Universal et Warner ont engagé des poursuites contre Suno et Udio pour violation du droit d’auteur, tout en négociant en parallèle de nouveaux modèles de rémunération.

Le débat n’est pas sans rappeler les batailles judiciaires du début des années 2000 autour de Napster et du piratage musical, qui avaient bouleversé l’industrie et ouvert la voie au streaming. Aujourd’hui, le droit peine à suivre la vitesse des technologies. À qui appartiennent les morceaux générés par IA ? Comment rémunérer les artistes dont les œuvres ont servi à « nourrir » les algorithmes ? Pour l’instant, la zone grise demeure.

Les créateurs d’IA musicale assurent qu’il ne s’agit que d’un outil de plus, comparable à l’arrivée des synthétiseurs ou de l’Auto-Tune en leur temps. Mais l’ampleur du phénomène inquiète : la possibilité de générer des dizaines de versions d’une chanson en quelques heures pourrait bouleverser toute la chaîne de production musicale.

Reste à savoir si le public suivra. Pour l’heure, les chansons produites par IA génèrent plus de curiosité que de véritables tubes. Mais si les mentalités évoluent, il n’est pas impossible que l’un de ces titres synthétiques s’invite bientôt dans les classements officiels.
Avec ce premier contrat discographique, le signal est clair : l’intelligence artificielle est désormais un acteur du monde de la musique. Reste à savoir si elle sera un simple accompagnateur technologique… ou le fossoyeur de la création humaine.

Crédit photo : Pixabay (cc)
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2 réponses à “Quand l’intelligence artificielle signe son premier contrat discographique : l’industrie musicale en état de choc”

  1. Pavaroti dit :

    Si on est mauvaise langue, on a envie de dire: Compte tenu de la production depuis une vingtaine d’années à 5% d’exceptions près, le niveau va-t-il vraiment baissé? Pour les politiques, je pense qu’une IA Bayrou avec une musique d’ascenseur sera plus audible que l’original. Mieux vaut dans son cas une IA que son AI naturelle.

  2. Pavaroti dit :

    vraiment baisser (veuillez m’excuser)

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