Il y a des jours où le cyclisme respire à nouveau. Des jours sans démonstrations surhumaines, sans attaques à 100 kilomètres de l’arrivée, sans le regard vide d’un peloton résigné à escorter un phénomène sous assistance céleste (ou médicale ?). Dimanche, le Tour de France pouvait dormir tranquille : Paris-Tours a redonné envie d’aimer la course, celle des hommes normaux, des erreurs humaines et des jambes qui tremblent.
Le vent dans le dos, la tête à l’envers
Sous un soleil d’octobre et un vent qui poussait comme un vieux copain de bistrot, le peloton a filé vers la Loire à près de 49 km/h de moyenne. Un rythme de TGV pour une course des “feuilles mortes”, comme si chacun voulait conjurer la torpeur d’une saison écrasée par Pogacar. Oui, le mutant était ailleurs, et tant mieux.
Car sans lui, tout devient possible : les favoris se découvrent, les outsiders osent, et les erreurs coûtent cher.
Gruel et Lapeira, l’école des désillusions
Le scénario était presque trop beau. Thibaud Gruel, enfant du pays, et Paul Lapeira, coureur en plein élan, s’échappent à 36 kilomètres de l’arrivée. Le duo file, léger, avec dix secondes d’avance sous la flamme rouge. Dix secondes d’un rêve français. Dix secondes de trop.
Car soudain, les deux se regardent, hésitent, calculent… et s’abattent comme des oiseaux pris dans le vent contraire de la peur ou de la bêtise.
Un geste, un regard, un doute, et tout bascule. Derrière, le quatuor Trentin–Laporte–Philipsen–Bissegger fond sur eux. Le sprint s’emballe, le rêve s’écroule, et Matteo Trentin, 36 ans, surgit comme un vieux renard des sous-bois.
Troisième victoire à Tours pour l’Italien (après 2015 et 2017), qui entre dans le club fermé des triples vainqueurs — Zabel, Reybrouck, Maye, Danneels. Une collection d’anciens, preuve que l’expérience, parfois, supplante la fougue.
Paris-Tours n’a jamais été une course simple : trop plate pour les grimpeurs, trop longue pour les sprinteurs, trop piégeuse pour les rêveurs. Cette année, elle a récompensé le sens du moment, cette intuition que les jeunes Français ont laissé filer à la flamme rouge.
Gruel et Lapeira, à bout de souffle, ont préféré s’observer plutôt que se sacrifier. Dans cette hésitation s’est glissée toute la morale du cyclisme moderne : chacun roule pour soi, ou pour le GPS qui parle à l’oreillette. Le panache, lui, a encore pris une crevaison.
Christophe Laporte, le tenant du titre, a tenté de sauver les meubles avec une belle deuxième place. Le jeune Danois Albert Withen Philipsen, de l’équipe Lidl-Trek, complète le podium et confirme que l’avenir viendra du Nord, pas de Monaco. Arnaud De Lie, le “taureau de Lescheret”, a crevé au pire moment — une scène presque symbolique d’un cyclisme où la malchance remplace la fatalité.
Et pendant ce temps, Arnaud Démare, double vainqueur ici (2021, 2022), disputait sa dernière course. 97 victoires au compteur, un au revoir sans triche ni miracle, comme une page tournée avec modestie.
Cette 119ᵉ édition aura prouvé qu’il reste des courses à suspense, où la sueur et la bêtise font encore partie du jeu. Pas de calcul de watts, pas de vélos propulsés par la foi scientifique : juste des erreurs humaines, des accélérations brutes et des regards qui en disent plus long qu’un capteur de puissance. « Paris-Tours, c’est la course où les jambes parlent encore plus fort que les algorithmes. »
En 2025, c’est déjà un miracle.
YV
Photo : A.S.O. / Gaëtan Flamme
[cc] Article relu et corrigé (orthographe, syntaxe) par ChatGPT.
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