Charlie Kirk, l’Inquisiteur des campus, et les lamentations d’un monde en ruine

Il faut lire le reportage de Libération sur le « Student Action Summit » de Turning Point USA comme on écoute les sanglots d’un monde qui se défait : celui des rêves émancipateurs de 1968, celui des utopies soixante-huitardes désormais remplacées par des casquettes rouges, des slogans virilistes et des étudiants prônant l’abstinence. Le papier, saturé d’ironie lasse, suinte l’incompréhension, presque la panique, face à une jeunesse américaine qui ne veut plus jouer le rôle assigné de petits soldats du progressisme. En filigrane, on devine que le journaliste Julien Jester ne rapporte pas l’événement : il le subit. Il en devient le chroniqueur mélancolique, témoin de sa propre désuétude, réduit à commenter un carnaval idéologique où ses anciens dogmes sont tournés en ridicule.

Le monde s’inverse sous leurs yeux. Là où ils s’attendaient à trouver des barbus miliciens et des hystériques d’extrême droite, ils croisent des jeunes gens aux cheveux impeccables, polis, organisés, déterminés. Charlie Kirk, le maître de cérémonie, y est décrit avec un mélange d’incrédulité et de fascination : stratège, communicateur, entrepreneur, mentor. À trente et un ans, il orchestre une croisade politique au long cours, méthodique, acharnée, et surtout victorieuse. Rien ne semble plus déranger la presse de gauche que ce détail : Kirk gagne.

Sa stratégie ? Conquérir les campus. Et non pas en catimini, mais à la pointe du glaive de son verbe. Tandis que l’université américaine est devenue le sanctuaire de toutes les doxas progressistes, où l’on distribue des pronoms comme on offrait jadis des bons points, Charlie Kirk entre en scène, sans notes, sans euphémismes, et ferraille à mains nues. Il affronte des cohortes d’étudiants aux cheveux bleus, bardés de slogans, de piercing et de certitudes ; il leur répond non pas avec des cris, mais avec des phrases, non avec des dogmes, mais avec des arguments. Il démonte point par point, calmement, les sophismes à la mode, et réduit bien souvent ses contradicteurs à l’impuissance rhétorique, voire au silence rageur. Ce duel entre la raison désarmante et l’idéologie en panique est filmé, monté, diffusé : les millions de vues parlent d’eux-mêmes.

Le reporter de Libération note, d’un ton où percent l’amertume et le sarcasme, que Kirk séduit. Ce n’est pas faux. Il parle simplement, comme un grand frère. Il promet le mariage, les enfants, la maison. Il dit aux jeunes que leur vie aura plus de sens dans l’enracinement que dans les identités volatiles. Il ne veut pas les « libérer », il veut les rassurer. Le progressisme, lui, leur avait promis le monde ; il leur a laissé des dettes, de la solitude, des psychoses. La contre-offre de Kirk, en apparence conservatrice, est en réalité révolutionnaire : une reconquête du réel, une reprise des repères.

Il faut voir l’inquiétude qui traverse les lignes de Libération. Car cette jeunesse-là, celle des églises pleines, des ceintures ajustées, des traditions assumées, n’était pas prévue dans le logiciel libéral-libertaire. Les enfants de TikTok auraient dû épouser Greta Thunberg, pas Jésus-Christ. Ils auraient dû militer pour le droit à la paresse, non pour le retour de l’honneur. Or les voilà qui acclament la police, conspuent l’avortement, récitent des psaumes, et parlent d’économie avec une aisance que peu d’élus de gauche peuvent égaler. Ils sont nés dans un monde wokiste, et s’en sont détournés. Pire : ils le défient, et triomphent.

Charlie Kirk, dans cette fresque, est la figure centrale, non pas du trumpisme, mais de son avenir. Il n’est pas un nostalgique, c’est un bâtisseur. Son empire idéologique, né sans diplôme ni fortune, pèse aujourd’hui des dizaines de millions de dollars. Il n’achète pas des votes : il forme des militants comme le fait l’IFP d’Alexandre Pesey en France. Il ne fait pas campagne : il instruit une génération. Ceux qui le caricaturent ne font que souligner leur propre impuissance à saisir ce qui se joue sous leurs yeux. Comme aurait dit Ernst Jünger, « le danger n’est pas l’ennemi en face, mais le monde intérieur qui se défait ».

Le reportage de Libération, malgré lui, en est la meilleure démonstration.

Balbino Katz — chroniqueur des vents et des marées —

Photo d’illustration : DR
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3 réponses à “Charlie Kirk, l’Inquisiteur des campus, et les lamentations d’un monde en ruine”

  1. Dédou dit :

    Le bon sens et l’intelligence commencent à renverser les idéologies dangereuses et c’est d’autant plus fabuleux que ce sont les jeunes qui brandissent l’étendard de la révolte conte le wokisme et le progressisme d’extrême gauche.

  2. kaélig dit :

    Ce Charlie Kirk est comme un Jésus Christ venu rappeler à ce monde complètement largué par les lubies sociétales et woke les valeurs traditionnelles de « travail, famille, patrie », mérite, honneur, tant décriées par les auto déclarés « progressistes ».
    ET la jeunesse adhère, tout espoir n’est pas perdu.

  3. Travis dit :

    Rasé de frais, de plus.
    Marre de croiser dans la rue cette engeance de hypster jovial prêt de se convertir avec sa barbe de trois jours…

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