On feint de s’indigner. À Paris, le ministre tonne, les tribuns s’agitent, les éditorialistes du Figaro convoquent l’honneur bafoué de Jacques Delors, et l’on fait mine de découvrir que l’Europe, soudain, serait vassalisée. Pourtant, chacun savait que ce moment viendrait. Le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche n’a pas seulement relancé le commerce transatlantique, il en a redéfini unilatéralement les termes, sous la menace, le chantage et un sourire carnassier. À l’ombre du club de golf de Turnberry, l’Union européenne, conviée à comparaître plus qu’à négocier, a signé ce que d’aucuns appellent déjà sa capitulation économique, un Munich des porte-feuilles.
Ce serait faire grand cas de ce qui n’est, au fond, qu’un marchandage de dupes. La France, isolée, n’aurait pu obtenir davantage. Le ministre de l’Économie, homme peu suspect de trumpophilie, le concède : c’est « la moins mauvaise des solutions ». Et de fait, si l’on regarde au-delà de la gesticulation des drapeaux humiliés, l’accord conserve bien des points d’équilibre. Il acte un droit de douane de 15 % sur les produits européens, certes, mais en assortissant cette taxe de larges exemptions pour l’aéronautique, les pièces détachées, certains produits pharmaceutiques, les spiritueux, et sans remettre en cause ni la TVA, ni les normes alimentaires, ni les règles de souveraineté numérique. En somme, Trump a frappé fort pour obtenir moins, et l’Europe a ployé pour ne rien lâcher d’essentiel.
Il faut ici rappeler ce que recouvre ce théâtre. L’Europe exporte vers les États-Unis des biens à haute valeur ajoutée, dans lesquels la compétitivité s’appuie davantage sur la qualité que sur les prix. Ce que Trump propose, c’est une barrière tarifaire certes visible, mais bien moindre que celle infligée à nos concurrents : la Chine (54 %), le Brésil (50 %), le Canada (35 %), l’Inde (26 %). L’Union européenne, malgré le vacarme, demeure donc avantagée. À cet égard, le traité ressemble à ces gifles théâtrales que se donnent les rois au banquet pour montrer qu’ils règnent encore, alors que les intendants décident déjà de tout.
La classe médiatique française, quant à elle, hurle au déshonneur, avec l’entrain de ceux qui n’ont jamais tenu une balance commerciale entre les mains. Qu’espérait-elle ? Que la France, seule, fixât ses conditions à la première puissance mondiale ? Qu’un décret du Quai d’Orsay fît reculer le protectionnisme trumpien ? Le vieux rêve du gaullisme économique se fracasse sur le réel : la puissance ne se décrète pas, elle se possède. Trump, lui, la possède. Il en use comme d’un fusil chargé posé sur la table des négociations. Et tandis qu’Ursula von der Leyen lève le pouce devant les caméras, certains s’offusquent que le drapeau européen flotte dans un club de golf. Comme si la honte venait du lieu, et non de la dépendance structurelle que l’on feint de découvrir.
Il est vrai que les Européens se comportent comme des vierges offensées, après avoir cédé, pendant des décennies, leur autonomie énergétique, leur industrie de défense, leur souveraineté technologique. Que l’Amérique exige aujourd’hui retour sur investissement n’a rien de surprenant. Ce qui l’est davantage, c’est que les Européens s’en étonnent. Peut-être ont-ils cru que les traités remplaceraient la force, que la morale suffirait à tenir lieu de stratégie. Illusion douce, mais fatale. Dans un monde redevenu dur, il faut plus que des communiqués en anglais pour se faire respecter.
L’accord signé n’est donc ni une trahison, ni une victoire, mais un compromis contraint. Il faut pourtant se garder de ne voir en Trump qu’un semeur de chaos. Il est aussi, paradoxalement, un révélateur salubre. À rebours de l’image caricaturale que l’on trace de lui dans les chancelleries européennes, il agit comme un catalyseur brutal, mais efficace. Il force l’Europe à sortir de son sommeil dogmatique et à faire face à l’histoire.
Car c’est lui qui, le premier, osa dire tout haut ce que les peuples ressentent confusément : que l’immigration de masse, loin d’être une richesse automatique comme le prônent ceux qui nous haïssent, est aussi un facteur de dissolution ; que l’islamisation des villes européennes n’est pas une anecdote sociologique, mais une menace civilisationnelle. Là où nos dirigeants s’enferment dans le déni, Trump, avec ses manières de bulldozer, met le doigt sur l’abcès.
Il réveille aussi l’Europe sur l’économie. Il nous oblige à repenser notre dépendance énergétique, notre retard numérique, notre naïveté commerciale. Il révèle notre vulnérabilité, et nous contraint à réagir. De même en matière de défense, où sa volonté de désengagement a mis en lumière l’absurdité stratégique d’un continent incapable de se défendre sans l’OTAN, c’est-à-dire sans les États-Unis. Que Trump force les Européens à cesser d’être des protecteurs subventionnés est, à terme, un service historique.
Il ne serait pas incongru qu’un jour, quelque universitaire téméraire, propose sa candidature au prix Charlemagne. On y verra une provocation. Ce pourrait être, pourtant, une justice. Car nul, depuis De Gaulle, n’aura autant contraint l’Europe à envisager sa propre souveraineté. Il évite le pire, sans promettre le meilleur. Il illustre surtout la faiblesse d’un continent qui négocie à vingt-sept sans parler d’une seule voix. Et les mêmes qui dénoncent aujourd’hui l’humiliation européenne applaudissaient hier aux traités inégaux imposés à l’Amérique latine. Que l’Union, si prompte à presser le Mexique ou le Mercosur, goûte à son tour au vinaigre de la contrainte, c’est peut-être une leçon de modestie. Il est encore temps d’en tirer un enseignement.
Balbino Katz, Chroniqueur des vents et des marées
Crédit photo : DR
[cc] Breizh-info.com, 2025, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine
10 réponses à “Au bal des hypocrites, les Français sont rois”
l’europe et la france surtout est en grand danger des cette année ! mais comme tout le monde est en vacances …
Vivement le FREXIT et la MACRONEXIT §
Démolir les nations européennes, n’est-ce-pas le but de Macron, ursula et consort ? Alors ce qui vient de se passer est une grande victoire pour les mondialistes ! Ce ne sont pas des incompétents qui sont au pouvoir en Europe, ce sont de fieffés traîtres !
Le projet européen est, depuis sa création, un cheval de Troie américain. Feindre de l’ignorer est une hypocrisie.
Cet article est un régal ! Je savoure… MERCI !!!
La France seule n’aurait peut-être pas obtenu mieux que l’UE mais cette dernière n’apporte rien dans ce domaine comme elle n’apporte rien dans aucun domaine d’ailleurs. Elle n’a pas été capable d’enrayer la désindustrialisation, bien au contraire puisque le credo néolibéral sur lequel elle est fondée lui interdit toute politique économique. L’économie française, si elle n’était pas handicapée par l’euro, une monnaie surévaluée de 25% pour notre économie, serait beaucoup plus compétitive et notre commerce extérieur serait proche de l’équilibre. L’euro est une catastrophe économique pour la France et l’UE, qui est dominée par des Allemands revanchards et pathologiquement russophobes, nous impose une politique extérieure belliqueuse et délétère qui détruit les économies européennes du fait de l’augmentation considérable du coût de l’énergie. Sortons de l’UE et de l’euro. Vite !
Bel article réaliste qui dicte les vérités du commerce international géo politique de l’Europe sur le papier, mais non dans les faits. Il y a 5 décennies que nous aurions du faire l’Europe Continentale avec la Russie. Le Général de Gaulle connaissant les réalités militaires liées aux réalités économiques le disait tout haut et faire faisons l’Europe avec la Russie. Ce qui déplut aux USA.
Alors on paye notre incompétence politique, cet UE et ses discussions interminables sans résultats. Ce n’est pas trop dispendieux 15 % en somme et ce sont les populations qui vont voir tout augmenter pour compenser les pertes à l’exportation.
Juste le gaz de schiste américain 6 fois plus cher que le gaz Russe pour 750 milliards. Obligé d’investir aux USA pour 600 milliards, une vrai folie de débâcle commerciale.
Qui va mettre le premier le pied à l’étrier ? Encore faut-il avoir les capitaux pour décentraliser aux Etats Unis, avoir les compétences salariales, la main d’oeuvre qualifiée. Notre tissus industriel a déjà été mangé par 7 ans de macronisme débridé qui a cru aux rêves.
Nos déficits budgétaires, commerciaux de 1250 milliards en 7 ans sont au bout du chemin avant le précipice imminent. Mr Macron a cru qu’en souscrivant aux dettes américaines de 320 milliards il serait l’ami de Biden en transit puis périmé.
On savait que les USA par la dédollarisation et la fin des petrodollars auraient des difficultés financières à la fois sur la masse monétaire baissant de 40 %, réduisant de fait les opérations spéculatives du dollars. à la fois sur les intérêts. puis avec le renouvellement des dettes à échéances. Mr Trump est financier pragmatique mais pas du tout le politique de bureau, il l’a dit tout au long de sa campagne.
Je vais économiser 2’000 milliards de dépenses et faire rentrer pour 5’000 à 7’000 milliards de royalties vous allez voir le renouveau de l’American first. Les sondages européens furent faux de bout en bout, pour laisser croire à l’embellie économique.
Alors qu’aux USA on applaudissait la fin de la gabegie des 16’000 milliards de nouvelles dettes des démocrates. Ceci pour régner à crédit en falsifiant les élections. Un peu comme en France sur des mensonges politiques d’incompétence qui croyaient aux rêves pour les naïfs.
On nous a bassiné sur la Faillite de la Russie 3ème puissance mondiale forte de 50% des réserves énergétiques et des ressources du monde. En total accord avec les USA, car les importations essentielles indispensables de Russie pour les Etats Unis sont de 11 à 15 milliards par trimestre chiffres foreign office des USA.
Mr Trump du reste l’a bien dit à une journaliste TV américaine » la Russie est très très forte, sous entendu sans dettes et un potentiel énorme en ressources. Et avec son alliée la Chine ces 2 pays sont indestructibles », Tout est dit.
En contre partie les USA exportent entre 5 à 7 milliards en Russie par trimestre. La France de notre Mr Macron qui a reçu une demi instruction économique financière éclair en 2 ans au gouvernement fut fort dépourvu lorsque la réalité fut venue.
Pourquoi Mr Trump voudrait voir le risque de guerre s’estomper en Ukraine ? Pour tout simplement commencer à exploiter les terres rares avec leur contrat de 300 milliards contre de l’armement, en investissant des dizaines de milliards d’exploitation. Les investisseurs rechignent car les risques sont trop grands si la Russie se fâche vraiment. Alors les USA menacent d’armer d’avantage l’Ukraine avec des armes encore à crédit, qui font rire la Russie qui est réaliste avec plus de 900 milliards de bénéfices à l’exportation.
Tout cela mis bout à bout font que la France incompétente par des diplômés grandes écoles grâce à leurs mémoires qui imite parfaitement l’intelligence. Mais ils sont totalement incompétents en gestion géo politique sur l’avenir de la France qui perd ses industries et la distance des enjeux. La vision de nos gouvernants est extrêmement étriquée avec des œillères, ne tenant absolument pas compte des réalités de l’économie financière mondialisée.
Surtout l’aspect financier USA Chine Russie BRICS des créanciers des Etats Unis et la dédollarisation qui devient un abîme dont l’euro, qui est donc indexé, va souffrir avec les dettes. Donc les droits de douane sont bien un cadeau sinon le rating financier risque de souffrir à la baisse donc 15 milliards d’intérêts en plus.
L’Allemagne avec 1000 milliards de dettes en moins, tire ses épingles du jeu et va racheter le gaz Russe via d’autres voies peut être Nord Stream 2 ou 3 via des entrepôts réservoirs annexes.
Demat, je ne peux que saluer cet excellent article et les commentaires réponses appropriées auxquelles j’ai mis un pouce en l’air ; or, la France va devoir se mettre en conformité avec le droit européen car la TVA sur l’électricité et le gaz va passer de 5,5 % à 20 % à compter du 1er août prochain. Elle concerne la part fixe de notre facture et s’appliquera même si nos usages ne changent pas.
Qui est concerné ? Tous les consommateurs, qu’ils soient particuliers ou professionnels ;
Quel impact ? Hausse modérée, mais dans un contexte global de tension sur les prix de l’énergie ;
Quelles solutions ? Adapter votre contrat, comparer les fournisseurs, envisager l’autoconsommation, réduire vos usages…etc et demander surtout la sortie du marché européen de l’électricité puis Frexit (voici la source : https://www.clubic.com/actualite-574575-mauvaise-nouvelle-des-le-1er-aout-la-fin-de-la-tva-reduite-sur-l-electricite-risque-de-faire-grimper-vos-factures.html). kénavo
l’Europe se montre malheureusement ce
qu’elle est devenue : un poulet qui court sans tête. Le comble est que ceux qui s’en indignent le plus sont ceux qui sont responsables de cette situation. Quant aux déclarations de Macron elles atteignent des sommets de ridicule en énonçant sur un ton solemnel une évidence.
L’hypocrisie a toujours été l’apanage de la France ….et des français !