Russie. Une nouvelle loi « à la française » punit les recherches en ligne de contenus jugés « extrémistes »

Le président russe Vladimir Poutine a promulgué, jeudi 1er août 2025, une nouvelle loi qui criminalise la recherche de contenus qualifiés d’« extrémistes » sur Internet. Chaque infraction pourra être sanctionnée par une amende allant jusqu’à 5 000 roubles (environ 64 dollars).

Si la Russie, s’inspirant sans doute des « lois sur la haine » dans l’UE, et notamment de la France, spécialiste dans la répression de la parole, de l’opinion et de l’écrit,  n’en est pas à sa première mesure visant à restreindre la liberté d’expression en ligne, cette loi va encore plus loin : elle ne cible plus seulement la publication ou la diffusion de contenus dits radicaux, mais également leur simple consultation.

Malaise jusqu’au sein des partisans de la censure

Fait rare, certaines figures pro-Kremlin de la censure se sont inquiétées publiquement de cette loi. Yekaterina Mizulina, directrice de la Ligue pour un Internet sûr, un organe proche du pouvoir, a exprimé ses réserves : près de 30 % de ses activités consistent à rechercher des contenus extrémistes pour les signaler aux autorités. Désormais, ces recherches pourraient elles-mêmes être considérées comme des délits.

Même son de cloche chez Margarita Simonian, à la tête de la chaîne étatique RT, qui redoute que ses équipes ne puissent plus consulter les contenus qu’elles veulent dénoncer.

La loi a été adoptée au Parlement avec un soutien moins unanime qu’à l’accoutumée. Certains députés du Parti communiste ont voté contre. Un assistant d’un député d’opposition ayant osé comparer cette législation à l’univers de 1984 de George Orwell a immédiatement été arrêté.

Une définition floue de l’« extrémisme »

Comme le soulignent les défenseurs de la liberté d’expression, cette nouvelle loi renforce un climat déjà extrêmement répressif en Russie. Le flou qui entoure la notion d’« extrémisme » laisse toute latitude au pouvoir pour l’interpréter à sa convenance.

Human Rights Watch rappelle que Vladimir Poutine a déjà classé comme « extrémistes » des organisations anticorruption, des médias indépendants, des ONG de défense des droits de l’homme, ainsi que des partis d’opposition. Les critiques envers la guerre en Ukraine sont également très souvent assimilées à de l’« extrémisme ».

Selon cette nouvelle législation, ce ne sont plus seulement les créateurs ou les diffuseurs de contenus ciblés qui sont menacés, mais aussi les simples internautes qui y accèdent — intentionnellement ou par erreur. Le ministre du numérique Maksut Chadayev a tenté de rassurer, affirmant que seuls les cas d’intention seraient poursuivis. Mais il a renvoyé la responsabilité aux procureurs pour déterminer cette « intention », sans autre précision.

Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) a dénoncé un « pas supplémentaire très inquiétant dans la censure et la lutte contre la dissidence », ajoutant que ce texte vague et adopté en urgence contribue à un climat encore plus répressif.

Des millions d’utilisateurs pourraient, selon une association de défense des droits numériques en Russie, se désabonner des réseaux sociaux et éviter certains sites de peur d’être incriminés.

Cette loi place également une lourde responsabilité sur les plateformes numériques, sommées de surveiller l’activité de leurs utilisateurs et de signaler toute recherche litigieuse.

Offensive contre les VPN

Le même jour, Vladimir Poutine a également signé une loi interdisant la publicité pour les VPN — ces réseaux privés virtuels qui permettent aux internautes de contourner la censure. Les VPN sont très utilisés en Russie depuis le durcissement du contrôle d’Internet, notamment depuis le début du conflit en Ukraine.

Désormais, les fournisseurs de VPN qui permettraient l’accès à des contenus jugés « extrémistes », ou qui refuseraient de coopérer avec les autorités, risquent des amendes pouvant atteindre 500 000 roubles (environ 6 200 dollars).

Les « démocraties occidentales », comme les pouvoirs autoritaires, ont cela en commun, de Paris à Moscou, de Londres à Pékin, d’avoir à leurs têtes des individus qui, par tous les moyens, cherchent à avoir le contrôle total sur leurs populations.

Crédit photo : DR (photo d’illustration)
[cc] Breizh-info.com, 2025, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine

Cet article vous a plu, intrigué, ou révolté ?

PARTAGEZ L'ARTICLE POUR SOUTENIR BREIZH INFO

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

ARTICLES EN LIEN OU SIMILAIRES

PARTICIPEZ AU COMBAT POUR LA RÉINFORMATION !

Faites un don et soutenez la diversité journalistique.

Nous utilisons des cookies pour vous garantir la meilleure expérience sur Breizh Info. Si vous continuez à utiliser le site, nous supposerons que vous êtes d'accord.

Clicky