1500 personnes pour les estimations les plus généreuses, la manifestation de samedi pour la langue et la culture bretonne a été un échec. Mais un échec prévisible. A cela, plusieurs explications :
Le lieu de la manifestation : Rennes est une ville de Haute-Bretagne où l’on a historiquement jamais parlé le breton. Organiser une manifestation pour une langue régionale dans une ville où il n’y a aucun affect pour cette langue, la bataille était perdue d’avance ! Les différentes chapelles du mouvement autonomiste breton avaient saisi le prétexte du statut de capitale administrative pour Rennes afin de justifier ce choix mais la vérité est ailleurs. L’envie de montrer sa force après une rude polémique sur la pertinence des panneaux en breton et des noms inventés en Haute-Bretagne aura été trop tentante. Le résultat est désastreux ! Malgré l’effet de bulle, les militants pour le breton restent essentiellement cantonnés à l’ouest de la Bretagne (Basse-Bretagne) et les bobos rennais ont regardé le défilé avec cet air de mépris qui les caractérise. Au micro, le pauvre Anton Burel, dont les frasques à Cintré (35) avec des Gens du Voyage ont récemment défrayé la chronique, avait beau s’époumoner, les troupes étaient bien maigres sur les grandes avenues rennaises ce samedi.
Si le mouvement breton, Diwan ou associations diverses avaient voulu mobiliser, il n’aurait pas affrété des cars venant de Guingamp ou de Carhaix, il aurait organisé la manifestation précisément à Carhaix ou à Guingamp, là où le potentiel militant est le plus important.
Les commentaires sur les réseaux sociaux et notamment sur les pages des quotidiens concurrents sont catastrophiques ce lundi matin, les lecteurs rappelant à l’envie que Rennes est en plein pays gallo où il existe déjà une langue régionale, le gallo. Mais ça, le mouvement autonomiste breton, très à gauche, ne veut pas l’entendre et navigue en plein « effet bulle » en consolidant son petit jacobinisme à lui.
La mainmise de l’extrême-gauche : qui a envie de venir à une manifestation pour la Réunification de la Bretagne ou pour la langue bretonne dont on sait qu’elle sera gangrenée par les nervis d’extrême-gauche ? La peur de se prendre un mauvais coup pour des patriotes sincères et leurs familles dissuade, en effet, bien des militants. Ce samedi, certains slogans entendus n’avaient strictement rien à voir avec le combat pour la Bretagne : « Palestine vivra », « Siammo Tutti Antifascisti », « Breizh Anticapitaliste » et si on ajoute à cela les drapeaux LGBT, la caricature était complète. Les antifas bretons ont fait le vide autour d’eux. Ils se mobilisent facilement mais font fuir l’immense majorité de la population par leurs outrances, leur aveuglement, leur violence et leur bêtise.
L’isolement des collectifs et associations bretonnes : le roi est nu. Il n’existe plus aujourd’hui de grande association bretonne capable de fédérer, d’entraîner un mouvement collectif alliant le culturel, le linguistique, l’économique et le politique comme fut le CELIB en son temps. C’était d’ailleurs l’un des slogans des manifestants ce samedi : « un Celib pour le breton ». Diwan conserve une bonne image dans l’imaginaire des Bretons mais son accaparement par l’extrême-gauche et une certaine vision wokiste fini par lui nuire.
Un émiettement des bonnes volontés. Là encore, l’extrême-gauche (mais pas que…) montre l’étendue de sa nocivité et de sa capacité à se diviser à l’infini : le mouvement breton est, aujourd’hui, émietté en une myriade de petits partis, chapelles, collectifs concurrents et jaloux les uns des autres, guerroyant dans de perpétuels conflits qui n’intéressent personne : droite contre gauche (à chaque élection, il y a deux ou trois listes nationalistes), extrême-gauche contre le reste du monde, gallo contre breton, association X contre association Y. Il y a quelques années de cela, les deux associations concurrentes s’occupant des cercles celtiques (War ‘l leur et Kendalc’h) avaient fusionné pour devenir Kenleur, on avait cru alors que ce rassemblement en aurait entraîné d’autres. Las ! Au niveau politique, comme au niveau culturel, la désunion fait toujours loi. A l’extrême-gauche, par exemple, il n’existe pas moins de 4 mouvements politique aussi insignifiants les uns que les autres.
Un modèle « tout argent public » qui a montré ses limites. Breizh-Info n’est plus la seule publication à mettre le doigt là où ça fait mal : l’argent public qui coule à flot pour le breton et la culture bretonne, c’est terminé. Le « compromis historique » entre la gauche et le monde de la culture bretonne a vécu. Car il n’y a tout simplement plus d’argent dans les caisses et que le mouvement breton en demande toujours plus. Or, ce n’est pas avec 3% en moyenne dans les urnes que ce même mouvement peut imposer un accroissement indéfini de ses lignes budgétaires avec de l’argent public. Et son refus viscéral, issu du positionnement gauchiste, de solliciter de l’argent privé, l’enferre dans un schéma qui est désormais obsolète.
Malheureusement, ces remarques risquent de rester lettres mortes. La fin de l’émiettement à l’infini, l’arrêt de la mainmise de l’extrême-gauche, une remise en cause de la croyance en l’argent public abondant, la question du recentrage sur la Basse-Bretagne sont des révolutions beaucoup trop douloureuses pour le mouvement autonomiste et culturel breton. Celui-ci continuera à manifester avec toujours moins de manifestants.
Cela n’empêche pas les Bretons d’être intéressés par leurs langues et leur culture, mais cet intérêt et sa pratique se déroulent désormais hors du mouvement breton « officiel ». Comme cela a toujours été plus ou moins le cas, j’en ai bien peur…
M. LB
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3 réponses à “Rennes : Echec de la manifestation pour le breton, il est temps de se remettre en question ! [L’Agora]”
Article helas realiste. Les gauchistes bretons combattent le jacobinisme en demandant des subventions a Bercy.
Le risque d’agression n’est pas négligeable. Lors de la dernière manifestation pour l’unité à Nantes, l’un des organisateurs de Bretagne réunie a été sérieusement blessé par un militant d’extrême-gauche masqué qui réclamait l’expulsion des manifestants du PNB. Il semble que l’enquête de police ait identifié un suspect.
C’est une manière très adroite de tout mettre sur le dos de la gauche, mais cela ne marchera jamais, car ce que vous faites n’est qu’une manipulation de division de PLUS. CQFD. Pas d’accord avec votre argument sur un mauvais choix de la ville de Rennes, il y a 15/20 ans (je ne m’en souviens plus exactement) nous étions 15000 à Rennes.