Les écolos ont bien joué. Avec LFI d’un côté, le RN de l’autre et Stéphane Roudaut (droite) en face, la partie apparaissait difficile pour le maire sortant François Cuillandre (PS) ; il n’avait pas le choix. Il avait besoin d’une alliance avec des gens possédant une clientèle importante. Pour lui, la sécurité exigeait un accord dès le premier tour ; ce qui fut fait avec les écologistes.
En politique, le ralliement est un art qui exige doigté, patience et habileté. La technique : savoir se rendre indispensable, savoir se faire désiré, savoir jouer la comédie. De telle manière que le “partenaire“ soit amené à accepter des concessions. Sinon pas d’alliance et la victoire aux élections n’est plus assurée, ce qui est inacceptable pour des professionnels de la politique qui ont besoin d’un “casse-croûte“.
Voyons le cas des écologistes à Brest. Plus d’un an avant les élections municipales de mars 2026, ils étaient déjà en piste. A la vérité, au conseil municipal, ils jouaient un double jeu. D’un côté ils appartiennent à la majorité de François Cuillandre (PS), de l’autre ils forment une espèce d’opposition interne à cette majorité. Un pied dedans, un pied à l’extérieur… Dès septembre 2024, le président du groupe écologiste au conseil municipal Glen Dissaux annonce la couleur. Il juge souhaitable que La France insoumise entre dans la future majorité municipale : « Je milite en ce sens. On a construit de bons canaux de discussion, à la fois dans la majorité municipale et dans des cadres qui l’ont dépassé au travers du Nouveau Front populaire. Je pense qu’il faut les maintenir activés, et préparer les prochaines municipales dès à présent. Pourquoi ne pas lancer quelque chose tous ensemble, en associant tous les partis de gauche, en associant les forces vives que sont les syndicats, les associations, au lieu de se recroqueviller sur nos partis ? » (Le Télégramme, Brest, jeudi 26 septembre 2024) En disant cela, Glen Dissaux sait bien que François Cuillandre n’acceptera jamais une alliance avec LFI…
Elu par les militants comme chef de file des écologistes en vue des élections municipales de mars 2026, Glen Dissaux persiste et signe : « On arrive à travailler avec tout le monde : la majorité municipale qui est très plurielle, mais nous avons aussi un bon canal de discussion avec les Insoumis. On peut être ces rassembleurs-là. Nous sommes convaincus que c’est le rassemblement le plus large qui peut nous faire gagner. » (Le Télégramme, Brest, mardi 11 mars 2025)
Il ne reste plus qu’à travailler à l’élaboration d’un projet municipal. Le collectif “Brest ensemble“ (écologistes et sympathisants) organise donc des ateliers. La sécurité figure même au nombre des propositions : « L’évolution des formes de délinquance constatées durant ce mandat nous invite à revoir certaines choses », reconnaît Glen Dissaux. Mais, pour lui, l’union de la gauche demeure la formule gagnante pour 2026 : « Nous pensons qu’il est temps de discuter, et cela se fait déjà avec certaines forces politiques. Nous laissons notre porte ouverte jusqu’à l’automne. Après, chacun sera responsable de son choix », prévient Dissaux (Le Télégramme, mercredi 14 mai 2025) Ce dernier sait bien qu’il y a « forces politiques » et « forces politiques », c’est-à-dire celles qui sont synonymes de victoire et celle qui se contenteront de faire de la figuration. Et c’est là que se trouve le « choix »…
Les écolos mettent le pied sur l’accélérateur
S’il croit toujours à l’union de la gauche, Glen Dissaux est contraint de tenir compte de la réalité : « En local, nous avons ouvert des discussions avec tout le monde. Les Insoumis ont décidé de faire une liste autonome, je respecte leur choix sans doute influencé par le national mais on sait par ailleurs qu’un axe entre socialistes et écologistes, avec les autres partenaires, entraîne toujours une adhésion très large. » (Le Télégramme, Brest, samedi 20 septembre 2025). Il ne reste plus qu’à trouver « un chemin de dialogue » avec le PS…
Le 5 novembre, le groupe « Brest Ensemble » (écologistes et sympathisants) lance sa campagne. Mais la porte n’est pas fermée avec François Cuillandre. « On a toujours dit que l’on souhaitait rassembler la gauche, et on a lancé des cycles de discussion dans ce sens. François Cuillandre et le PS connaissent nos attendus, mais force est de constater que nous n’avons pas eu de réponses satisfaisantes à ce jour. Il n’est pas trop tard, mais ça sera de plus en plus compliqué », estime Glen Dissaux (Le Télégramme, Brest, jeudi 6 novembre 2025). On sent que l’affaire progresse…
A ce stade, la situation n’est pas extraordinaire pour les écolos brestois. Ils savent qu’à Rennes, Nantes et Quimper, le principe d’une alliance de premier tour entre le PS et les Ecologistes est acquis – il y a là une tendance de fond. Ils savent que leur parti n’est pas dans une phase ascendante – c’est ce que montrent les sondages portant sur les intentions de vote pour la présidentielle de 2027. Marine Tondelier est créditée de 4,5 %, 5 % ou 5,5 %, selon les hypothèses (Elabe, La Tribune Dimanche, 2 novembre 2025). Certes, un sondage commandé par le PS brestois et portant sur les intentions de vote pour les élections municipales de mars 2026 est plus favorable sans être exceptionnel : 16 % pour Glen Dissaux, 18 % pour Stéphane Roudaut et 27 % pour François Cuillandre dans la cité portuaire (Ifop, Le Télégramme, jeudi 25 septembre 2025).Bref, les enjeux écologiques n’apparaissent pas prioritaires. « En dépit des apparences, les Verts n’ont jamais rompu le fil ténu de la discussion avec leurs collègues socialistes. Au point qu’aujourd’hui, verts et roses sont très proches d’un accord de premier tour », peut-on lire début décembre (Le Télégramme, Brest, samedi 6 décembre 2025). Quatre jours plus tard, l’union est annoncée. Socialistes et écologistes officialisent leur accord pour une liste commune sous la bannière de « La gauche unie pour Brest » conduite par le maire sortant. « C’est important d’avoir une liste d’union dès le premier tour », souligne François Cuillandre ; ainsi il écarte le risque d’une « fusion dans la douleur » durant l’entre-deux-tours, comme cela avait été le cas en 2020 (Le Télégramme, Brest, mercredi 10 décembre 2025)
Rien ne remplace une bonne « négo »
Evidemment, Cuillandre est contraint d’avaler quelques couleuvres. D’abord la deuxième place sur la liste est réservée à une candidate écolo. Ensuite changement de méthode : plus de « pouvoir vertical » mais du dialogue : « Débattre avant les décisions et agir collectivement », résume-t-il (Le Télégramme, Brest, mercredi 10 décembre 2025). Le point le plus amusant demeure la création d’une police municipale ; le maire a toujours été hostile à ce projet. Mais les écolos y sont favorables, d’où un changement de discours : « Quand on dit que je suis contre la police municipale, c’est un peu rapide. La sécurité publique est d’abord le rôle de l’Etat. Mais l’Etat se désengage progressivement et je ne peux pas dire que ce n’est pas mon problème. Donc, au-delà de la brigade de tranquillité urbaine, on aura cette réflexion. La question n’a jamais été fermée, contrairement à ce que je lis régulièrement » (Le Télégramme, Brest, mercredi 10 décembre 2025). Cuillandre a la mémoire courte… Il oublie ses déclarations sur cette question…
Ils espéraient une alliance avec les écolos mais c’est raté… Les Insoumis se retrouvent donc isolés, sans dynamique électorale. « Aux déçus du choix des écologistes, quels qu’ils soient, et à celles et ceux qui aspirent à une autre politique, nous proposons de nous rejoindre pour offrir à Brest un renouveau politique qui passe par nos principes communs », expliquent-ils. Et comme ils ne doutent de rien, ils se fixent un objectif ambitieux : « Etre en tête au premier tour pour rassembler largement à gauche » (Le Télégramme, Brest, mercredi 10 décembre 2025) Nous souhaitons bien du plaisir à Cécile Beaudouin…
Bernard Morvan
Illustration : DR
[cc] Article relu et corrigé (orthographe, syntaxe) par ChatGPT.
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