Une récente étude de l’université Gisma, basée à Potsdam, dresse un constat implacable : dans quasiment tous les pays de l’Union européenne, le salaire minimum légal ne permet pas de couvrir les dépenses de base, y compris pour une personne seule. Seule la Belgique échappe à cette réalité inquiétante. Une démonstration de plus de l’écart croissant entre discours politique et conditions de vie réelles, dans une Europe qui promet l’équité mais entretient les désillusions.
Des travailleurs à temps plein dans le rouge
L’analyse repose sur la comparaison entre les salaires nets (minimum et moyens) et le coût de la vie dans chaque pays de l’UE. En prenant pour base un emploi à temps plein (40 heures/semaine), le constat est accablant : dans 25 pays sur 26 disposant d’un SMIC, le revenu minimum ne permet pas de subvenir aux besoins fondamentaux (logement inclus).
Le cas le plus extrême est celui de Chypre, où le déficit mensuel pour une personne seule atteint 915 €. La République tchèque (–803 €), Malte (–796 €) ou encore l’Allemagne (–354 €) suivent. Même dans les pays dits « riches », le salarié au SMIC reste en difficulté pour payer son loyer, se nourrir et assumer les frais courants.
Les familles encore plus exposées
Lorsqu’on élargit l’analyse à une famille de quatre personnes (deux adultes actifs et deux enfants), la situation devient franchement critique. Même en Belgique, présentée comme la meilleure élève, le couple touchant chacun le SMIC cumule encore un déficit de 768 € par mois. Aux Pays-Bas, on tombe à –1 292 €, en Espagne à –1 615 €, tandis que Chypre plonge à –3 050 €.
Ces chiffres n’incluent aucune aide sociale, afin de refléter uniquement le pouvoir d’achat réel d’un ménage actif. Une manière de pointer le décalage entre le mythe du travail comme ascenseur social et la réalité d’une précarité persistante, même pour les foyers doublement salariés.
Des inégalités marquées entre pays
L’étude ne se limite pas aux seuls bas salaires. En prenant les revenus moyens nets, la situation s’améliore mais reste contrastée. Si les pays nordiques comme le Danemark (+1 882 €) ou la Suède (+1 728 €) offrent un reste à vivre confortable pour une personne seule, le Portugal, Malte ou la Grèce affichent encore un déficit mensuel, même pour les classes moyennes.
Pour les familles, la fracture est encore plus nette : dans 16 pays de l’UE, le revenu moyen ne suffit toujours pas à couvrir les charges de base. Le Portugal, encore une fois, ferme la marche avec un trou mensuel de 1 339 €.
EU comparison of minimum wage (net) with cost of living/rent for a single person (2025)
1 | Belgium | 951,80 € | 848,58 € | 1800,38 € | 1959,00 € | 158,62 € |
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2 | Netherlands | 1013,50 € | 1379,14 € | 2392,64 € | 2257,00 € | −135,64 € |
3 | France | 947,50 € | 770,80 € | 1718,30 € | 1426,00 € | −292,30 € |
4 | Germany | 1002,30 € | 889,87 € | 1892,17 € | 1538,00 € | −354,17 € |
5 | Greece | 796,90 € | 476,40 € | 1273,30 € | 866,00 € | −407,30 € |
6 | Spain | 718,60 € | 920,43 € | 1639,03 € | 1198,00 € | −441,03 € |
7 | Romania | 606,60 € | 425,54 € | 1032,14 € | 503,00 € | −529,14 € |
8 | Luxembourg | 1077,90 € | 1688,10 € | 2766,00 € | 2232,00 € | −534,00 € |
9 | Ireland | 996,40 € | 1576,28 € | 2572,68 € | 2034,00 € | −538,68 € |
10 | Poland | 706,30 € | 687,66 € | 1393,96 € | 840,00 € | −553,96 € |
11 | Slovenia | 811,00 € | 708,36 € | 1519,36 € | 926,00 € | −593,36 € |
12 | Lithuania | 756,90 € | 621,73 € | 1378,63 € | 777,00 € | −601,63 € |
13 | Bulgaria | 612,70 € | 421,77 € | 1034,47 € | 427,00 € | −607,47 € |
14 | Latvia | 811,40 € | 421,86 € | 1233,26 € | 623,00 € | −610,26 € |
15 | Hungary | 640,20 € | 491,12 € | 1131,32 € | 479,00 € | −652,32 € |
16 | Croatia | 754,60 € | 654,96 € | 1409,56 € | 753,00 € | −656,56 € |
17 | Slovakia | 745,20 € | 616,28 € | 1361,48 € | 664,00 € | −697,48 € |
18 | Estonia | 898,00 € | 619,61 € | 1517,61 € | 810,00 € | −707,61 € |
19 | Portugal | 685,30 € | 934,92 € | 1620,22 € | 903,00 € | −717,22 € |
20 | Malta | 775,80 € | 981,79 € | 1757,59 € | 961,00 € | −796,59 € |
L’Allemagne, exception et terre d’attraction
Dans ce paysage morose, l’Allemagne s’en sort bien. Avec un excédent de 1 338 € pour une personne seule au revenu moyen, et 1 391 € pour une famille, le pays fait figure d’eldorado économique – ce que l’université Gisma ne manque pas de souligner pour attirer étudiants et professionnels internationaux.
Selon le président de l’établissement, le professeur Ramon O’Challaghan, ces résultats montrent que le véritable levier d’ascension sociale réside dans la formation qualifiante, permettant d’accéder à des postes mieux rémunérés. En d’autres termes : l’Europe de l’Est et du Sud offre les galères, l’Allemagne offre les débouchés.
Ce rapport met en lumière l’échec d’un projet européen prétendument social. Malgré l’harmonisation des règles, les écarts entre pays sont béants. Pire : travailler à temps plein ne suffit plus à vivre dignement, sauf à émigrer dans les rares zones économiquement solides. L’idée même de convergence européenne se fissure, laissant place à une Europe à deux vitesses, où seuls les plus mobiles ou les plus qualifiés peuvent espérer s’en sortir.
Ce constat pose une question fondamentale : à quoi sert un salaire minimum, s’il ne permet pas de vivre ? Et surtout, combien de temps les travailleurs européens accepteront-ils de jouer le jeu d’un modèle qui les condamne à la survie plutôt qu’à la vie ?
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5 réponses à “Europe sociale en trompe-l’œil : dans presque tous les pays de l’UE, le salaire minimum ne suffit pas pour vivre”
Vous prétendez que dans la majorité des pays d’Europe, « »le salaire minimum légal ne permet pas de couvrir les dépenses de base, ni de vivre » »
Je pose la question idiote : Alors comment font-ils tous les migrants à nos portes qui s’infiltrent chez nous (Sans le plus petit papelard administratif, et sans la moindre opposition) et perturbent d’une façon inconsidérée notre vie quotidienne ???
Ces statistiques ( l’ Italie oubliée ? ) ne concernent que des gens qui travaillent et donc n’ont droit à aucune aide de l’ Etat. Au contraire des inactifs involontaires ou volontaires comme les migrants à qui il faut trouver un logement, les nourrir, les soigner gratuitement, transports offerts etc…Les braves gens qui bossent sont les dindons de la farce et personne ne pleure sur leur sort mieux vaut réserver les larmes aux envahisseurs sans papiers !
« L’Europe s’enfonce dans la pauvreté. L’horreur économique accentue le désespoir. Et le désespoir pousse au suicide. Avec le chômage endémique, l’angoisse s’installe… » extrait d’un petit livre qui en dit long sur les perspectives de l’Europe pour une génération perdue « les corps indécents ». Nos jeunes gens se trouvent confrontés à des difficultés économiques difficilement surmontables du simple fait que l’Europe n’a pas d’énergie, peu d’industries et presque pas de matières premières. Avec en plus une immigration massive extra-européenne qui n’adhère pas au pays d’accueil. Alors l’exil comme seule planche de salut ?
A 18h ,,je constate tres peut de pouces aux commentaires ,,inquiétant ,Si popu se satisfait de la situation ,,no comment ,Ne feront pas les surprits lors de l apotheose ,,,
Face à ce constat accablant résultant aussi bien des données économiques et financières catastrophiques, quoi d’étonnant à ce que des dirigeants aux abois n’envisagent plus que le chaos comme issue au bourbier dans lequel ils ont contribué à nous enfoncer ? L’acharnement à nous entraîner par tous moyens dans la guerre est symptomatique de cette impuissance annonciatrice d’un désastre de grande ampleur. Pour vous en convaincre, suivez, si ce n’est pas au-dessus de vos forces, le prochain discours de Napoléon à petites pattes qui veut absolument une nouvelle campagne de Russie pour redorer son blason terni.