La multiplication des maisons à toits plats exaspère certains habitants en Alsace. Au point qu’une association dénonçant ces nouvelles « architectures » va écrire à tous les maires du territoire alsacien.
Alsace défigurée
En Alsace comme ailleurs dans l’Hexagone, les maisons modernes ne respectent que très rarement les codes de l’habitat traditionnel. La prolifération des toits plats venant recouvrir des constructions de formes cubiques en est l’un des marqueurs les plus visibles.
Toutefois, une association entend mettre fin au massacre visuel. Paysages d’Alsace (c’est son nom) compte ainsi rédiger une missive destinée à la totalité des édiles de la région. À savoir que la région administrative d’Alsace a tout bonnement disparu lors de la réforme territoriale de 2014 en se fondant dans une nouvelle région dénommée Grand Est. Ne reste donc plus pour la désigner « officiellement » que les deux départements qui la composaient jadis, c’est-à-dire le Haut-Rhin et le Bas-Rhin.
Le but de Paysages d’Alsace est d’inciter les élus à s’opposer à ces nouvelles « maisons cubes blanches » coiffées de toits plats. L’association est présidée par Antoine Waechter et a été créée en 2010.
Mépris de l’Histoire
Interrogé par un quotidien local, Antoine Waechter précise la démarche : « L’objet « maison cube », moi, je trouve ça moche et froid, mais ce n’est pas là-dessus que nous mettons l’accent. Notre souci concerne la préservation de « l’esprit des lieux ». Un paysage harmonieux est un bien collectif, or ces maisons cubes créent des discordances majeures ».
Un discours lucide mais malheureusement trop peu répandu. Entre les maires n’ayant qu’une vision court-termiste du patrimoine de leur commune en ne pensant qu’aux retombées fiscales et ceux craignant les procès intentés par des propriétaires désirant un toit plat, l’Alsace poursuit sa rapide agonie paysagère.
Ainsi, des blocs de béton semblables à mille autres se multiplient au milieu des habitations pentues. De ces maisons dernière génération, l’ancien candidat à l’élection présidentielle de 1988 en a un avis détonnant :
« Que traduisent-elles au fond, si ce n’est l’individualisme contemporain ? Elles constituent l’aboutissement d’une architecture industrielle dans laquelle rien ne subsiste, sauf la fonction d’habiter et l’affirmation d’un statut social. Quant aux candidats à la construction, savent-ils, de leur côté, que ces maisons sont plus souvent sujettes aux infiltrations que les autres ?
Parade face aux « verrues » ?
Le président de Paysage d’Alsace est formel quant au caractère peu durable de ce mauvais goût en matière de constructions : « Je suis convaincu qu’il s’agit une mode, qui sera passée dans 10 ans. Alors, on les verra pour ce qu’elles sont : des verrues ».
Quant à une éventuelle solution pour enfin mettre un coup d’arrêt au massacre de l’architecture alsacienne, Antoine Waechter considère que les contentieux tant redoutés par les maires peuvent être évités si un règlement municipal d’urbanisme clair est imposé. Quelques villes d’Alsace ont déjà appliqué cette méthode. La survie de paysages conciliant harmonie et respect des traditions est à ce prix.
La Bretagne n’est plus
Et en Bretagne, qu’en est-il ? Là aussi, les toits plats, les maisons cubiques ou aux formes improbables et les toitures en tuile se multiplient. Les maisons en pierre, les murs blancs et les volets bleus ne se retrouvent plus que sur les cartes postales ou entre les mains de quelques amoureux de l’authentique architecture bretonne.
De cette façon, les entrées de nombreux petits bourgs de chez nous ont désormais des airs de zones artisanales avec des habitations aux allures de hangars. Sans oublier des jardins de plus en plus exotiques où palmiers et arbustes pas plus bretons que la maison viennent parachever une rupture totale avec l’habitat traditionnel. Mais, contrairement à l’Alsace, aucune réaction n’a pour l’instant eu lieu.
Crédit photos : Pixabay (CC0/3dman_eu)
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