La Chambre régionale des comptes (CRC) de Bretagne a récemment publié un rapport d’observation sur la Société d’économie mixte locale (SEM) Terre et Toit, anciennement connue sous le nom de SADIV. Ce document met en lumière des améliorations notables dans la gouvernance et la gestion de cette société depuis son précédent contrôle en 2017, mais aussi des défis structurels importants pour assurer sa pérennité dans un contexte de marché et de réglementation en évolution rapide.
Terre et Toit Ille-et-Vilaine est une Société d’Économie Mixte Locale (SEM), anciennement connue sous le nom de SADIV, créée pour répondre aux besoins d’aménagement et de développement territorial du département d’Ille-et-Vilaine. Elle joue un rôle important en tant qu’acteur public dans la promotion de l’habitat, la gestion foncière, et le soutien aux collectivités locales pour la mise en place de projets immobiliers.
Cette société est principalement impliquée dans des opérations d’aménagement urbain et périurbain, facilitant la création de logements, d’infrastructures et de zones d’activité dans le département. Terre et Toit collabore avec les collectivités locales, comme les municipalités et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), pour développer des projets qui s’inscrivent dans une logique d’intérêt public.
Un historique de déficits corrigé grâce à une gouvernance renouvelée
Sous l’impulsion du Département d’Ille-et-Vilaine, la SEM Terre et Toit a renforcé sa gouvernance. À la suite des défaillances de gestion relevées en 2017, la société a entrepris une refonte de sa structure de direction. En 2016, le département est passé de 58 % à 71 % de participation dans l’actionnariat, marquant ainsi un soutien financier important. Désormais présidée par le chef du conseil départemental et dotée d’une direction générale indépendante, la SEM a consolidé la confiance des financeurs, grâce notamment à des documents contractuels plus précis et un suivi plus rigoureux des comptes rendus d’activité.
La SEM Terre et Toit a rétabli la stabilité de ses finances en limitant les pertes de certaines opérations, notamment grâce à l’abandon de projets les plus déficitaires. Cependant, le rapport souligne la fragilité persistante de ses résultats. Alors que le marché de l’immobilier en Ille-et-Vilaine ralentit, la SEM continue de subir une pression concurrentielle, face à une dizaine d’autres acteurs publics et privés bien établis dans la région. En conséquence, son portefeuille de projets reste limité et peine à se renouveler, un enjeu crucial alors que la SEM dépend d’un nombre restreint d’opérations pour générer des revenus.
Les défis de la loi « Zéro Artificialisation Nette » (ZAN)
La loi Climat et Résilience, imposant le « Zéro Artificialisation Nette » (ZAN) d’ici 2050, modifie profondément les perspectives d’activité de Terre et Toit. Historiquement orientée vers l’aménagement d’espaces urbains et périurbains, la SEM doit maintenant envisager des projets de densification, une approche plus complexe et moins rémunératrice que l’étalement urbain. Cette transition vers des opérations plus coûteuses et difficiles à rentabiliser impose une adaptation stratégique pour la SEM, notamment en matière de partenariat et de prospection foncière.
Un point central du rapport de la CRC est l’absence d’une stratégie commerciale clairement définie pour Terre et Toit. Malgré les recommandations de la CRC en 2017, la SEM n’a pas encore établi de plan commercial structuré, ce qui limite sa capacité à capter de nouvelles opportunités d’affaires. Seules des initiatives ponctuelles, comme la création d’un site internet pour la vente de terrains, ont été entreprises. La Chambre recommande donc à la SEM de formaliser une stratégie dès 2024 pour assurer sa pérennité et saisir de nouvelles opportunités sur le marché de l’aménagement.
Bien que Terre et Toit ait amélioré sa gestion de trésorerie depuis 2017, le rapport note que cette stabilité financière repose en grande partie sur des activités de refacturation auprès de la SPL (Société Publique Locale) de construction publique d’Ille-et-Vilaine. Cette dépendance vis-à-vis de la SPL, dont l’activité connaît une croissance, pourrait constituer un risque en cas de réduction des commandes de la SPL. Par ailleurs, la SEM est confrontée à une diminution de ses stocks de terrains et un ralentissement des ventes, ce qui accentue sa vulnérabilité dans un contexte de marché immobilier moins dynamique.
Recommandations pour l’avenir : une stratégie claire pour 2024-2029
Pour faire face à ces enjeux, la CRC émet plusieurs recommandations, dont la principale est l’élaboration d’un plan stratégique pour 2024-2029. Ce plan devrait inclure des objectifs de développement et des moyens concrets pour renforcer l’offre commerciale de la SEM. La CRC encourage également Terre et Toit à renforcer sa politique d’évaluation de la satisfaction client, un levier essentiel pour ajuster ses services aux besoins des collectivités locales et garantir la qualité de ses prestations. Enfin, la Chambre recommande un démarchage plus intensif des communes et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) pour développer de nouveaux partenariats et diversifier son portefeuille d’activités.
Alors que la SEM Terre et Toit a fait des progrès significatifs dans sa gouvernance et sa gestion financière, son avenir dépendra de sa capacité à s’adapter aux défis économiques et réglementaires actuels. La nécessité d’une stratégie claire et proactive, associée à une offre commerciale renforcée, est essentielle pour garantir sa pérennité et maintenir sa mission d’aménagement durable au service des collectivités d’Ille-et-Vilaine.
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