Alors que les médias français ont une nouvelle fois relayé des accusations polémiques contre le chanteur croate Marko Perković, dit Thompson, à l’occasion de son concert géant à Zagreb le 5 juillet 2025, le Conseil Représentatif des Institutions et de la Communauté Croates de France réagit fermement. Dans un communiqué sans concession, signé du professeur Marc Gjidara, l’organisation démonte point par point ce qu’elle qualifie de campagne de désinformation menée par des nostalgiques du régime communiste yougoslave.
Voici le communiqué reproduit par nos soins ci-dessous.
Encore une fois l’AFP, et cette fois Figaro International, relayent, sans vérification ni nuance, la campagne de dénigrement venue de Zagreb, visant le chanteur Marko Perkovic dit « Thompson », à l’occasion du méga-concert qui a rassemblé un demi-million de spectateurs payants (504.000 exactement) et sans doute des dizaines de milliers d’autres, puisque les trois opérateurs croates ont annoncé qu’il y avait 580.000 portables qui fonctionnaient durant le concert, et qui retransmettaient souvent le spectacle pour les absents.
Qui sont en Croatie ces milieux qui sont toujours à l’origine des menées hostiles à cet artiste adulé dans son pays et dont l’auditoire samedi soir 5 juillet comprenait plus d’un tiers de jeunes de moins de 27 ans selon certaines informations ? Il s’agit de gens qui en fait n’ont jamais accepté l’accession de la Croatie à l’indépendance et qui, contre leur propre pays, ont soutenu l’agression extérieure, une guerre de conquête et de nettoyage ethnique, qui s’est heurtée à la résistance héroïque et finalement victorieuse d’un peuple uni (95% de suffrages pour l’indépendance). Cette résistance populaire incluait aussi toutes les minorités ethniques présentes sur son sol, y compris les Serbes loyalistes (10.000 sous les armes), mais aussi des Hongrois, des Tchèques, des Slovaques, des Albanais, des Bosniaques, des Roms, des Italiens et d’autres encore.
Qui entretient ce procès en fascisme et en nazisme dirigé contre Marko Perkovic dit « Thompson », à partir de fake news, de mensonges, de manipulations politiciennes et d’allégations infondées jamais réellement prouvées ? Ce sont des nostalgiques de l’ancien régime totalitaire yougoslave et communiste, des zélateurs du maréchal président à vie, Tito, 3ème plus grand massacreur en Europe après Staline et Hitler. Ces anciens Nomenklaturistes (et leurs progénitures), adversaires de l’Etat croate actuel, n’aiment pas qu’on leur parle du Pacte Ribbentrop-Molotov, ni qu’on leur rappelle que les adversaires de l’Etat croate sous régime oustachi ont collaboré avec les armées fascistes mussoliniennes présentes sur le sol croate, ni que l’on mentionne les goulags titistes (dont Goli Otok – l’île nue), la centaine d’assassinats de dissidents exécutés à l’étranger par les services spéciaux yougoslaves entre 1945 et 1989. Les quelques « historiens » de pacotille qui alimentent à jet continu ces campagnes mensongères et diffamatoires, ne parlent jamais, dans leurs travaux de militants (plus que de scientifiques) des horreurs commises par la dictature communiste yougoslave et ignorent les sources documentaires qui les gênent.
Quand on dit et que l’on propage, que ce chanteur est « controversé », il convient de préciser par qui il est contesté ; car l’immense majorité des Croates, les jeunes en particulier, entendent plutôt les propos du chanteur célébrant l’amour, la patrie, la famille, la foi en Dieu, sentiments ignorés de ses détracteurs. À preuve, les images projetées dans le ciel de Zagreb au moyen de drones, qui représentaient la sainte croix, la Vierge Marie, le chapelet, les anges et pas du tout ce qui pouvait rappeler un régime dans lequel les Croates et les jeunes générations ne se reconnaissent pas, tout en affirmant leur amour pour leur patrie et son peuple. Personne ne dit qu’avant son concert, et à l’initiative d’un de ses accompagnateurs à la guitare, Marko Perkovic dit « Thompson » a prié avec son équipe pour les spectateurs, pour le bon déroulement du spectacle. Pourquoi cacher qu’il a salué son public en reprenant la formule ancestrale croate : « Loués soient Jésus et Marie ».
En ce qui concerne les prétendus « emblèmes oustachis », il n’y en a aucun aux concerts de cet artiste, où l’on brandit un drapeau national avec un damier vieux de plusieurs siècles, qui n’appartient à aucun régime passé, et que même le régime communiste a dû « tolérer ». Quant au salut « Za Dom Spremni » (Prêts pour la Patrie), c’est le salut que partageaient les militaires croates pendant la guerre que la Croatie a dû affronter dans les années 1990, pour rassembler et encourager au combat les soldats qui défendaient leur pays. Une objectivité élémentaire et l’exactitude historique rigoureuse auraient consisté à rappeler la différence avec le salut en vigueur sous le régime oustachi, qui était le suivant : « Za Dom i Poglavnika Spremni » (Pour la Patrie et le Poglavnik, Prêts). C’était là aussi, et peut-être surtout, un serment de fidélité à un homme et au chef. Cela est complètement étranger à ceux qui aujourd’hui se réclament de ce salut à la Patrie et à elle seule, comme dans tout autre Etat démocratique. D’ailleurs, cette devise (remontant à 1684, reprise en 1932 puis en 1941 dans une version modifiée, réapparue dans sa version originale en 1991) a été légalisée et validée par le ministère de la justice d’un gouvernement de gauche (soutenu par le SDP ex-parti communiste) et n’a jamais été officiellement interdite. Pour ce qui est des mots « Za Dom » qui figurent en ouverture de la chanson « Bojna Cavoglave » (Le bataillon de Tchavoglavè), ils ont été jugés et déclarés légitimes et légaux par les tribunaux croates, car intégrés au texte dans le contexte de guerre, qu’il convient de respecter. Il en va de même de l’inscription « Za Dom Spremni » figurant sur les uniformes de certaines unités combattantes.
Contrairement à ce qui est faussement prétendu, la chanson « Bojna Cavoglave » n’incite pas à « tuer » expressément les « Serbes », mais à repousser les envahisseurs qui assiégeaient un village défendu par ce chanteur et ses camarades, combattants volontaires. Pour être tout à fait précis, il ne s’est pas lui-même et de sa propre initiative adjoint le surnom de « Thompson », du nom de la vielle arme qui était la sienne et dont d’ailleurs il se plaignait des défectuosités. La genèse de ce surnom est plus prosaïque. En effet, comme le bataillon comprenait plusieurs défenseurs répondant au prénom de « Marko », ses compagnons ont décidé de l’identifier ainsi ; « c’est le Marko qui porte une Thompson ». Et cela lui est resté. Quant aux autres paroles de cette chanson écrite au moment des combats pour motiver la troupe, elles sont infiniment moins violentes et crues que celles du « Chant des partisans » en France, qui appelle les camarades à « tuer à la balle et au couteau, à la bombe et à la grenade ». Donc il n’y a pas là matière à de stupides élucubrations, et c’est dans une totale mauvaise foi que l’on stigmatise cette chanson. Faut-il rappeler qu’une autre chanson passée à la postérité, intitulée « Ljepa li si » (Que tu es belle) est quasiment devenue un hymne officieux, à côté de l’hymne officiel « Ljepa nasa Domovino » (Notre belle Patrie), qui dans un registre plutôt écologique, évoque surtout les beautés naturelles du pays, loin des propos guerriers de notre « Marseillaise » que notamment les supporters français affectionnent.
À quelques semaines d‘intervalle, ceci est le deuxième communiqué du Conseil Représentatif des Institutions et de la Communauté Croates de France, publié précédemment en réponse aux mêmes attaques malveillantes et mensongères, reprises par l’AFP puis par certains médias il y a peu, et émanant des mêmes milieux identifiés ci-dessus. Ceux-ci persistent dans leurs campagnes de dénigrement et diffamatoires, se contentant d’allégations, sans jamais articuler des faits matériels, précis et circonstanciés. Il serait souhaitable que nos médias français puissent se montrer plus circonspects à l’avenir dans leur travail d’information au service de la vérité. Ils pourraient ainsi mentionner, par exemple, que Marko Perkovic dit « Thompson » a adressé un appel et un message à l’Europe, l’invitant à ne pas renoncer à ses racines. Car cet artiste est un partisan convaincu de l’Europe réunie et pacifique, mais d’une « Europe des patries », comme beaucoup en France et sur notre continent. Faut-il rappeler que c’est la conception qu’avait le général de Gaulle de l’Europe ?
Marc Gjidara
Président du C.R.I.C.C.F.
Professeur émérite de l’Université de Paris – Assas,
En charge des partenariats interuniversitaires franco-croates