Le reniement Kotarac : quand le Rassemblement national se met à bénir le croissant

Je revenais de ma promenade sur la digue du port de Lechiagat, et je faisais halte au bar des Brisants. Le vent d’ouest ramenait l’odeur du goémon, les ligneurs se hâtaient de quitter le quai flottant, et je songeais à rien en suivant d’un œil distrait le vol des mouettes quand, sur l’écran de mon téléphone, je vis passer une déclaration d’Andréa Kotarac. Il affirmait que « les racines de la France ne sont pas que chrétiennes » et que « les musulmans sont sensibles au patrimoine chrétien de la France ». Ainsi donc, songeai-je, voilà la nouvelle théologie du Rassemblement national : un œcuménisme de circonstances pour ne froisser personne.

Cette phrase, reprise par un compte zemmourien, se répandit aussitôt sur X comme une traînée de poudre. Sous le message du compte @Riposte_R, on pouvait lire ce commentaire sec : « Après “l’islam compatible avec la France”, voici “le christianisme compatible avec l’islam”. » La formule fit mouche. Elle disait tout de la pente glissante sur laquelle le parti de Marine Le Pen s’est engagé : celle de la banalisation, de la dilution, de l’abandon des mots qui fâchent.

On aurait pu attendre d’Andréa Kotarac, issu d’une famille des Balkans, une mémoire plus vive. Car dans les vallées de son sang, les églises portent encore les stigmates du Croissant. Les siens savent ce que devient la tolérance quand l’islam devient majoritaire. Qu’il aille à Peć, à Gračanica, ou dans les hameaux du Kosovo, demander aux vieux prêtres ce qu’il reste du christianisme quand la charia impose silence aux clochers. Il y verrait les autels profanés, les croix abattues, et la résignation de ceux que l’Europe a oubliés (rendre visite au site de Solidarite Kosovo pour s’en convaincre).

Cette mémoire-là, il l’a trahie. Ses mots, prétendument apaisants, trahissent une ignorance cruelle de ce que fut l’histoire du continent. L’islam n’est pas une couleur de plus dans la mosaïque des croyances : c’est une architecture du monde, une politique de la transcendance. Ceux qui parlent de compatibilité se condamnent à subir la conquête.

Zemmour, lui, n’a pas cette cécité. Son dernier livre redit sa conviction profonde avec une force qu’aucune bienséance ne parvient à atténuer : la France n’a pas deux racines, mais une seule. Elle plonge dans le christianisme comme l’arbre dans sa terre. Sans ce sol, elle meurt. Sa langue, son art, son droit, tout ce qui fait sa noblesse découle de ce baptême originel.

On peut objecter à Zemmour que les racines de l’Europe sont aussi païennes et que le catholicisme doit beaucoup à cet héritage. Mais le tribun devenu politique va à l’essentiel, laissant les nuances et les notes en bas de page aux historiens et aux philosophes comme Alain de Benoist.

Le Rassemblement national, lui, s’est depuis longtemps séparé de cette source. Il veut régner sans risquer. Jadis, Jean-Marie Le Pen disait que « l’islam n’est pas seulement une religion, c’est une manière d’être au monde ». Aujourd’hui, ses héritiers s’emploient à prouver que tout est compatible, que l’on peut concilier l’inconciliable, mêler le Credo et la chahada, le rosaire et le tapis de prière.

Il faut relire Ernst Jünger pour mesurer l’abîme où nous glissons. « Les peuples qui fuient le tragique sont condamnés à l’esclavage. » Le RN fuit le tragique comme d’autres fuient la mer démontée. Il préfère la quiétude des eaux stagnantes à la fureur des vagues. Il ne veut plus combattre, il veut gouverner ce qui, dans le monde qui vient, revient à se soumettre.

Entre Zemmour et Marine Le Pen, le contraste n’est plus politique, il est métaphysique. L’un parle de civilisation, l’autre de compatibilité. L’un cherche à réveiller les consciences, l’autre à endormir les inquiétudes. L’un se tient sur la digue, face à la marée, l’autre la laisse monter dans les rues.

Car la France n’est pas un compromis, c’est une fidélité. Et si elle oublie cela, si elle renonce à son tragique, elle finira, comme les moines du Kosovo, à prier en silence dans les ruines de ses églises.

Balbino Katz, chroniqueur des vents et des marées

Illustration : DR
[cc] Article relu et corrigé (orthographe, syntaxe) par ChatGPT.

Breizh-info.com, 2025, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine

Cet article vous a plu, intrigué, ou révolté ?

PARTAGEZ L'ARTICLE POUR SOUTENIR BREIZH INFO

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

ARTICLES EN LIEN OU SIMILAIRES

Politique, Tribune libre

« Supprimer les Régions » : quand le RN fait une crise de jacobinisme [L’Agora]

Découvrir l'article

Politique

Union des droites (LR-RN-Reconquête) : quand la base dit oui, les chefs font des calculs politiques

Découvrir l'article

Politique

Les pleurs du Rassemblement National

Découvrir l'article

Politique, Tribune libre

Après la démission de Bayrou, la droite la plus bête et la plus lâche du monde va-t-elle permettre un Gouvernement de centre-gauche ? [L’Agora]

Découvrir l'article

NANTES, Politique

Municipales 2025 à Nantes : le RN mise sur Jean-Claude Hulot, un haut fonctionnaire parisien encore inconnu des Nantais

Découvrir l'article

Politique

Perquisitions au RN. La République en trompe-l’œil : quand le crédit devient crime

Découvrir l'article

Politique

Cabale de Médiapart contre Caroline Parmentier (RN). Quand la gauche n’a plus d’idées, elle ouvre les archives

Découvrir l'article

Sociétal, Tribune libre

Dissolution de la Jeune Garde : la droite qui applaudit est une droite qui creuse sa tombe

Découvrir l'article

A La Une, Politique

Bretagne : la région continue de subventionner SOS Méditerranée avec l’argent des contribuables, Gilles Pennelle et le RN dénoncent un scandale au détriment des Bretons

Découvrir l'article

RENNES, Sociétal

Exclu Breizh-info. Lynchage de militants du RN à la faculté de Rennes. La vidéo qui accable les Antifas…relaxés par la Justice

Découvrir l'article

PARTICIPEZ AU COMBAT POUR LA RÉINFORMATION !

Faites un don et soutenez la diversité journalistique.

Nous utilisons des cookies pour vous garantir la meilleure expérience sur Breizh Info. Si vous continuez à utiliser le site, nous supposerons que vous êtes d'accord.

Clicky