En Bretagne administrative, la précarité énergétique liée au logement touche près d’un ménage sur cinq. Selon une étude récente de l’Insee Bretagne, publiée en avril 2025, 303 000 ménages, soit 20,2 % des foyers bretons, doivent consacrer plus de 9,2 % de leurs revenus pour maintenir un confort thermique minimum dans leur logement. Un chiffre supérieur à la moyenne nationale (17,4 %) et révélateur d’une problématique profonde mêlant fragilité sociale et vétusté du parc immobilier.
Une vulnérabilité marquée dans les territoires ruraux
La situation est loin d’être homogène sur l’ensemble de la région. Si les grandes agglomérations telles que Rennes, Vannes ou Brest affichent des taux relativement faibles, c’est dans les zones rurales, notamment le Centre Bretagne, que la vulnérabilité énergétique est la plus forte. À Carhaix, par exemple, elle concerne plus de 40 % des ménages.
Plusieurs facteurs expliquent cet écart : logements anciens, mal isolés, vastes superficies difficilement chauffables, et forte prévalence du chauffage au fioul, notamment dans les territoires ruraux. Près de 15 % des logements bretons sont encore chauffés au fioul, une proportion supérieure à la moyenne nationale (11,8 %) hors Île-de-France.
Les ménages les plus fragiles en première ligne
La vulnérabilité énergétique touche particulièrement les foyers modestes. Près de 60 % des ménages vivant sous le seuil de pauvreté en Bretagne sont concernés. Les femmes âgées de plus de 75 ans vivant seules, souvent dotées de faibles retraites, sont parmi les profils les plus exposés.
De plus, l’ancienneté des logements est un facteur aggravant : près d’un tiers des habitations construites avant 1948 exposent leurs occupants à cette vulnérabilité, contre moins de 4 % pour les logements construits après 2001.
Le diagnostic de performance énergétique (DPE) est un indicateur clé : plus de 60 % des ménages habitant un logement classé F ou G – les fameuses « passoires thermiques » – sont en situation de précarité énergétique.
Un risque d’aggravation d’ici 2035
La hausse des prix de l’énergie pourrait aggraver la situation dans les années à venir. Selon les projections réalisées par l’Insee, si les prix de l’énergie augmentaient de 20 à 50 % d’ici 2035, la part de ménages vulnérables en Bretagne pourrait grimper jusqu’à 29,4 %, voire plus d’un tiers en cas de hausse plus sévère.
Dans ce scénario pessimiste, la dépense énergétique annuelle moyenne, aujourd’hui de 1 800 €, passerait à 2 700 €, alourdissant encore davantage le fardeau pour les foyers les plus modestes.
La rénovation énergétique : une priorité absolue
Face à cette situation, la rénovation énergétique des logements apparaît comme le principal levier d’action. Deux scénarios sont envisagés :
- Un scénario « tendanciel », prolongeant les politiques actuelles d’aide à la rénovation, permettrait de réduire la part des ménages vulnérables à 17,2 % d’ici 2035.
- Un scénario plus ambitieux, aligné sur la stratégie nationale bas-carbone (SNBC), viserait la rénovation performante de 31 000 logements par an en Bretagne, visant l’étiquette énergétique B. Cela ramènerait la part de ménages vulnérables à seulement 13 %, avec des dépenses énergétiques réduites à 1 500 € par an.
Des mesures réglementaires ont déjà été prises pour inciter à cette amélioration : depuis janvier 2025, la location de logements classés G est interdite, et la vente de logements classés E, F ou G nécessite désormais un audit énergétique obligatoire. Néanmoins, ces mesures sont agressives vis à vis des propriétaires qui, bien souvent, n’ont pas les moyens de mener à bien des travaux de rénovation de plus en plus coûteux.
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