Jamais dans l’histoire moderne de l’Irlande, les rues du pays n’avaient autant résonné du cri d’alarme d’un peuple inquiet pour son avenir. Samedi, des milliers d’Irlandais ont convergé vers Dublin pour dénoncer les conséquences dramatiques de l’immigration de masse sur leur mode de vie, leur sécurité et leur souveraineté. Ce qui n’était encore, il y a quelques années, qu’un murmure étouffé dans les pubs ou les campagnes, est devenu un cri de révolte assumé : “Ireland is Full”, “Irish homes for Irish people”, “Protect Our Heritage”. « Send them home ».
De mémoire de journaliste, jamais la République d’Irlande n’avait connu une telle fréquence de manifestations sur cette thématique, preuve qu’un seuil critique a été atteint. Et ce n’est plus seulement une affaire de partis ou de slogans : dans les cortèges, on rencontre désormais de tout. Des familles, des travailleurs, des retraités, des républicains du sud, des unionistes du nord. Tous unis par une même angoisse : celle de disparaître chez soi. Nous avons pu interroger certains de ces manifestants.
La nation déborde, les citoyens étouffent
Officiellement, 141 600 personnes ont immigré en Irlande entre avril 2022 et avril 2023, soit le plus haut chiffre enregistré depuis 16 ans. À cela s’ajoute l’installation précipitée de milliers de demandeurs d’asile dans des hôtels, des logements sociaux, voire des infrastructures touristiques réquisitionnées par l’État, souvent dans des villages sans ressources adaptées.
Thousands marched in Dublin today to protest mass-immigration 🇮🇪
Remigration! pic.twitter.com/gey4oBFMo2
— Keith Woods (@KeithWoodsYT) June 22, 2025
IRISH RISING: Here is a drone view of the thousands that came out here in Dublin, Ireland, to protest against mass immigration. @RebelNewsOnline pic.twitter.com/JzaOei9MeT
— Efrain Flores Monsanto 🇨🇦🚛 (@realmonsanto) June 22, 2025
« Je suis guide touristique dans le Connemara depuis vingt ans« , raconte Bríd, 48 ans, venue manifester depuis Galway. « Cet été, on a annulé deux circuits car il n’y avait plus une seule chambre d’hôtel disponible pour les visiteurs. Les hôtels sont réquisitionnés pour loger des migrants. Résultat : les agences de voyages tournent le dos à l’Irlande. Notre économie touristique s’effondre en silence. »
Ce constat est désormais généralisé, même dans les grandes villes. À Dublin, les loyers atteignent des sommets inédits, avec une moyenne supérieure à 2 000 € par mois pour un simple deux-pièces. Une situation intenable pour de nombreux jeunes Irlandais qui n’ont d’autre choix que de rester chez leurs parents ou de s’exiler à l’étranger.
« J’ai 29 ans, je travaille dans un hôpital public, et je ne peux pas me loger », s’indigne **Sean, infirmier à Limerick. « On me propose une colocation à 850 € la chambre, pendant que l’État paie des chambres d’hôtel à 100 € la nuit pour des étrangers qui ne travaillent pas. C’est insupportable, humiliant, et cela alimente une colère sourde. »
L’insécurité, nouveau tabou irlandais
Longtemps perçue comme l’un des pays les plus sûrs d’Europe, l’Irlande bascule aujourd’hui dans l’inconnu sécuritaire. Émeutes à Dublin, agressions au couteau dans des quartiers autrefois paisibles, tensions communautaires dans certaines écoles : les faits divers s’accumulent, souvent tues ou minimisés par une presse sous influence.
« Ma fille a été harcelée dans le tramway par un groupe de jeunes hommes qui ne parlaient même pas anglais« , témoigne Aoife, 40 ans, mère de famille de Cork. « Elle n’a rien osé dire, par peur tout simplement. Voilà où on en est : nos enfants ont peur, et l’État nous fait taire. »
En novembre 2023, l’agression au couteau d’enfants par un ressortissant étranger à Dublin avait déjà provoqué une onde de choc. Mais les manifestations qui avaient suivi avaient été décrites comme « d’extrême droite » par le gouvernement et certains médias, au lieu d’être reconnues comme le reflet d’une angoisse nationale.
Une union sacrée inattendue : des républicains du sud et des unionistes du nord main dans la main
Parmi les éléments les plus surprenants de la mobilisation, figure la présence de militants venus d’Irlande du Nord, à la fois républicains catholiques et unionistes protestants. En tête de cortège, certains brandissaient fièrement la croix de Saint-André ou la harpe celtique, comme un message d’unité transfrontalière au nom de l’identité irlandaise – qu’elle soit britannique ou gaélique.
« Je suis unioniste, loyal à la Couronne, mais je ne suis pas aveugle« , déclare Gareth, 55 ans, originaire de Ballymena, dans le comté d’Antrim. « Ce que vit la République, c’est exactement ce que nous connaissons à Belfast : déferlante migratoire, explosion de la criminalité, perte de repères. Si nous ne nous unissons pas, nord et sud, nous disparaîtrons tous. »
Ces alliances improbables traduisent un basculement majeur : la question identitaire prime désormais sur les clivages traditionnels, et l’urgence dépasse les anciennes querelles de clocher.
Bien sûr, les tentatives de discrédit n’ont pas tardé. La presse dublinoise s’est empressée de braquer les projecteurs sur la présence d’un ancien loyaliste nord-irlandais controversé, Mark Sinclair, cousin d’un membre des tristement célèbres Shankill Butchers.
Mais les organisateurs de la manifestation ont rapidement pris leurs distances : « Nous ne connaissions pas cet homme. Il n’a joué aucun rôle dans notre organisation. Les médias l’ont exhumé pour nous salir« , a réagi Malachy Steenson, figure des rassemblements patriotiques.
Derrière ce procédé classique de disqualification par association douteuse, de nombreux Irlandais voient un écran de fumée : pendant qu’on parle de Sinclair, on ne parle pas des faits, des chiffres, de la réalité vécue.
Dans les rues de Dublin, malgré la présence d’un cordon policier séparant manifestants et contre-manifestants d’extrême gauche, aucun incident notable n’a été signalé. La marche s’est déroulée dans le calme, dans la dignité, avec des discours appelant à une mobilisation durable, pacifique, mais inflexible. « Ce n’est que le début », prévient **Máire, étudiante en droit. « Si le gouvernement continue à nous mépriser, il y aura des rassemblements chaque mois. Ils ne peuvent plus cacher la réalité. L’Irlande est en train de basculer. »
Today is a great day for Ireland! Long live the Gaels and REMIGRATION! 🍀🇮🇪 pic.twitter.com/LGdxaIGbSn
— Voxeuropa Herald (@VoxEuropaHerald) June 22, 2025
Déjà, des collectifs se mettent en place dans plusieurs villes de province, notamment à Waterford, Killarney, Navan, et même dans le Donegal. Les affiches “Ireland is Full” se multiplient. Sur les réseaux sociaux, des vidéos de la manifestation atteignent des centaines de milliers de vues. L’appel à une « nouvelle insurrection patriotique » résonne dans les esprits.
L’Irlande, autrefois chantre du cosmopolitisme européen, semble vivre une prise de conscience brutale et tardive. Ce qui se joue actuellement sur l’île verte dépasse largement le cadre irlandais : c’est le miroir grossissant d’une Europe confrontée aux limites de l’ouverture sans limites, où les peuples se lèvent pour défendre ce qui leur reste.
La mobilisation massive de ces derniers mois — inédite dans l’histoire contemporaine de l’Irlande — est plus qu’un signal : c’est une alarme rouge. Ignorée, elle pourrait déboucher sur un véritable séisme politique. Reste à savoir si les dirigeants irlandais auront l’intelligence d’écouter avant qu’il ne soit trop tard. Car si l’Irlande s’est libérée par les armes il y a un siècle, en 1916, avec au départ une petite minorité de révolutionnaires, rien ne dit qu’une partie de la population ne soit pas tentée de le faire une seconde fois face à des dirigeants sourds, aveugles, et dangereux.
YV
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