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Ebola : épidémique depuis un an déjà

La seconde épidémie internationale d’Ebola fait rage depuis un an. Le 18 juillet dernier, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a proclamé l’urgence sanitaire mondiale. Si le bilan est encore loin de la première épidémie de 2013-2014 (11.300 morts en Sierra-Leone, Liberia et Guinée), les attaques à répétition contre les opérations de prévention, la persistance des croyances locales et le risque terroriste islamique contribuent à aggraver les choses à l’est du principal foyer actuel, la République démocratique du Congo.

Au 22 juillet 2019, selon le ministère de la Santé du Congo, on dénombrait 2 592 personnes infectées – dont 2 498 cas confirmés. Depuis le début de l’épidémie, 1 743 personnes sont mortes, 729 ont pu recouvrer la santé.

Les opérations de prévention visant à lutter contre la propagation de l’épidémie ont subi 198 attaques qui ont fait à elles seules 7 morts et 58 blessés. En février dernier, le centre de traitement installé par MSF à Katwa a été brûlé et un homme a été tué. D’autres assaillants ont essayé de mettre le feu au centre de traitement de Butembo, où se trouvaient quinze malades, et ont mitraillé ses murs.

Rumeurs contre médecine

Zangaro Today, un canal Telegram d’information russe sur les pays d’Afrique équatoriale, explique que « la dernière flambée de l’épidémie a fait naître de nombreuses rumeurs paniques et de théories du complot, d’abord tournées contre le gouvernement [central] Il se trouve que le nord-Kivu, lieu du foyer de l’épidémie, est un bastion de l’opposition politique. Ses habitants se méfient des actions des ONG et de l’État, les médecins sont accusés de propager volontairement l’épidémie, les centres de traitement, les médecins et les policiers qui les gardent sont visés par des attaques régulières.

« Les fake news propagées par WhatsApp et les déclarations irresponsables de certains politiques jouent un rôle énorme dans ces attaques. Ainsi, en septembre 2018, le député Crispin Mbindule Mitono a déclaré dans la presse que le gouvernement avait inventé cette maladie pour exterminer la population de la ville de Beni ».

Aiguillonnés par les groupes irrédentistes locaux – dont certains ont fait allégeance à l’Etat Islamique – de nombreux Congolais, au cœur du foyer de l’épidémie, se méfient des institutions et refusent de croire en l’existence de l’épidémie.

Un sondage réalisé en mars dernier auprès de mille personnes dans deux villes du foyer principal de l’épidémie, Beni et Butembo, donne des résultats alarmants : un quart ne croient pas à l’existence d’Ebola, un tiers refusent le vaccin, 36% pensent qu’Ebola a été créée pour déstabiliser le Congo (Zaïre), deux tiers ne font pas confiance aux autorités locales pour endiguer l’épidémie.

En un an, l’épidémie a touché 2 512 personnes et en a tué 1 676, principalement au nord-est de la République Démocratique du Congo. Les localités les plus touchées sont Beni (517 cas confirmés, 328 décès), Katwa (622 confirmés, 431 décès) et Mabalako (353 confirmés, 250 décès) au nord-Kivu, Mandima (193 confirmés, 106 décès) dans l’Ituri.

Des initiatives mondiales

L’Ouganda, touché aussi à la frontière avec le RD Congo, a lancé le 17 juin une campagne de vaccination massive. On comptait alors 96 cas d’infection et deux morts les 11 et 12 juin, puis un troisième. Début juillet le ministère de la Santé de l’Ouganda a annoncé qu’il était venu à bout de l’épidémie dans le secteur de Kasese : « toutes les personnes qui ont été en contact avec des cas confirmés ont achevé la période obligatoire d’observation de 21 jours sans développer des symptômes ou des manifestations de la maladie. Personne n’est en cours d’observation actuellement, ce qui signifie que l’épidémie a été stoppée par les mesures adoptées pour réagir à Ebola ».

Le Congo a connu dix épidémies d’Ebola. La première (1976) a tué 208 des 318 personnes infectées, la seconde (1995), 254 sur 315, la troisième (2007), 187 sur 264. L’épidémie actuelle est la plus meurtrière. Cependant, un vaccin a été mis en application – le rVSV-ZEBOV, mis au point par des scientifiques canadiens. Plus de 100.000 personnes avaient été vaccinées en mai dernier, principalement des travailleurs médicaux ou des proches de victimes de l’épidémie.

De leur côté, les scientifiques russes de Vektor, à Koltsevo près de Novosibirsk, ont annoncé début février dernier que leur vaccin était prêt pour une utilisation de masse, principalement dirigée vers les travailleurs médicaux en contact avec les victimes de l’épidémie. Ce vaccin a été présenté en RD Congo lors d’une conférence mondiale sur la lutte contre Ebola à Kinshasa les 28 et 29 juin derniers ; son exportation vers la République Démocratique du Congo est envisagée.

De son côté, la Chine – qui a des relations économiques et politiques suivies avec l’Ouganda et la RD Congo – y a envoyé des spécialistes et du matériel médical. L’Union Européenne a débloqué 17 millions d’euros pour lutter contre Ebola et sa propagation dans les pays voisins – Ouganda, Sud-Soudan, Rwanda et Burundi.

Bien que l’épidémie sévisse loin des frontières européennes, il s’agit d’un enjeu de santé publique mondial : l’Europe peut être contaminée via les flux touristiques ou migratoires. Et ce même si l’OMS ne recommande pas pour l’heure de dépistage obligatoire des maladies chez les réfugiés ou les migrants pour ne pas créer une « source d’anxiété pour les réfugiés et la communauté au sens large ».

Louis-Benoît Greffe

Crédit photo : [cc BY-SA 2.0] Remise de matériel médical par la MONUSCO (mission de l’ONU en RDC) à la police de Beni
[cc] Breizh-info.com, 2019, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine

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