Bréhat (Côtes d’Armor). De nouveaux quotas face aux excès du tourisme de masse

Chaque été, l’île de Bréhat, au large des Côtes d’Armor, voit sa populatio journalière multipliée par treize. Jusqu’à 6 000 visiteurs ont été recensés certains jours lors de la saison 2022 sur un territoire de seulement 3 km². Face à ce surtourisme devenu incontrôlable, la municipalité a instauré en 2023 une régulation d’accès, reconduite cette année du 28 juillet au 22 août 2025. Un arrêté, fondé sur l’article 231 de la loi Climat et Résilience, limite à 4 700 le nombre de visiteurs autorisés en semaine entre 8h30 et 14h30.

« Le nombre de jours où l’on atteint les quotas est assez faible », a précisé le maire de Bréhat, Olivier Carré (SE), auprès de France Bleu. « L’objectif de la régulation, c’est avant tout que les gens réservent », insiste-t-il, évoquant une mesure de bon sens destinée à lisser les flux et à garantir aux visiteurs une expérience de qualité. Des caméras à reconnaissance de silhouettes ont déjà été installées par le passé au débarcadère du Port-Clos, ainsi que des capteurs thermiques, pour affiner les comptages.

Un dispositif soutenu, mais contesté

Selon une enquête menée en 2022 auprès de 272 habitants par la commission municipale sur l’hyper-fréquentation, 84 % des répondants se déclaraient favorables à la mise en place de quotas. Mais chez les commerçants et opérateurs touristiques, l’accueil est plus mitigé. Antoine Tartault, porte-parole des professionnels de l’île, a déploré le 28 juillet auprès de Franceinfo « une baisse de chiffre d’affaires de plus de 10 % chaque année » depuis l’instauration de la mesure. Il juge le message mal compris par les visiteurs, qui croiraient à tort que l’île est fermée.

Même tension du côté de la compagnie maritime locale Sur Mer, sanctionnée de 9 000 euros d’amende pour accostage illégal. Son gérant, David André, a contesté auprès de France bleu Breizh Izel une répartition « faite au doigt mouillé » entre transporteurs : les Vedettes de Bréhat, délégataires du service public, bénéficient d’un quota allant jusqu’à 4 268 passagers, contre 432 pour sa propre compagnie. La mairie, elle, invoque une répartition « proportionnelle à la capacité » de chaque opérateur.

Préserver Bréhat sans détruire l’économie

Au-delà des querelles locales, le cas de Bréhat illustre les tensions croissantes entre attractivité touristique et préservation des écosystèmes. « Il faut préserver la faune, la flore… mais aussi l’économie de l’île », résume avec lucidité une habitante, citée par France Bleu. Bréhat ne compte que 400 habitants permanents, mais accueille chaque été quelques 4 000 résidents secondaires occupant 700 maisons.

La municipalité mise désormais sur une meilleure répartition des flux dans le temps : les week-ends, traditionnellement moins fréquentés en raison des chassés-croisés, sont encouragés. D’autres sites comme Porquerolles, dans le Var, ont adopté des mesures analogues. Dans une France où 80 % du tourisme se concentre sur 20 % du territoire, Bréhat expérimente une voie étroite, entre protection et ouverture. Reste à savoir si elle sera durable.

Crédit photo : Flickr (CC BY-ND 2.0/Peter Stenzel) (photo d’illustration)
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2 réponses à “Bréhat (Côtes d’Armor). De nouveaux quotas face aux excès du tourisme de masse”

  1. MALKO dit :

    BREHAT est une ile très fragile sur son écosytème et sous équipée en infrastructure d’accueil.
    il est effectivement dommage de devoir mettre des quotas mais au vu de la progression importante des visiteurs la mairie n’a pas le choix.
    si nous voulons préserver certains sites remarquables pour les générations futures ces dispositions s’imposent.
    les iles Bretonnes ont vu des trafics raisonnables pendant des décennies mais depuis une dizaine d’années la Bretagne est de plus en plus visitée avec les conséquences de la surfréquentation sur certaines iles : GLENANS, HOUAT, HOEDIC, BATZ, SEIN
    la surfréquentation c’est PLUS: de piétinement de la nature, d’encombrement des infrastructures, de déchêts, d’invivilités, …..

  2. Pauline dit :

    Préserver l’environnement est un devoir. Tout comme la tranquillité du lieu. Ce n’est agréable ni pour les résidents, ni pour les touristes eux-mêmes. Où est le charme de se promener au coude à coude, les uns derrières les autres comme sur un quai de métro ou une grande surface bondée ? C’est insupportable !

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