Dans un tournant inédit pour l’Union européenne, l’Autriche est devenue début juillet 2025 le premier État membre à procéder officiellement à l’expulsion d’un ressortissant syrien condamné pour crimes graves, malgré les réticences historiques liées à la situation en Syrie. L’homme, trentenaire multirécidiviste, a été remis aux autorités syriennes à la frontière libanaise.
Une politique « stricte et juste »
Le ministre autrichien de l’Intérieur, Gerhard Karner, a justifié cette mesure en déclarant qu’elle s’inscrivait « dans le cadre d’une politique d’asile stricte et donc juste », selon un article du journal Le Figaro publié le 4 juillet. Il a salué « un signal fort » envoyé aux délinquants, précisant que l’Autriche expulsera désormais systématiquement les criminels condamnés, « y compris vers la Syrie ».
Cette décision marque une rupture avec la jurisprudence européenne, notamment celle de la Cour européenne des droits de l’homme, qui interdisait jusqu’ici toute expulsion vers la Syrie au nom du principe de non-refoulement. Mais Vienne affirme avoir respecté toutes les garanties internationales, en s’assurant que l’individu n’encourait ni torture ni peine de mort, indique pour sa part le média Atlantico.
Depuis la chute de Bachar el-Assad en décembre 2024, le débat migratoire s’est durci en Europe. L’Autriche, dirigée par un chancelier conservateur sous pression du parti nationaliste FPÖ, a entamé une révision générale du statut de près de 2 900 « réfugiés » syriens et suspendu le regroupement familial pour les Syriens, une mesure soutenue par la coalition au pouvoir.
Expulsions : l’Allemagne pourrait suivre
Quelques jours après cette annonce, l’Allemagne a confirmé le lancement de procédures similaires. Selon une information du journal Le Parisien du 5 juillet, le ministère de l’Intérieur a demandé à l’Office fédéral pour la migration et les réfugiés (Bamf) de révoquer les protections accordées aux « délinquants et individus dangereux syriens ». L’accord de coalition entre la CDU, la CSU et le SPD prévoit explicitement de permettre des expulsions vers la Syrie, en priorité pour les criminels.
Entre janvier et mai 2025, plus de 3 500 procédures de révocation ont été lancées en Allemagne. À ce jour, 57 statuts de réfugié et 22 protections subsidiaires ont été retirés.
Quant à l’expulsion autrichienne, elle constitue une brèche dans la doctrine de non-refoulement puisque, jusqu’ici, aucun État membre de l’UE n’avait franchi ce cap. Plusieurs ONG s’alarment de cette évolution, dénonçant une instrumentalisation politique du droit d’asile. Mais pour Vienne comme pour Berlin, la protection des citoyens prime désormais sur l’absolutisme humanitaire.
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