Une vaste étude génétique vient de bouleverser ce que l’on croyait savoir sur la domestication du chat. L’animal familier des foyers européens ne serait arrivé sur le continent qu’à l’époque de l’Empire romain, il y a environ 2 000 ans, en provenance d’Afrique du Nord.
C’est une certitude désormais étayée par la génétique ancienne : les premiers chats domestiques présents en Europe ne seraient pas issus des migrations néolithiques comme on le croyait, mais bien d’un transfert plus tardif, favorisé par le commerce maritime romain. L’étude, publiée dans la revue Science, repose sur l’analyse de 225 ossements de chats – sauvages ou domestiques – issus de 97 sites archéologiques situés en Europe et au Proche-Orient, couvrant une période allant de 10 000 ans avant notre ère jusqu’au XIXe siècle.
Un passager clandestin des routes commerciales romaines
La découverte centrale de cette recherche, dirigée par le paléogénéticien Claudio Ottoni de l’Université de Rome Tor Vergata, repose sur le séquençage de 70 génomes anciens. Elle montre que les premiers chats génétiquement similaires à nos félins actuels apparaissent en Europe entre 50 av. J.-C. et 80 ap. J.-C., notamment dans la ville autrichienne de Mautern, alors garnison romaine sur le Danube. Avant cette période, les ossements retrouvés correspondent uniquement à des chats sauvages indigènes.
Les chercheurs avancent que ces félins domestiques auraient embarqué sur les navires romains transportant du grain depuis l’Égypte. Leur mission : éliminer les rongeurs nuisibles à la cargaison. L’expansion du commerce en Méditerranée aurait ainsi servi de vecteur à la dispersion du chat à travers l’Europe.
Fin d’un mythe néolithique ?
Jusqu’à présent, la thèse dominante supposait que les chats avaient été domestiqués aux alentours de 7 000 ans avant notre ère, en parallèle de la diffusion de l’agriculture depuis le Croissant fertile. Une découverte à Chypre en 2004 – un squelette de chat associé à celui d’un homme dans une sépulture datée de 7 500 av. J.-C. – semblait accréditer cette hypothèse.
Mais la présente étude remet en cause l’arrivée précoce de chats domestiques en Europe. Les restes découverts dans les habitats préhistoriques européens n’appartiennent pas à des animaux domestiqués, mais bien à des chats sauvages. « La domestication du chat reste un processus complexe. Nous savons désormais quand il est arrivé en Europe, mais pas encore où et quand la domestication initiale a eu lieu », précise Claudio Ottoni.
L’Afrique du Nord, berceau génétique
Les résultats montrent également que plusieurs vagues d’introduction de félins depuis l’Afrique du Nord ont eu lieu. Une première, environ 2 200 ans avant notre ère, aurait conduit à l’installation de chats sauvages sur l’île de Sardaigne. Mais c’est la seconde vague, deux siècles plus tard, qui est à l’origine des chats domestiques modernes en Europe.
Cette diffusion féline s’est donc faite en deux temps, et non à partir d’un seul foyer. Plusieurs régions et cultures nord-africaines ont contribué à l’histoire génétique de l’animal. Les chercheurs suggèrent que les chats ont circulé non seulement pour des raisons utilitaires – en tant que chasseurs de rongeurs –, mais aussi pour des raisons symboliques et religieuses. En Égypte ancienne, les chats faisaient déjà l’objet d’un culte, associés à des divinités et parfois momifiés avec leurs maîtres.
Contrairement aux chiens, dont la domestication remonte à bien plus loin et dont les traces sont plus nettes dans les archives archéologiques, les chats sont restés longtemps indistincts de leurs cousins sauvages. Ils n’ont pas, comme les chiens, développé de caractéristiques morphologiques radicalement différentes de leurs ancêtres.
L’étude actuelle éclaire un pan resté obscur de l’histoire féline : celle de son intégration aux sociétés humaines, non comme simple animal de compagnie, mais comme acteur à part entière de l’économie, de la culture et des croyances. Et elle rappelle que, derrière chaque miaulement dans nos salons, résonne un héritage venu des cales de bateaux romains.
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