Jusqu’au 14 juin, la Maison de l’Épagneul breton se transforme en galerie de mémoire vivante : plus de cent affiches de festoù-noz, réalisées par le dessinateur Alain Goutal, y sont exposées. Un hommage graphique vibrant à cinquante ans de culture populaire bretonne.
Difficile d’évoquer le monde du fest-noz sans y croiser la patte d’Alain Goutal. Depuis les années 1970, cet artiste du Kreiz-Breizh a illustré les nuits dansantes de Bretagne avec une constance remarquable. Près de 750 affiches signées de sa main, dont plus de 500 pour des festoù-noz, constituent un pan souvent méconnu de l’histoire culturelle bretonne. C’est un échantillon soigneusement sélectionné de 105 d’entre elles que les visiteurs peuvent aujourd’hui découvrir dans cette exposition exceptionnelle à Callac.
Parmi les pièces présentées, certaines remontent à 1973, époque où l’affiche constituait encore le principal support de communication pour les événements locaux. Sérigraphiées à la main, tirées à de rares exemplaires, elles respirent les effluves de l’encre corrosive et des luttes associatives. Certaines sont devenues introuvables, d’autres n’ont jamais été publiées. Toutes témoignent de l’effervescence d’une époque et de la renaissance d’une tradition.
Une œuvre populaire au service d’un patrimoine vivant
Si les affiches d’Alain Goutal sont devenues des objets de collection, c’est aussi parce qu’elles racontent bien plus que des rendez-vous festifs. Elles incarnent le lien fort entre la culture visuelle et la culture populaire. Le style de l’artiste — reconnaissable entre mille — mêle musiciens, instruments, monuments du pays, et souvent… des oiseaux. Ces éléments sont les témoins fidèles des nuits animées de Saint-Servais, Bourbriac ou Lanrivain, autant de lieux où le fest-noz s’est enraciné dans le quotidien rural.
Pour mieux saisir l’importance de cette exposition, il faut revenir aux origines du fest-noz. Cette « fête de nuit », héritée des veillées rurales, a longtemps accompagné les travaux agricoles en Bretagne. Remise au goût du jour dans les années 1950, notamment sous l’impulsion de Loeiz Ropars, elle a évolué d’un rassemblement communautaire à une manifestation culturelle reconnue mondialement. En 2012, l’UNESCO a inscrit le fest-noz au patrimoine culturel immatériel de l’humanité, consacrant cette pratique collective comme un pilier de l’identité bretonne.
C’est cette histoire que les affiches de Goutal illustrent en creux. Car chaque papier, chaque dessin, chaque typo raconte aussi l’évolution technique et sociale d’un monde rural devenu moderne, sans jamais rompre avec ses racines.
L’exposition à Callac n’est pas seulement un hommage à un artiste. C’est une plongée dans l’âme festive de la Bretagne, à travers le regard d’un homme qui a su capter l’énergie, l’humour, la poésie et la vitalité d’un peuple dansant. L’entrée est libre, du mardi au vendredi de 9h à 12h, et le samedi de 9h à 17h. Une occasion unique de découvrir, ou redécouvrir, comment les nuits bretonnes se sont imprimées dans la mémoire collective — et sur le papier.
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