Au cours de la dernière décennie, alors que des millions d’Européens subissaient l’inflation, la stagnation économique, la pression migratoire et des coupes dans les services essentiels, l’Union européenne a alloué près d’un milliard d’euros au financement d’organisations idéologiques en Amérique latine. Sous prétexte de promouvoir la « société civile », Bruxelles a acheminé des fonds vers des ONG qui défendent des programmes ultraféministes, indigénistes, transactivistes et racialistes, souvent en ingérence ouverte contre des gouvernements démocratiquement élus.
Il ne s’agit pas ici de coopération au développement, d’aide humanitaire ou d’accords commerciaux avantageux. Il s’agit d’un gaspillage idéologique sans retour, qui transforme le contribuable européen en sponsor involontaire de l’agenda progressiste le plus radical outre-Atlantique. Jorge González-Gallarza est coordinateur principal pour les affaires latino-américaines au Bureau de Madrid pour l’Iberosphère du Centre pour les droits fondamentaux, qui vient de publier un rapport accablant intitulé « La vague rose de l’aide européenne : comment Bruxelles finance des ONG latino-américaines éveillées se présentant comme la « société civile ». Ce document fournit des données précises montrant comment un réseau clientéliste d’ONG idéologiques s’est consolidé grâce au financement public européen afin d’étendre son influence culturelle, médiatique et politique en Amérique latine.
Notre confrère Javier Villamor l’a interviewé, traduction par nos soins.
Commençons par le commencement. Comment l’idée d’enquêter sur ce financement vous est-elle venue ?
Jorge González-Gallarza : C’est le fruit d’un travail de plus d’un an, consistant à rechercher et à vérifier des données. Tout a commencé autour des élections européennes de l’année dernière. Par coïncidence, cela a coïncidé avec le démantèlement de l’USAID sous l’administration Trump, qui a incité de nombreuses ONG à rechercher de nouvelles sources de financement… et elles les ont trouvées à Bruxelles. Cela a déclenché l’alarme : des ONG qui vivaient autrefois de Washington frappaient désormais à la porte de la Commission européenne. Et nous ne parlons pas d’entités neutres, mais de groupes militants qui promeuvent des idéologies profondément progressistes sous prétexte de renforcer la société civile.
Nous parlons de près d’un milliard d’euros en dix ans.
Jorge González-Gallarza : Exactement. Le rapport identifie près d’un milliard d’euros de subventions européennes accordées à des ONG en Amérique latine au cours des dix dernières années, dont une part importante est allée à des organisations « woke » : féminisme radical, indigénisme, transactivisme, racialisme, etc. Beaucoup de ces ONG ne survivraient pas sans l’argent européen. Ce qui a été créé, aux frais du contribuable, c’est un écosystème militant artificiel.
Quel a été l’impact concret de cette aide dans la région ?
Jorge González-Gallarza : Ces ONG légitiment les programmes politiques que les dirigeants radicaux adoptent ensuite. Elles ont influencé des campagnes électorales, renforcé des mouvements autoritaires de gauche et, dans de nombreux cas, sapé des gouvernements démocratiquement élus. Des concepts tels que « l’hétéronormativité » ou la « transphobie structurelle », totalement étrangers à la culture ibéro-américaine, ont été introduits grâce au financement de l’UE. Il existe même des liens institutionnels entre des ONG latino-américaines et des forces de gauche européennes telles que le Forum de São Paulo ou le Groupe de Puebla.
Qu’en est-il de la transparence ? Qui contrôle l’utilisation de ces fonds ?
Jorge González-Gallarza : Elle est pratiquement inexistante. Certes, la Commission européenne dispose d’un portail sur la transparence financière, mais les données sont limitées. Nous savons combien est versé, à quelle ONG et pour quel projet, mais il n’y a aucun contrôle sur la mise en œuvre ou les résultats. Il n’y a pas d’audits publics, pas de suivi rigoureux et, souvent, le logo de l’UE n’apparaît même pas sur les activités qu’elle finance.
Pouvez-vous donner quelques exemples concrets ?
Jorge González-Gallarza : Bien sûr. L’un d’eux est le projet « Horizonte de Libertades » en Uruguay, qui a coûté plus d’un million d’euros et comprenait des conférences d’activistes comme Angela Davis, qui a ouvertement appelé à « démanteler le capitalisme » pour mettre fin au racisme. Un autre cas est celui des ONG médiatiques au Paraguay ou au Pérou qui, sous couvert de lutter contre la désinformation, publient des rapports qui stigmatisent les journalistes conservateurs avec des photos et des étiquettes telles que « facho », un terme péjoratif désignant les fascistes. Il s’agit d’une exportation de la censure à l’européenne.
N’est-ce pas là une ingérence politique ?
Jorge González-Gallarza : Absolument. Dans de nombreux cas, ces ONG agissent comme des instruments de pression politique. Le Paraguay en est un exemple flagrant, où des ONG ont été financées pour faire campagne contre le gouvernement qui s’opposait à une éducation sexuelle idéologisée. Elles ont même financé une campagne contre un projet de loi visant à imposer la transparence aux ONG recevant des fonds étrangers, ce qui est totalement paradoxal.
Que peut-on faire ? Y a-t-il un espoir d’inverser cette tendance ?
Jorge González-Gallarza : Oui, il y a des signes encourageants. Après le scandale LIFE et d’autres enquêtes, certains secteurs du Parlement européen, y compris des membres du Parti populaire européen, réclament des audits, des limites et une plus grande transparence. La Cour des comptes européenne a déjà signalé le manque de contrôle. Sur le plan politique, nous constatons également des changements : la nouvelle commissaire aux partenariats internationaux a une approche beaucoup moins radicale que son prédécesseur finlandais. Le prochain cycle budgétaire pourrait être l’occasion de mettre fin à cette dérive.
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