Dans un hexagone en déliquescence, un mouvement breton avance une idée simple, presque révolutionnaire dans sa sobriété : rendre à la Bretagne la maîtrise de son destin. Le collectif Yes Breizh publie Levrig, un manifeste de 72 pages dense, documenté et volontairement pragmatique, qui plaide pour une dévolution progressive des pouvoirs à la Bretagne. Il s’agit ici d’une plateforme, inspirée des modèles gallois, écossais et catalans, et qui vise à replacer les Bretons — tous les Bretons — au cœur de la décision.
Un constat implacable : la centralisation française, un système à bout de souffle
Le livre s’ouvre sur un diagnostic sévère mais lucide : la France vit une crise morale, sociale et institutionnelle d’ampleur. Son ultra-centralisme, hérité du XIXe siècle, a produit un État hypertrophié et inefficace. Yes Breizh y voit une cause directe de la fracture démocratique : abstentions record, colère populaire, perte de repères politiques. « Les Bonnets rouges, les Gilets jaunes… autant de symptômes d’un système devenu illisible », souligne le texte.
Paris capte la majorité des budgets culturels et économiques tandis que les régions productrices, comme la Bretagne, voient leurs priorités reléguées. Le Conseil régional, avec à peine 1,9 milliard d’euros de budget, pèse 25 fois moins que la Bavière et onze fois moins que la Catalogne. Quant à Nantes, toujours séparée administrativement de la Bretagne historique depuis 1941, elle demeure un symbole d’unité inachevée.
La Bretagne, une nation culturelle et civique
Levrig rappelle que la Bretagne a été un État indépendant pendant des siècles avant d’être annexée à la France. Pour Yes Breizh, cette histoire fonde une identité vivante, ouverte et non ethnique : être Breton, c’est participer à un projet commun, pas appartenir à une lignée.
La question de l’immigration et de l’appartenance à la nation Bretonne fera sans doute largement débat : pour les animateurs de Yes Breizh, toute personne installée en Bretagne, si elle en partage les valeurs, devient citoyenne à part entière, avec des droits et des devoirs — notamment celui de contribuer à l’avenir collectif.
Cette conception, qualifiée de « patriotisme inclusif », s’oppose aux visions folklorisantes ou communautaristes. Elle s’inscrit dans une perspective de renouveau, où la culture bretonne (langue, arts, mémoire) devient un levier de cohésion et non de repli.
La dévolution : un chemin breton entre autonomie et indépendance
Yes Breizh emprunte au lexique britannique le terme de « dévolution », apparu dans les lois écossaises et galloises de 1997. L’idée est de transférer progressivement à la Bretagne la compétence de ses propres affaires : fiscalité, logement, agriculture, économie, santé, environnement.
L’État conserverait ses fonctions régaliennes (armée, diplomatie, justice), mais la Bretagne collecterait et gérerait ses ressources selon ses besoins.
Ce processus, insiste le Levrig, ne vise pas la rupture, mais la responsabilité. « Ce n’est pas une opposition entre Paris et Rennes, mais une redistribution saine du pouvoir », résume le texte.
Levrig avance des données précises : la Bretagne n’attire que 3 % des investissements étrangers en France contre 25 % pour l’Île-de-France. Elle ne compte aucune “licorne”, ces start-ups valorisées à plus d’un milliard d’euros, alors que des nations de taille équivalente comme le Danemark ou la Croatie en comptent plusieurs.
Une dévolution des pouvoirs permettrait d’ajuster la fiscalité, de soutenir les filières maritimes, les hautes technologies, les énergies renouvelables et le numérique, tout en limitant la fuite des talents. Le mouvement prône également une politique du logement bretonne — contrôle des loyers, taxation des résidences secondaires — et une approche sociale équilibrée, adaptée à la réalité locale : 60 000 foyers bretons vivent aujourd’hui du RSA.
Langues, culture et éducation : les fondations d’une souveraineté morale
La culture, pilier du projet, incarne le paradoxe d’un territoire riche mais sous-financé. Les budgets culturels bretons équivalent à ceux du seul Opéra de Paris. Yes Breizh propose une politique culturelle ambitieuse :
– faire du breton la langue nationale, du gallo la langue régionale, et maintenir le français comme langue commune ;
– développer une éducation inspirée des modèles scandinaves, axée sur la responsabilité locale ;
– rompre avec le folklore pour renouer avec une création bretonne contemporaine, héritière des Seiz Breur.
Défense, sécurité et gouvernance : une Bretagne responsable
Sur la sécurité, le manifeste propose une approche réaliste : regrouper police et gendarmerie dans un corps breton unifié, sur le modèle de la Garda irlandaise. Les unités stationnées sur le territoire porteraient des insignes bretons, sans rompre avec les structures nationales.
La Bretagne aurait aussi la charge de la prévention contre les cybermenaces, le changement climatique et la désinformation.
Côté gouvernance, le mouvement propose la création d’une Assemblée de Bretagne élue, représentant les cinq départements, et un exécutif chargé d’appliquer les décisions votées localement. Objectif : un référendum sur la dévolution d’ici 2032, puis une révision constitutionnelle pour reconnaître la Bretagne comme collectivité dotée de souveraineté interne, à l’image de la Catalogne ou de l’Écosse.
Cette plateforme (disponible ici) est un texte politique dans le sens noble du terme, une invitation à réfléchir collectivement à ce que pourrait être la Bretagne de demain. Yes Breizh revendique une posture non partisane, s’adressant autant aux autonomistes qu’aux simples citoyens lassés d’un État hypercentralisé.
Le collectif appelle à un engagement populaire : réunions locales, groupes de réflexion, labellisation d’élus favorables à la dévolution. Le mot d’ordre est simple : “Pourquoi pas nous ?”
Le mouvement Yes Breizh entend replacer la Bretagne dans la grande conversation européenne sur la souveraineté régionale. Son Levrig esquisse un futur possible : une Bretagne confiante, économiquement maîtresse d’elle-même, culturellement assumée, et politiquement adulte.
Un projet d’équilibre plutôt que de rupture, mais qui pose une question fondamentale, désormais impossible à éluder : et si la Bretagne était prête à se gouverner elle-même ?
Pour aller plus loin, nous vous invitons à lire par ailleurs notre série « Et si la Bretagne devenait autonome ? ».
Illustration : DR
[cc] Article relu et corrigé (orthographe, syntaxe) par ChatGPT.
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Une réponse à “Yes Breizh : vers une dévolution des pouvoirs pour une Bretagne souveraine de son destin ?”
« toute personne installée en Bretagne, si elle en partage les valeurs, devient citoyenne à part entière ».
Mais quelles sont les « valeurs » de la Bretagne ???
Il est vrai que ce serait difficile de faire pire que le « modèle » français droitdelhomiste universaliste francmaçon jacobin laiciste antifamille et surtout contre Dieu.