Quand Washington défend la liberté que Paris et Bruxelles bâillonnent
Dans cette époque de confusion où les alliances se font et se défont sans logique apparente, voici que l’on voit surgir du cœur de l’Empire — je veux dire des États-Unis d’Amérique — une main tendue aux Européens rétifs à la censure, une main certes lourde, brutale, teintée d’intérêt, mais que nos droites hexagonales auraient tout intérêt à saisir sans trembler.
Oui, cela heurte les réflexes pavloviens d’une droite française encore engourdie par son antiaméricanisme rance, celui hérité de Maurras, renforcé par la Guerre d’Irak, entretenu par la méfiance à l’égard du melting-pot américain et du règne du dollar. Pourtant, force est de constater qu’aujourd’hui, alors que Paris et Bruxelles s’enfoncent dans le juridisme liberticide, c’est du Département d’État de l’administration Trump, incarné par le sémillant Marco Rubio, que nous vient le plus clair avertissement contre le glissement autoritaire de nos élites dites démocratiques.
Les choses doivent être dites crûment : la France n’est plus, aux yeux des Américains trumpistes, le berceau des droits de l’homme, mais un terrain d’expérimentation pour une technocratie répressive, alliée aux grandes plateformes numériques, hostile à la pluralité d’expression. La récente décision de justice interdisant à Marine Le Pen d’exercer un mandat électif a suscité, à Washington, un émoi que la droite française, trop habituée à son propre asservissement, n’a même pas relevé. On parle là-bas, en haut lieu, d’« atteinte à la liberté politique », de « censure légalisée », de « persécution judiciaire ». Là où nos éditocrates y voient une opération morale, les stratèges de Trump flairent, eux, le lawfare, cet usage politique du droit pour disqualifier un adversaire.
Or cette prise de position ne relève pas du simple commentaire diplomatique. Elle s’incarne désormais dans l’action : création d’un « Office des droits naturels » chargé de surveiller les dérives européennes, restrictions de visas pour les fonctionnaires zélés de Bruxelles, et, plus grave encore pour notre nomenklatura, l’annonce d’une tournée d’inspection de diplomates américains à Paris même.
Qu’on ne s’y trompe pas : cette inquisition d’outre-Atlantique n’a rien d’une lubie. Elle obéit à une logique civilisationnelle. Le jeune Samuel Samson, idéologue en charge du dossier au Département d’État, écrit noir sur blanc que l’Europe occidentale est devenue une zone de non-droit pour les libertés fondamentales, minée par « la censure numérique, la submersion migratoire, les restrictions religieuses ». Le ton est abrupt, presque théologique : on sent poindre l’idée d’un nouvel axe, d’un aggiornamento du monde occidental sur d’autres bases que celles, épuisées, des Lumières rationalistes.
Alors, osons le dire : Jean-Yves Le Gallou, homme de conviction et stratège de longue haleine, aurait tout à gagner à solliciter une entrevue avec le secrétaire d’État américain. Il ne serait point incongru que les jeunes femmes de Nemesis, les penseurs de l’Institut Iliade ou les militants d’Academia Christiana fassent de même, adressant à Washington un message clair : nous aussi, nous sommes les victimes de cette Europe-là, postnationale, censeur bureaucratique de l’âme des peuples. Et si les Droits naturels, dont parlait déjà Thomas Jefferson, peuvent devenir l’arme juridique contre nos propres oppresseurs, alors qu’il en soit ainsi.
Certes, les contempteurs de Trump, ici comme là-bas, n’y verront qu’hypocrisie. Ils nous opposeront le chaos du Capitole, les embardées judiciaires du président américain, les discours à la hache de JD Vance ou de Rubio. Qu’importe. Il ne s’agit pas d’embrasser la politique américaine, mais de faire avec elle ce que fit jadis la vieille diplomatie française : jouer des contradictions de l’Empire pour mieux défendre nos intérêts. Ce n’est pas faire allégeance, c’est faire alliance.
Et puisque nos gouvernants méprisent la liberté de leurs propres citoyens tout en feignant de l’exporter aux confins de la planète, que d’autres, même étrangers, leur rappellent à l’ordre ne saurait être qu’un juste retour des choses. Il n’est pas interdit d’imaginer, d’ici peu, que le gouvernement français doive rendre compte devant le Congrès américain de ses méthodes inquisitoriales. Cela prêterait à rire si la situation n’était pas si grave.
L’Amérique de Trump n’est pas notre modèle, mais elle peut, à l’occasion, devenir notre alliée. Le réalisme, disait Carl Schmitt, est la vertu cardinale du politique. C’est l’heure pour la droite française de troquer l’indignation pavlovienne contre la lucidité stratégique.
— Balbino Katz — chroniqueur des vents et des marées —
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6 réponses à “Chronique transatlantique d’un retournement inattendu”
Afin d’ajouter un élément contextuel supplémentaire à l’article de Breizh Info:
https://www.thegatewaypundit.com/2025/05/state-department-launch-office-remigration-help-accelerate-mass/
traduction du titre : « Le Département d’État va lancer un « Bureau de la Remigration » pour accélérer les expulsions massives »
De nouveau, excellent article!
Par ailleurs, il nous faut faire face à notre médiocrité concernant la liberté. Tant que nous aimons notre petit confort émotionnel plus que la vérité et même jusqu’au dédain de la vérité, nous serons subjugués.
« Si l’on me demande quel est le symptôme le plus général de cette anémie spirituelle je répondrai certainement : l’indifférence à la vérité et au mensonge. Aujourd’hui, la propagande prouve ce qu’elle veut, et on accepte plus ou moins passivement ce qu’elle propose. Oh ! sans doute, cette indifférence masque plutôt une fatigue, et comme un découragement de la faculté de jugement. Mais la faculté de jugement ne saurait s’exercer sans un certain engagement intérieur. Qui juge s’engage. L’homme moderne ne s’engage plus, parce qu’il n’a plus rien à engager. »
La liberté pourquoi faire? (1953) de Georges Bernanos.
Alexandre SOLJENITSYNE : »Vous, en Europe, vous êtes dans une éclipse de l’intelligence. Vous allez souffrir. Le gouffre est profond. Vous êtes malades. Vous avez la maladie du vide. Le système occidental va vers son état ultime d’épuisement spirituel : le juridisme sans âme, l’humanisme rationaliste, l’abolition de la vie intérieure…Toutes vos élites ont perdu le sens des valeurs supérieures. Elles ont oublié que le premier droit de l’homme, c’est le droit de ne pas encombrer son âme avec des futilités… Cependant, le gouffre s’ouvrira à la lumière. De petites lucioles dans la nuit vacilleront au loin. Il y aura des hommes qui se lèveront, au nom de la vérité, de la nature, de la vie. Ils exerceront leurs enfants à penser différemment, à remettre l’esprit au-dessus de la matière. Ils briseront la spirale du déclin du courage. Ainsi viendra l’éclosion des consciences dressées. Aujourd’hui les dissidents sont à l’Est, ils vont passer à l’Ouest. »
La liberté n’est pas la possibilité de faire ce que l’on veut. D’abord parce que cette définition est faible du point de vue philosophique: vouloir étant une action, d’où vient la liberté s’il s’agit d’une action venant d’une autre action? Ensuite, si telle était la définition, nul ne serait libre, en effet, je peux vouloir passer au travers d’un mur, vivre au temps de Jules César ou voler comme un oiseau, je n’en serai jamais capable.
La liberté c’est la capacité d’agir de manière à atteindre la perfection de ce que l’on est dans les temps et lieux où nous sommes, ce qui implique nécessairement la perfection de nos relations, et donc tenir compte des autres pour l’atteindre en fait partie!
Aussi, tenons compte, non seulement des USA de Trump, mais de bien d’autres tenants de la vérité et de la liberté que l’on trouve partout sur la Terre et qui ne seraient que très heureux de nous aider.
Euh !!! Voilà qui mérite un sérieux bémol.
La France envisagée comme le « Berceau des Droits de l’Homme », c’est de la pure désinformation franchouillarde !
– Le Bill of Rights date des années 1688-1689 à Londres et fut l’ébauche de :
– La Proclamation des Droits de l’Homme, présentée en introduction à l’élaboration de la Constitution des 13 États Unis d’Amérique anglophone, par Thomas Jefferson, en 1776
… que Jefferson ait été un planteur esclavagiste (assez libéral et père d’un mulâtre) ne change rien à l’affaire : la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen des révolutionnaires français de 1789 est exactement calquée sur celle de Jefferson
Et on a vu le résultat dès 1792 !!!
Les USA nous rappellent simplement leur droit de primogéniture !
Et l’on se désole que la Grande-Bretagne ne soit plus le pays de la Liberté d’expression.
Le Covid a été un révélateur de l’anesthésie des consciences. L’absence de vérité, le déni politique les mensonges officiels ne dérangent plus personne….dormez braves gens, on s’occupe de vos pensées! L’Amérique est obligée de nous rappeler les droits fondamentaux de la liberté d’expression et de la liberté au sens large. Pauvre France qui vit encore sur une image d’ Epinal obsolète. Sans être un fana de Trump, on est obligé de reconnaître que tous ces reproches ne sont, hélas, que le reflet d’un pays qui se décompose….
Excellent article de Balbino Katz, auquel s’ajoute une analyse claire et nette quant à la situation actuelle des USA vis-à-vis de l’Europe en general, et de la France en particulier.
Tout cela est fort bien mais je ne reçois plus Breizh Info.