Sans graines, il n’y aurait ni céréales, ni fruits, ni légumes — et donc pas de chaîne alimentaire viable. Pourtant, derrière les produits standardisés des rayons de supermarché se cache un secteur stratégique, celui des semences, aujourd’hui marqué par une concentration économique rapide et par des débats réglementaires majeurs au sein de l’Union européenne.
Un marché mondial colossal et en forte croissance
En 2024, les ventes mondiales de semences ont atteint environ 75 milliards de dollars, un chiffre qui pourrait presque doubler d’ici 2034 selon plusieurs projections. Trois groupes dominent largement ce marché : Bayer, Corteva et Syngenta, qui représenteraient ensemble plus de la moitié des parts de marché mondiales.
Cette domination s’exerce sur un secteur pourtant fondé sur une diversité biologique immense. Le riz compte plus de 100 000 variétés, le maïs plusieurs milliers, et le blé environ 25 espèces, déclinées en centaines de variétés cultivées.
Blé, riz, maïs : des productions clés mais standardisées
À l’échelle mondiale, près de 800 millions de tonnes de blé ont été récoltées en 2023, un volume comparable à celui du riz, tandis que le maïs dépasse largement ce seuil avec 1,24 milliard de tonnes.
En Europe, la France reste le premier producteur de blé, devant l’Allemagne et l’Ukraine, sur des millions d’hectares cultivés.
Mais cette abondance masque une réalité plus fragile : une standardisation croissante des semences utilisées, souvent au détriment des variétés locales ou anciennes.
L’essor des semences hybrides et la dépendance des agriculteurs
Le marché est aujourd’hui largement dominé par les semences hybrides, issues du croisement de lignées pures. Elles offrent des rendements supérieurs pouvant atteindre 30 %, ce qui les rend économiquement attractives.
Cependant, ces semences ne peuvent pas être reproduites par les agriculteurs eux-mêmes : les générations suivantes perdent leurs qualités productives, obligeant à racheter des graines chaque année, à des prix fixés par les obtenteurs.
Plusieurs observateurs soulignent également que la sélection hybride privilégie avant tout le rendement et la résistance aux maladies, au détriment du goût, de l’arôme et de la valeur nutritionnelle.
Une nouvelle réglementation européenne très contestée
À Bruxelles, le débat s’intensifie autour du futur règlement européen sur la production et la commercialisation du matériel végétal, dont les négociations doivent débuter en 2026. Officiellement, le texte vise à promouvoir l’agrobiodiversité. Mais des organisations spécialisées alertent sur un effet inverse.
Selon l’ONG Arche Noah, la position adoptée par le Conseil des ministres de l’Agriculture risque d’imposer aux petits sélectionneurs les mêmes contraintes administratives qu’aux multinationales, rendant leur activité économiquement intenable. Ces acteurs jouent pourtant un rôle central dans la préservation des variétés anciennes à pollinisation libre et dans l’adaptation des cultures aux terroirs locaux.
Vers une concentration accrue du marché européen
En Europe, cinq grands groupes — Bayer, Corteva, Limagrain, KWS et Syngenta — contrôlent déjà environ les deux tiers du marché des semences, évalué à 13,1 milliards de dollars en 2024. Cette concentration pourrait s’accentuer avec une réglementation jugée trop contraignante pour les petites structures.
Plus de 200 agriculteurs, sélectionneurs et organisations environnementales ont récemment exprimé leurs inquiétudes, estimant que l’Europe risque de bâtir un système semencier affaiblissant la résilience climatique, l’agriculture durable et la souveraineté alimentaire.
Les critiques portent notamment sur :
– la réduction potentielle de la diversité variétale,
– la dépendance accrue des agriculteurs vis-à-vis de quelques groupes industriels,
– les charges administratives jugées disproportionnées pour les petits acteurs,
– l’accès limité aux ressources génétiques.
Pour les organisations agricoles et environnementales, l’enjeu dépasse la simple réglementation : il touche à la capacité de l’agriculture européenne à s’adapter aux crises climatiques, économiques et alimentaires à venir, tout en préservant ses savoir-faire et ses terroirs.
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