La police nord-irlandaise (PSNI) est inquiète après la décision controversée de retirer un bûcher loyaliste (bonfire) érigé dans le quartier de Donegall Road, à South Belfast, sur un terrain privé du Broadway Industrial Estate. Ce bûcher, comme chaque année à l’approche du 11 juillet, date symbolique de la bataille de la Boyne pour les unionistes, est destiné à être brûlé dans le cadre des commémorations orangistes.
Mais cette fois, la présence de matériaux contenant de l’amiante et la proximité avec un poste électrique alimentant des hôpitaux majeurs de la ville ont poussé le conseil municipal de Belfast, réuni à huis clos, à ordonner son retrait immédiat via un prestataire privé.
La décision a été soutenue par Sinn Féin, l’Alliance, les Verts et le SDLP. Le DUP, principal parti unioniste, s’y est opposé.
Avertissements des paramilitaires loyalistes
En réponse, plusieurs groupes paramilitaires loyalistes de South Belfast ont publié un communiqué conjoint prévenant que toute tentative de démantèlement du bûcher entraînerait un « désordre grave et prolongé » dans la ville, et potentiellement des émeutes coordonnées dans d’autres quartiers sensibles de l’Irlande du Nord.
Ces menaces rappellent que le conflit communautaire nord-irlandais, loin d’être éteint, reste à fleur de peau. Le PSNI a convoqué une réunion d’urgence avec les autorités locales, les services de santé, et l’Agence de l’Environnement (NIEA) afin d’évaluer les risques – non seulement sanitaires, mais surtout sécuritaires.
Le bûcher, érigé à quelques mètres d’un poste électrique alimentant le Royal Victoria Hospital et le City Hospital, pose en effet un risque d’incendie et de coupure de courant. L’opérateur Northern Ireland Electricity a déjà dû mettre en place des mesures d’urgence : mise hors tension de transformateurs, installation de protections métalliques autour des câbles et des équipements sensibles.
Le Belfast Health Trust, en charge des hôpitaux, s’est dit mobilisé pour prévenir tout impact sur les soins aux patients.
En arrière-plan, le clivage unionisme/républicanisme
La polémique a pris une tournure politique, avec Sinn Féin, par la voix du député Pat Sheehan, dénonçant « l’inaction et la lâcheté du leadership unioniste » face à ce qu’il qualifie de « danger sanitaire et sécuritaire ». Il interpelle directement Emma Little-Pengelly, élue unioniste de la région, accusée de fuir ses responsabilités.
Du côté unioniste, la position reste plus discrète. Le DUP, qui considère ces bûchers comme une expression culturelle légitime, redoute probablement une perte de contrôle si les jeunes loyalistes, souvent proches des milieux paramilitaires, se sentent attaqués sur leur propre terrain.
Ces dernières années, les tensions communautaires à Belfast, bien que moins visibles, n’ont jamais complètement disparu, et chaque été, autour des feux orangistes, le risque d’embrasement est réel.
Cette affaire illustre la fragilité du processus de paix en Irlande du Nord, mais aussi la difficulté des autorités locales à concilier ordre public, sécurité sanitaire et respect des traditions culturelles, dans un contexte où chaque geste est lu à travers le prisme identitaire.
Crédit photo : breizh-info.com (TDR)
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